Grève du 10 décembre : l'union des syndicats d'internes fait la force

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Le 10 décembre sera une date à marquer au fer rouge pour les syndicats d’internes qui n’ont jamais semblé aussi unis dans la lutte. Nombreux sont en effet ceux qui appellent à une grève nationale « totale et illimitée ». Coup de projecteur sur les revendications des syndicats qui seront mobilisés ce 10 décembre.
 

Grève du 10 décembre : l'union des syndicats d'internes fait la force

« Nous sommes les esclaves des temps modernes ... mais nous souffrons en silence ». Photo d’interne à l’appui – un certain Marc, bac +9, payé 9€/H brut pour « sauver des vies » - ce tweet récent de Lucas Reynaud, président du SAIHL (Syndicat autonome représentant les internes de Lyon), résume bien l’état d’esprit actuel de nombreux syndicats d’internes qui ont appelé à une grève nationale « totale et illimitée » à partir du 10 décembre.

À la veille d’une mobilisation qui s’annonce particulièrement forte, Lucas Reynaud y est allé de son petit thread sur Twitter pour rappeler les raisons pour lesquelles de nombreux syndicats d’internes (Isni, Isnar-IMG, SAIHL, SAIHM, SNJMG, SIHP,  SRP-IMG Saihcs, Sarra…) ont décidé de débrayer ce 10 décembre.
 
Le président du SAIHL rappelle par exemple que les différentes enquêtes sur les risques psycho-sociaux sont sans appel : « Nous sommes la catégorie d’âge et socio professionnelle la plus exposée au burn out et au risque suicidaire ». Un risque qui serait en effet multiplié par deux.

Autres raisons de la colère des internes : le manque d’encadrement, le fait qu'il soient trop souvent livrés à eux-mêmes durant les stages. « Nous sommes étudiants sur le papier seulement, car en vrai nous sommes professionnels de santé à temps plein », regrette Lucas Reynaud dont les revendications sont les suivantes : décompte du temps de travail des internes, respect du repos de garde, investissement de l’État dans la formation, revalorisation de l’aide de logement...

Mais c’est l’Isni qui est à l’origine de ce mouvement de grève national des internes. Dès le 5 novembre dernier, l’intersyndicale invitait ses syndicats locaux à se prononcer sur une grève nationale des internes totale et illimitée à partir du 10 décembre 2019. Le 5 décembre, elle fera notamment grève pour l’amélioration du statut de praticien en formation. L'Isni exige notamment :
- Un décompte horaire du temps de travail des internes et un paiement des heures supplémentaires,
- Une politique d’aide au logement indexée sur les prix de l’immobilier,
- Une revalorisation des indemnités de gardes,
- L’investissement de fonds publics pour notre formation,
- Le maintien des règles concernant l’obtention des licences de remplacement.
 
Enfin, l’Isni refuse la procédure de « big matching » (les choix de stage des internes et ceux des maitres de stage sont confiés à un algorithme qui, en fonction des desideratas de chacun, propose la meilleure combinaison) pour 2020 et demande que « la concertation aboutisse avant de mettre en péril l’avenir professionnel de nos mandants ».

Le SAIHCS et le Sarra défendent une formation de qualité

Son de cloche similaire du côté des syndicats d’internes de Strasbourg (SAIHCS et Sarra) qui feront grève le 10 décembre pour défendre la qualité de la formation. Car si la réforme de l’internat est actuellement en cours (son décret d’application est paru en 2017), « les internes ne connaissent toujours pas leur statut pour 2020 ! », déplorent les deux syndicats dans un communiqué daté du 27 novembre.

Et d’expliquer que la réforme prévoit, pour ceux qui entrent dans leur dernière année d’internat, une « année de consolidation » où l’interne devient « docteur junior » puisqu’il aura passé sa thèse un an plus tôt.

Or, « au lieu d’effectuer deux stages de 6 mois comme les années précédentes afin de terminer sa formation, l’interne sera envoyé pendant un an dans un service de la grande région (ouvert et agréé de façon inconnue), au gré d’un « Big Matching » (aux modalités toujours inconnues), par un logiciel toujours pas développé (et dont les développeurs sont toujours inconnus) », taclent les deux syndicats qui ajoutent que cet interne exercera dans ce service « sous une responsabilité inconnue, pour une rémunération inconnue ».

150 millions d’euros par an de formation en moins

Autre cheval de bataille pour les deux syndicats : l’ordonnance dite « loi anti-cadeaux » qui interdit aux industriels de financer des formations aux internes. Or, « l’État est dans l’incapacité de financer ces formations indispensables aux internes », affirment le SAIHCS et le Sarra qui évoquent « environ 150 millions d’euros par an de formation dont l’État prive les internes, sans contrepartie ».

Et de conclure : « À défaut d’être payés à la hauteur du travail effectué, à défaut de respecter la loi européenne sur le temps de travail, quitte à rester la main d’œuvre qualifiée bonne à tout faire et aux prix le plus bas de tout l’hôpital public, les internes demandent au moins à être respectés et correctement formés ! »
 

Le SIHP et le SRP-IMG en grève
Le mouvement de grève lancé par l’Isni a également été rejoint par les syndicats d'internes parisiens : le SIHP (Syndicat des internes des hôpitaux de Paris) et le SRP-IMG. Leurs revendications « visent à améliorer le statut de l’interne et à la clarification de certaines procédures (comme l'accès à la licence de remplacement et le financement de la formation) ». Et d’exiger, pour la médecine générale, comme l’Isni, un décompte horaire du temps de travail et un paiement des heures supplémentaires. Mais aussi le maintien de la possibilité de remplacer dès la moitié de la maquette ; une revalorisation salariale alignée sur la fonction publique hospitalière de catégorie A (comme les sages-femmes) ou un meilleur déploiement de moyens pour l'Hôpital Public, comme l’exige le CIH (collectif Inter-Hôpitaux). Le SIHP et le SRP-IMG ajoutent que les internes de médecine générale « travaillons trop, et bien souvent dans de mauvaises conditions ». Et considèrent que « l’augmentation globale de moyens que nous demandons est le reflet d’un alignement au coût de la vie, et d’une rémunération à notre juste valeur ».

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