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« C’est la première chose que je fais quand un patient me consulte. Je reprends l’ordonnance et réévalue les médicaments » commence le Dr Cyrielle Rambaud. D’ailleurs, certains patients viennent spécifiquement la consulter avec leurs ordonnances pour les réévaluer. En cas d’oublis d’une ou plusieurs ordonnances, la gériatre, accède au DMP pour les retrouver, et sinon, en dernier recours, elle contacte la pharmacie pour obtenir les dernières ordonnances du patient, en leur possession. En bref, tous les moyens sont mis en œuvre pour accéder aux informations nécessaires.
« Souvent, les médecins généralistes n’osent pas retoucher aux prescriptions d’autres confrères »
La gériatrie fait à la fois partie des spécialités où les réévaluations de prescription sont fortement ancrées mais où peut-être, paradoxalement, le besoin de médicaments peut être le plus fort. D’ailleurs selon la gériatre, cela reste encore assez difficile de toucher aux prescriptions des autres praticiens et elle conseille de prendre le temps de bien communiquer sur les changements, notamment à l’aide de comptes-rendus précisant les raisons des changements. « Dans le cursus de gériatrie, on nous apprend à regarder l’ordonnance et à réévaluer les traitements et surtout à éliminer ceux qui peuvent être iatrogènes chez le sujet âgé. » explique Cyrielle Rambaud, qui ajoute que « Dans la pratique, souvent, les médecins généralistes n’osent pas retoucher aux prescriptions d’autres confrères, alors que c’est toute leur place de réévaluer en fonction de l’évolution de la maladie. Si personne ne touche jamais aux ordonnances, on se retrouve avec des prescriptions de quatre pages ».
« Je fais comprendre aux patients que l’ordonnance ne doit pas vieillir avec eux »
Côté patient, c’est la même chose, la communication et la pédagogie sont de mises. « Je leur fais comprendre que l’ordonnance ne doit pas vieillir avec eux. Il faut être pédagogue et bien expliquer au patient pourquoi on arrête ou on diminue le traitement sinon le patient ne va pas du tout adhérer. Par exemple, chez la personne âgée, certains traitements pour l’incontinence urinaire peuvent être iatrogènes et lorsqu’ils ne sont plus efficaces, j’explique au patient l’intérêt de les arrêter ». Apprendre à déprescrire, c’est donc important pour éviter l’iatrogénie médicamenteuse et essayer de créer une alliance entre le praticien, le patient et les spécialités qui gravitent autour de lui. Et c’est important de faire attention à la façon de communiquer. « Je mets un point d’honneur à ne pas dénigrer la prise en charge de ma consœur ou mon confrère et de bien expliquer pourquoi c’est nécessaire de changer l’ordo ou déprescrire. Et je rassure le patient, qui parfois, a peur de vexer le spécialiste, en lui disant que je vais prendre le soin d’envoyer le compte-rendu pour expliquer les modifications » complète Cyrielle Rambaud.
Autre point légitime, l’inquiétude du patient vis-à-vis d’un traitement qu’il a depuis des années. Et si la gériatre semble rodée sur le sujet, puisqu’il est au cœur de sa pratique, elle invite les médecins à se rendre disponibles pour répondre aux questions et inquiétudes éventuelles des patients. Pour cela, Cyrielle Rambaud suggère d’y aller progressivement : « Je leur propose de faire des essais. Je les rassure en disant qu’on peut revenir en arrière à tout moment. Je propose souvent de faire un point téléphonique à 15 jours pour voir comment l’arrêt des traitements se déroule, répondre à d’éventuelles questions. Ça rassure le patient de savoir qu’il peut revenir me voir s’il en a besoin ».