Endométriose : En route vers le diagnostic précoce !

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Sept ans. C’est en moyenne le retard qu’accuse le diagnostic de l’endométriose. Pour faire face à ce problème de santé publique, les professionnels de santé s’organisent autour d’un webinar pensé pour faciliter la prise en charge de cette pathologie qui touche 10 % des femmes.   

Endométriose : En route vers le diagnostic précoce !

« 41 % des femmes interrogées estiment que c’est le diagnostic précoce de la maladie qui les a le plus aidées », lâche Nina Guéneau, sage-femme, au cours d’un webinar baptisé « L’endométriose, le rôle des professionnels de santé » organisé le 6 mai dernier. Dans le cadre de la semaine dédiée à la formation des professionnels de santé organisée début mai, de nombreux experts de la pathologie sont venus partager leur savoir afin d’améliorer la prise en charge de cette pathologie. Une mission d’importance, orchestrée par le CNGOF,  des sociétés savantes et des associations de patientes, qui s’inscrit dans la prolongation du Programme endométriose annoncée en mars 2019 par le gouvernement et qui sera suivie d’un MOOC spécial endométriose à partir du 25 mai.

« Si les chiffres ne sont pas stabilisés, on estime qu’entre 1,5 et 2,5 millions de femmes en âge de procréer sont concernées en France », estime Olivier Véran dans la bande annonce de l’événement. Une prépondérance que n’oublient pas les sept spécialistes présents lors de ce webinar. « En moyenne, l’endométriose touche 10 % des femmes », complète François Golfier, chef du Service de Chirurgie Gynécologique et Oncologique – Obstétrique Lyon Sud. Et le spécialiste chargé de la partie diagnostic précoce dans ce webinar d’ajouter : « Le diagnostic est la pierre angulaire de l’amélioration de la prise en charge ».

Une étape cruciale qui souffre encore aujourd’hui d’un retard important. Actuellement, cette pathologie ne serait diagnostiquée qu’en moyenne sept ans après l’apparition des premières douleurs.

Pourquoi un tel retard diagnostic ? 

« Cela s’explique à plusieurs niveaux : parfois la patiente ne parle pas de ses douleurs, dans la famille beaucoup de femmes en ont mais disent que c’est normal de souffrir. Parfois ce constat vient du médecin lui-même qui croit qu’il est normal d’avoir mal pendant les règles », nous expliquait Marie Ceccarelli, médecin généraliste spécialisée dans le suivi de l’endométriose et co-fondatrice du site Easy Endo. « Pourtant, ce n’est pas normal d’être invalidée. Quelques questions pourraient suffire à diagnostiquer l’endométriose, peu importe si on voit des lésions : une femme couchée pendant 3 jours, qui fait des malaises, vomit pendant ses règles, ce n’est pas normal.

Autre défi, « il faut  que le médecin qui voit sa patiente pour la première fois pense à demander le bon examen, c’est-à-dire l’écho pelvienne ou IRM pelvienne. Mais il faut aussi tenir compte des spécificités de chacune l’écho pelvienne n’est possible que chez des femmes ayant déjà eu des rapports mais aussi des femmes qui l’acceptent. C’est encore un examen délicat si la patiente est très douloureuse. L’IRM pelvienne ne nécessite pas de sonde, mais la claustrophobie en est une contre-indication », ajoute Elodie Hénot Radiologue spécialisée en endométriose, co-fondatrice d’Easy Endo.  « Une fois ces examens faits, il faut que le radiologue soit sensibilisé et formé à la maladie. J’ai 36 ans, j’ai appris à reconnaitre les grosses atteintes lors de mes études mais pas les plus subtiles. J’ai décidé de poursuivre ma formation et me spécialiser car une femme sur 10 souffre d’endométriose et je n’en diagnostique pas une sur 10 donc j’en loupe forcément. J’ai décidé de me reformer afin de reconnaitre des atteintes beaucoup plus petites », ajoute la radiologue.

Et si l'on ne trouve rien, les deux médecins s'accordent pour que les symptômes priment sur l'imagerie. « Il faut traiter même sans lésion. Le propre de la maladie est d’être rythmée par les règles, donc si c’est le cas, il faut suspecter une endométriose. C’est une maladie compliquée, encore mal comprise, il y a une discordance entre l’intensité des symptômes et l’importance des lésions. Parfois des lésions très légères entrainent de grosses douleurs et symptômes et parfois de gros nodules n'entraînent aucun symptôme », rappelle Marie Ceccarelli. 

Constance Maria 

« La douleur des règles est le principal signe », rappelle François Golfier, qui souligne que cette dernière est supérieure ou égale à 8 avec absentéisme induit (EVA). Un facteur saillant qui doit être décelé dès l’interrogatoire du patient. « Mais nous devons discriminer la dysménorrhée isolée de celle de l’endométriose », précise-t-il. Et pour cause : selon son expertise, la prévalence des dysménorrhées sévères est évaluée à 40 % des femmes en période d’activité génitale, sans contraception.  « Celle de l’endométriose est évaluée en moyenne à 10 % de la population féminine, poursuit le spécialiste. En conséquence, toute dysménorrhée n’est pas synonyme d’endométriose. »

Un point d’attention qui peut donc s’accompagner d’un mémo, surnommée « La règle des 5D ». Au programme donc, repérer une dysménorrhée intense accompagnée :

  • De dyspareunie profonde ;
  • De douleur à la défécation à recrudescence cataméniale ;
  • Douleur « vésicale » à recrudescence cataméniale ;  
  • Douleur pelvienne chronique.

« Sans être une règle absolue, une dysménorrhée associée à un autre D doit faire évoquer une endométriose », indique le spécialiste qui souligne qu’il s’agit alors de mener un examen complet. « Rechercher des nodules bleutés vaginaux en arrière du col, nodule ou douleurs des ligaments utérosacrés », énumère-t-il dans sa présentation. « Nous devons chercher ce qui se passe dans le cul de sac vaginal postérieur, poursuit-il. Si vous avez examiné cette zone, vous avez fait l’examen clinique ». Car pour lui, pas de doute : l’atout maître du praticien est à n’en pas douter sa capacité à (bien) examiner.  

Quelle stratégie de diagnostic primaire adopter quand il n’y pas de signe direct d’endométriose ?

Qu'on soit généraliste ou gynéco, la patiente doit réaliser une échographie pelvienne et rénale.

En l’absence d'un désir de grossesse, cette étape doit être accompagnée de la prescription d’une contraception. Un traitement dont l’efficacité et la tolérance doivent être évaluées quatre à six mois après. « En cas d’échec, je considère l’option d’adresser ma patiente à une consultation expert endométriose », conclut François Golfier.

 

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