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Publiés dans la revue d'obstétrique et gynécologie BJOG, ces travaux exploitent les données de l'enquête nationale périnatale de 2021 et associent des chercheuses de l'Inserm et l'AP-HP, l'Université Paris Cité, l'INRAE et l'Université Sorbonne Paris-Nord.
Ils se basent sur les réponses à un questionnaire de 7 189 femmes de France métropolitaine ayant accouché pendant une semaine du mois de mars 2021, sondées deux mois plus tard, dont 16,6% présentaient des symptômes de dépression post-partum.
« La dépression périnatale concerne 10 à 20% des femmes à travers le monde, une femme sur six selon les données françaises, ce qui en fait la complication principale de la grossesse », rapporte la psychiatre Sarah Tebeka de l'hôpital Louis-Mourier à Colombes (Hauts-de-Seine) à l'AFP.
Parmi les femmes interrogées dans l'étude, 24,9% soit une sur quatre, ont rapporté avoir avoir subi des « soins de maternité irrespectueux » c'est-à-dire avoir été « blessées, choquées ou mises mal à l'aise » par des « paroles, gestes ou comportements de soignants », précise Marianne Jacques, première autrice de l'étude et sage-femme.
Absence de prise en compte de la douleur ou de recueil du consentement... ces comportements ne sont, en majorité, pas réalisés avec l'intention de nuire.
Or deux mois plus tard, ces femmes présentaient un risque d'être atteintes de dépression post-partum supérieur de 37% -selon les critères d'un questionnaire de dépistage couramment utilisé-, comparé à celles ayant indiqué avoir bénéficié de « soins respectueux ».
Cette « association entre soins irrespectueux subis pendant le travail, l'accouchement ou le séjour en maternité et symptômes de dépression du postpartum deux mois plus tard a été observée, y compris parmi les femmes ayant un faible risque psychique préexistant ou un bas risque médical », précise Marianne Jacques à l'AFP.
Des mamans déshumanisées
L'accouchement étant une période de vulnérabilité particulière pour la santé mentale des femmes, des soins irrespectueux peuvent causer un « stress aigu » et des « sentiments de déshumanisation, de dévalorisation, de perte de confiance en soi » favorisant la survenue de la dépression, décrit-elle.
Ainsi les femmes à risque élevé de dépression post-partum -en raison d'antécédents psychologiques, psychiatriques, de symptômes dépressifs prénataux...-, doivent-elles faire l'objet d'une attention particulière et d'un dépistage systématique, souligne l'étude.
Mais l'expérience de celles dépourvues de ces vulnérabilités doit aussi être explorée systématiquement.
Selon les données disponibles, les idées suicidaires concernent en France, jusqu'à 8% des femmes en période périnatale: grossesse et première année du bébé.
Si la dépression post-partum est une maladie « très multifactorielle, dont peu de facteurs sont modifiables, car liés à l'histoire de vie des femmes: expériences stressantes, précarité... », dit Marianne Jacques, « garantir des soins de maternité respectueux » permet d'agir sur son incidence.
Et si des soins de qualité « doivent limiter les risques de morbidité et de mortalité maternelles et fœtales à court terme », ceux à long terme doivent eux aussi être évalués.
Pour que les soins de maternité respectueux soient la norme, la formation des soignants doit inclure les compétences relationnelles, souligne l'étude, et des ressources adéquates (équipes stables, charge de travail raisonnable) être allouées.
L'équipe admet une limite à l'étude, à laquelle ont collaboré Santé publique France et le Collectif interassociatif autour de la naissance: elle porte sur la période de la pandémie de Covid-19, où la détérioration de la santé mentale de la population a pu jouer sur le taux de dépression post-partum observé. Et certaines femmes ont pu juger « irrespectueuses », des mesures sanitaires (restriction des visites, port du masque obligatoire) prises alors.
Mais rien n'indique, dit-elle, que ces facteurs aient influencé l'association entre soins de maternité irrespectueux et symptômes de dépression post-partum.
Les anesthésistes se mobilisent
Dans un communiqué, le SNPHARE (anesthésistes-réanimateurs hospitaliers) alerte sur une « crise de la périnatalité » et sur l’épuisement des salles de naissance, entre fermetures de petites maternités jugées à risque et manque de moyens humains dans des maternités plus « grosses », notamment en anesthésie.
L’annonce d’un plan gouvernemental est, elle, déjà sur la table : lors de la séance à l’Assemblée nationale du mardi 9 décembre 2025, il est indiqué que la ministre « dévoilera dans les prochaines semaines un plan d’action complet pour les maternités, visant à concilier la qualité des soins et l’accès aux soins ».
Le syndicat demande surtout une méthode : une concertation réelle avec les professionnels, dans un contexte où la révision des décrets de périnatalité de 1998 (qui encadrent notamment les conditions techniques et l’organisation des maternités) est régulièrement citée comme indispensable — un chantier engagé en 2018 puis interrompu, et que les organisations de la périnatalité réclament de relancer.
Parmi les pistes mises en avant par le SNPHARE : renforcer la présence médicale 24 heures sur 24 (gynécologue-obstétricien, anesthésiste-réanimateur, pédiatre), mieux calibrer les effectifs au volume d’accouchements et clarifier, par niveau d’établissement, les capacités de prise en charge maternelle — un volet « organisation des soins » que le syndicat relie directement à la sécurité, mais aussi aux conditions de travail des équipes, donc à la qualité du vécu des patientes.
Avec AFP
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