Comment prendre en charge les victimes de violences sexuelles ?

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Face à l’absence de cours pendant les études de médecine sur la prise en charge des violences sexuelles, beaucoup d’internes s’étaient donné·es rendez-vous au congrès de l’Isnar-IMG, qui s’est tenu les 24 et 25 février à Tours, pour apprendre comment réagir.

Comment prendre en charge les victimes de violences sexuelles ?

Dans la salle, le silence s’impose.Ce sujet peut être difficile, commence Barbara Begault, chargée de mission lutte contre les discriminations à l’Isnar-IMG. Donc vous pouvez quitter la salle à tout moment. Les violences sexuelles restent un sujet tabou dans notre société, pourtant, cela nous concerne tous et toutes. Comme victime, comme témoin ou même parfois comme auteur que ce soit voulu ou non.”

Chaque année, 94.000 femmes sont victimes de viols ou de tentatives de viols. Pourtant, leur prise en charge est peu étudiée lors des études de médecine générale. “L’importance d’être formé·e à déceler les violences sexuelles, c'est de pouvoir accompagner les victimes dans leurs parcours de soins”, continue Barbara Begault.

« Oui des attouchements sur les fesses ou les seins, ce sont des agressions sexuelles »

Une IVG sur quatre est liée à des violences sexuelles”, ajoute Perrine Millet, gynécologue obstétricienne et présidente de l’association Un Maillon manquant. “50% des maltraitances sur les enfants faites par des femmes sont des reproductions de la violence qu’elles subissent. Donc si on est capable de poser les bonnes questions, on peut casser la transmission de la violence.”

D’autant plus, souligne-t-elle, que les violences sexuelles ont des conséquences physiques tout le long de la vie des victimes.

Ce n’est pas un problème psycho-social mais bien un problème de santé publique”, souligne Perrine Millet. “L’histoire de la violence, c’est une histoire de répétition.” D’où la nécessité de parler de ces violences avec ces patient·es mais aussi de demander et de respecter le consentement lors des soins.

Derrière un refus d’examen, il peut y avoir une violence ancienne”, ajoute Léonardo Casini, médecin généraliste, membre d'Un Maillon manquant. Pour lui, prendre en charge une victime de violences sexuelles, c’est avant tout définir ce qu’est un viol ou une agression sexuelle. “A plusieurs reprises j’ai dû dire à mes patientes que oui une pénétration vaginale quand elles dorment, c’est un viol par surprise ; que oui des attouchements sur les fesses ou les seins, ce sont des agressions sexuelles.”

Une fois cette conscientisation de la violence faite, Léonardo Casini rappelle qu’il va falloir aussi lutter contre la culpabilité de la victime et de ses proches. “Ce n’est jamais la faute de la victime, même si elle a trop bu, même si elle porte une robe courte. Une absence de consentement n’est pas un “oui”.” 

En cas de plainte, cinq jours pour trouver de l’ADN

Il convient aussi de l’orienter vers un suivi psy, si elle le souhaite. Mais attention, cela peut prendre du temps. Il n’est pas inintéressant de rappeler aussi qu’en cas de plainte, il n’y a que cinq jours pour déceler de l’ADN. “Néanmoins, mon rôle n’est pas de pousser une victime à porter plainte, c’est un parcours très difficile qui aboutit peu. Nous on est là pour l’accompagnement et la prise en charge médicale.” Seul 12% des viols font l’objet d’une plainte aujourd'hui en France. Sur ces plaintes, seuls 7% aboutissent.

Quant aux violences dans le milieu médical, Perrine Millet rappelle qu’elles sont systémiques et qu’elles s’inscrivent dans un modèle rétrograde, celui de l’hétéro-patriarcat.

 

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