« De moins en moins de jeunes s’intéressent à la recherche sur le VIH, ça m’inquiète »

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Alors que débute aujourd’hui le week-end de mobilisation et de collecte du Sidaction dans tout le pays, sa présidente, la virologue nobélisée Françoise Barré-Sinoussi, estime qu'il est possible d'éradiquer le sida, à condition d'améliorer l'accès au dépistage et aux traitements.

« De moins en moins de jeunes s’intéressent à la recherche sur le VIH, ça m’inquiète »

Françoise Barré-Sinoussi dirige le Sidaction.

© DR.

Quarante ans après la découverte du virus du sida, les avancées sont immenses mais peut-on aller plus loin ?

Françoise Barré-Sinoussi : Tout à fait puisqu'il y a un peu plus de 38 millions de personnes qui vivent avec le VIH dans le monde et encore chaque année plus de 650 000 morts du sida. Ca veut dire qu'on n'a pas encore éradiqué la maladie, pourtant on doit y arriver puisqu'on sait qu'avec les traitements, les personnes ne développent pas la maladie. Si on arrive à traiter 100% des personnes infectées, elles ne développeront plus le sida.

Mais un quart des personnes qui vivent avec le VIH n'ont toujours pas accès aux traitements pour différentes raisons, y compris le fait que le dépistage est insuffisant. Il faut continuer à développer l'accès aux traitements et aux soins, et améliorer le dépistage.

En 2021, en France, 30% des personnes qui ont découvert leur séropositivité étaient à un stade avancé de l'infection. Or plus on est traité vite, plus l'espérance de vie est la même que celle d'une personne non infectée par le VIH, et moins on contamine les autres. Les messages ne sont visiblement pas très bien passés.

La stigmatisation, la discrimination restent présentes et peuvent constituer des freins au dépistage. La crise Covid a aussi porté un coup d'arrêt à l'activité qui a chuté en 2020 de 14% par rapport à 2019, et n'a réaugmenté que de 8% en 2021.

Depuis quelques d'années, plusieurs cas de "guérison" du VIH ont été rapportés chez des patients après une greffe de moelle osseuse pour traiter une tumeur. Est-ce un espoir ?

F BR. Ce sont des avancées importantes pour la recherche car, grâce à ces cas, on peut apprendre quels traitements initier pour contrôler l'infection.

Mais on ne peut certainement pas les développer à large échelle. Ce sont des traitements extrêmement lourds, proposés à des patients qui avaient développé des cancers. Il a fallu associer à la greffe des traitements immunosuppresseurs.

On peut tout de même apprendre beaucoup de ces patients. C'est pour cela que la recherche se concentre sur ces cas comme sur les patients "contrôleurs du VIH" : de rares personnes séropositives qui ont été traitées extrêmement tôt après leur infection et qui parviennent à maintenir une charge virale suffisamment basse pour pouvoir se passer de traitement.

Tout ce qu'on comprend de ces cas est extrêmement important pour définir de nouvelles stratégies thérapeutiques. On ne pourra pas éradiquer le VIH car ce virus reste présent dans l'organisme, y compris sous traitement. Mais une des grandes priorités de la recherche, c'est que bientôt les malades puissent prendre un traitement pendant un certain temps, l'arrêter et qu'à l'arrêt du traitement, le virus reste contrôlé.

Quid d'un éventuel vaccin ?

F BR. Pour l'instant, on n'a aucun candidat vaccin qui a montré son efficacité. Ce n'est pas pour autant que la recherche sur ce sujet s'arrête. Il y a des candidats vaccins à ARN à l'étude en ce moment mais on n'est pas dans le même contexte que le Covid : on est face à un virus beaucoup plus compliqué qui s'attaque aux cellules de la défense immunitaire. La recherche avance, je suis juste un peu inquiète de voir que de moins en moins de jeunes s'intéressent à la recherche sur le VIH, à la science tout court.

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Pour le sida, on a la chance d'avoir des traitements mais aussi une prévention, la prophylaxie pré-exposition (la PreP) qui marche très bien et qu'il faut développer en attendant les vaccins du futur.

Avec AFP

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