Prescriptions systématiques : l’enjeu de l’éducation des patients pour déconstruire les croyances

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Prescription de médicaments, multiplication des imageries… Dans la gestion de la douleur, l’éducation thérapeutique est plus que nécessaire. Le Dr Arthur Lefort, médecin du sport en libéral* partage son quotidien en traumatologie sportive face à des patients qui souffrent.

Prescriptions systématiques : l’enjeu de l’éducation des patients pour déconstruire les croyances

© Midjourney x What's up Doc

« J’ai des patients qui me demandent des anti-inflammatoires ou des antalgiques de pallier 2, potentiellement addictogènes, et que je refuse car cela ne guérit pas la pathologie sous-jacente et serait même contreproductif. Ou alors, j’ai des patients qui arrivent avec un rendez-vous d’IRM déjà pris, en espérant repartir avec la prescription », confie le Dr Arthur Lefort. 

Face à ces patients insistants, Dr Arthur Lefort, installé en libéral dans le 16ᵉ arrondissement de Paris, privilégie une approche raisonnée et progressive des prises en charge et s’attache avant tout à comprendre l’origine des douleurs fonctionnelles et articulaires qui les amènent à consulter. Pas question de prescrire trop et trop vite, sans chercher à comprendre.

« Je ne prescris des médicaments et des examens d’imagerie que lorsque c’est nécessaire, en prenant le temps d’expliquer pourquoi »

« Les pathologies que je vois le plus souvent ? Des douleurs de genou, d’épaule, des tendinopathies, ou encore des plaintes articulaires sans explication évidente chez des patients actifs », explique-t-il. En traumatologie sportive, les patients recherchent rarement un arrêt de travail mais avant tout un soulagement rapide et efficace de leurs symptômes ». Quitte à réclamer des anti-douleurs inappropriés. 

Face à ces plaintes variées, Arthur Lefort insiste sur l’importance d’un examen clinique poussé, enrichi de tests spécifiques pour objectiver les symptômes. « Je ne prescris des médicaments et des examens d’imagerie que lorsque c’est nécessaire, en prenant le temps d’expliquer pourquoi car beaucoup de patients pensent qu’une batterie de tests est indispensable pour être “bien pris en charge”. Il faut déconstruire cette idée tout en respectant leur temporalité. » Loin des solutions miracles, le parcours de soin débute souvent par des traitements ciblés comme des infiltrations, ou même des tests anesthésiques pour affiner le diagnostic. « Les infiltrations, par exemple, permettent non seulement de soulager la douleur mais aussi de confirmer son origine. Cela nous aide à mieux orienter le traitement. »

« J’essaye de remplacer le traitement médicamenteux systématique par de l’éducation thérapeutique »

« J’essaye de remplacer le traitement médicamenteux systématique par de l’éducation thérapeutique pour que le patient puisse comprendre que c’est une aide temporaire. Je crois que la lutte contre la surconsommation médicamenteuse démarre dès la première prescription en expliquant au patient l’objectif et la durée du traitement, et ce, même chez les patients chroniques ». Ainsi, la rééducation, notamment avec des kinésithérapeutes, reste une pierre angulaire de sa prise en charge des patients. « Un patient sur deux suit un programme de kiné. C’est un excellent adjuvant, mais il faut éviter là aussi, de créer une dépendance. » 

Arthur Lefort insiste sur l’importance d’autonomiser ses patients, notamment ceux souffrant de pathologies chroniques. « C’est comme arrêter un médicament addictogène : il faut préparer le patient à se prendre en charge seul. » Cette approche demande une collaboration étroite avec les kinés, même si, comme il le reconnaît, « échanger sur des situations cliniques prend beaucoup de temps. » 

En parallèle, le médecin de sport sensibilise ses patients aux risques de l’automédication : « J’ai des cas où des traitements inadaptés retardent la prise en charge et, par conséquent, la guérison. On sous-estime aussi les effets secondaires de certains médicaments courants, comme l’oméprazole, qui peut contribuer à l’ostéoporose s’il est pris sur le long terme. »

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/assurance-maladie/soigner-mieux-en-prescrivant-moins

In fine, au-delà de son rôle thérapeutique, Arthur Lefort voit son métier comme une mission pédagogique : expliquer, rassurer, mais aussi poser des limites. « Les gens ont parfois du mal à comprendre pourquoi un médicament ou un examen n’est pas nécessaire immédiatement. Il faut leur montrer qu’une approche moins invasive peut être tout aussi efficace et avoir moins d’effets secondaires » conclut-il.

- Des pratiques médicales décrites pour l'Assurance Maladie

Source:

*Directeur médical du magazine Senévé
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