SOS médecins saturé : « Désolé monsieur, nous n’avons pas de médecins disponibles avant 22h ce soir »

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On s’y attendait, la triple épidémie, grippe, Covid, bronchiolite, couplée aux vacances et à la grève des médecins libéraux, ça ne pouvait qu’être tendu pour les médecins sur le pont. Reportag dans un centre SOS Médecins saturé.

SOS médecins saturé : « Désolé monsieur, nous n’avons pas de médecins disponibles avant 22h ce soir »

© IStock

"Désolé monsieur, nous n'avons pas de médecins disponibles avant 22h ce soir". En cette fin d'année, les services de SOS Médecins font face à une période de "tension inédite", sur fond de triple épidémie et de grève de certains médecins libéraux.

Depuis une semaine, les malades défilent par centaines dans la petite salle d'attente du cabinet de SOS Médecins dans le 13e arrondissement de Paris. "On a essayé de s'adapter au nombre de patients en rallongeant nos gardes, mais ces derniers jours sont très compliqués", avoue Urfan Ashraf, vice-président de SOS Médecins Grand Paris, en replaçant son masque chirurgical sur le nez.

Le Dr Ashraf et ses 35 confrères de garde à Paris prennent en charge entre 1 200 et 1 500 personnes par jour, soit "30% de plus que l'année dernière", afirme-t-il, désespéré. La semaine dernière, un pic de 1 630 rendez-vous a été atteint, du jamais-vu depuis 10 ans. Le médecin évoque "une double tension". D'un côté, "une triple épidémie" hivernale avec le Covid, la bronchiolite et la grippe "qui atteint un pic". De l'autre, la grève des généralistes libéraux, à laquelle a appelé le collectif "Médecins pour demain" entre Noël et le jour de l'an pour demander le doublement du tarif de consultation de base (de 25 à 50 euros).

Un mouvement que SOS Médecins "soutient", afirme le Dr Ashraf, mais qui "réoriente les patients vers nos services, déjà saturés".

« On essaie de trouver une solution pour chacun. Si ce n’est nu médecin, c’est une pharmacie de garde »

Dans le centre d'appels voisin, Malika Touita, 57 ans, voit les appels s'enchaîner sur l'écran de son ordinateur. Opératrice téléphonique, elle "est le premier échelon de la prise en charge". Ces derniers jours, elle aussi se retrouve débordée, avec entre 30 et 40 personnes en attente.  "On essaye de toujours trouver une solution pour chacun. Si ce n'est pas un médecin, c'est une pharmacie de garde, par exemple". Mais face aux délais parfois très longs pour avoir un rendez-vous, "il faut faire preuve de pédagogie", ajoute-t-elle.

Chloë Vialle a fait 30 kilomètres depuis le Val-de-Marne pour avoir un rendez-vous. Prise de vertiges depuis quatre jours, elle a d'abord cherché un médecin vers chez elle, "mais mon généraliste fait grève et les centres médicaux n'ont pas de rendez-vous avant trois semaines", déplore-t-elle. Aux urgences, "on nous a dit de partir, il y avait sept heures d’attente !", raconte, désemparée, cette femme de 26 ans. A ses côtés, Agnès Fritsch, 76 ans, vient de Meudon, à 20 kilomètres au sud de Paris. Elle aussi s'est retrouvée sans médecin traitant. "Seule option : SOS Médecins". 

« Des patients arrivent parfois vraiment limite, ils devraient être à l’hôpital par chez SOS médecins »

Au centre SOS Médecins de Tourcoing (Nord), le Dr Serge Bomoko n'avait "jamais vu" un tel afflux de patients. Avec "500 passages sur 24 heures, le double qu'en temps normal" sur les deux sites de Roubaix et Tourcoing, "on est de plus en plus fatigués", afirme le président local de ce service médical libéral d'urgence. La faute selon lui à "un système de santé qui craque", avec en sus la grève des généralistes, "justifiée avec ce délitement de la santé".  Des patients "arrivent parfois vraiment limite", s'inquiète-t-il, citant un octogénaire venu consulter "avec des œdèmes partout". 

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/revenus-des-medecins-liberaux-faible-augmentation-et-fortes-disparites-par-spe-par-sexe

A Paris, le Dr Ashraf, s'inquiète lui aussi du "risque d'échappement" des patients laissés sans soins. "Certains viennent et sont en grande détresse respiratoire depuis plusieurs heures. Ils devraient être à l'hôpital, pas dans nos services", dénonce-t-il. Pour faire face, le responsable évoque une solution : "si j'avais le double voire le triple de médecins, on pourrait peut-être contenir la demande cet hiver".

 

Avec AFP

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