Internes remplaçants : l’Ordre veut tout changer

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Les syndicats contestent une modification des conditions d’accès aux remplacements pour les internes. Ils ne pourraient plus remplacer avant leur phase de consolidation.
 

Internes remplaçants : l’Ordre veut tout changer

L’Intersyndicale nationale des internes (Isni) est sur le pied de guerre. Dans un communiqué publié le 17 avril, elle conteste la volonté du Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) de modifier le nombre de semestres requis avant que les internes puissent obtenir une licence de remplacement.
 
Dans un courrier envoyé aux présidents des Conseils nationaux professionnels (CNP) des différentes spécialités, l’Ordre annonce en effet que les critères en vigueur « ne correspondent […] plus à la nouvelle maquette de formation » et qu’il « apparaît donc nécessaire de les mettre à jour ».

Plus c’est long, plus c’est bon pour le Cnom

Dans un souci de « simplification administrative » et d’« uniformisation de la procédure, en ce qu’elle s’applique à tous les DES », le Cnom propose de mettre tout le monde à la même enseigne : pas de remplacements avant la phase III de l’internat, dite de « consolidation ». Le changement ne concerne pas la médecine générale. Mais pour de nombreuses spécialités, il se traduirait tout simplement par la nécessité d’effectuer plus de stages avant de pouvoir remplacer.
 
Pour l’anesthésie-réanimation, par exemple, il fallait jusqu’à présent effectuer quatre stages cliniques spécifiques dans des services agréés correspondant à la spécialité, et un stage libre (1). Avec la nouvelle donne voulue par l’Ordre, il faudrait donc attendre la fin de la phase socle (deux semestres) et de la phase d’approfondissement (six semestres). Soit huit semestres en tout. Ça fait un peu plus long…

Une décision à contre-courant ?

L’Isni ne comprend pas cette demande. Outre le prétexte de simplification administrative, l’Ordre la justifie par un autre « avantage » : celui de s’assurer de la « compétence de l’étudiant ». Avec quelques semestres en plus, il fera moins de bêtises.
 
« Ce qui est étonnant, c’est que tout en expliquant que les internes ne seraient pas encore aptes à remplacer, l’Ordre nous répond qu’il n’y a pas d’incidence supplémentaire en matière d’erreurs médicales », s’étonne auprès de What’s up Doc Antoine Reydellet, président de l’Isni. « Et au contraire, il serait plus cohérent de débuter les remplacements plus tôt, car les internes concernés effectuent des stages en lien direct avec leur spécialité plus tôt qu’avec l’ancienne maquette ».

Le Cnom attend un consensus

Joint par WUD, le Pr Robert Nicodème, président de la section Formation et compétences médicales du Cnom, responsable du dossier, se défend de vouloir imposer une vision aux internes. « Cette idée nous paraissait logique d'un point de vue pédagogique », explique-t-il. « Avec la réforme du 3e cycle, l'ensemble du champ des spécialités n'est vu qu'à l'issue de la phase d'approfondissement, c'est donc ce qui apparaissait le plus fiable. Et l'accès aux remplacements tel que nous le proposons est en accord avec les dispositions de docteurs juniors ». Plusieurs CNP auraient d'ailleurs répondu favorablement, même si le Cnom attend encore des retours de certaines spécialités.

Mais le Pr Nicodème insiste sur le fait que ce n'est qu'une proposition. « Nous allons nous concerter avec les CNP et les internes, et s'il n'y a pas de consensus, nous verrons comment nous pourrons adapter les conditions d'accès », précise-t-il.

Entre formation et main-d'oeuvre

« La demande en remplacement des internes est très forte », ajoute Antoine Reydellet, qui s'inquiète de la pénurie que la modification pourrait engendrer dans certaines spécialités, dans un contexte déjà très tendu. « En anesthésie-réanimation, par exemple, on risque de se trouver en crise sanitaire durant l’été. Les services fonctionnent avec les internes et les internes remplaçants ! » Les remplacements sont aussi l’occasion pour les étudiants de mettre un peu d’argent de côté pour financer des masters, précise également l’Isni.

« Au final, c'est le ministère qui décidera », conclut le Pr Nicodème. Et il ne faudra pas traîner. La promo ECNi 2017 ne va pas tarder à arriver au moment fatidique des premiers remplacements, et les textes précédents, datant de 2014, sont rendus caducs par la réforme du 3e cycle. L’intersyndicale se dit prête pour la suite.
 
 
(1) L’annexe 41-1 du Code de la santé publique détaille les conditions d’accès par spécialité
 

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