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Ce lundi 14 avril, le tribunal correctionnel de Bordeaux a rendu son verdict dans l'affaire Priscilla Dray, cette patiente qui avait dû être amputée des quatre membres suite à un choc septique survenu après une interruption volontaire de grossesse (IVG) au CHU de Bordeaux en 2011. Les docteurs Martial Dekhili et François Vandenbosche ont été condamnés respectivement à six mois et neuf mois de prison avec sursis pour blessures involontaires, le second écopant également d'une amende de 8 000 euros. En revanche, le CHU de Bordeaux a été relaxé.
Des fautes caractérisées dans la prise en charge
Le tribunal a estimé que les deux praticiens avaient commis des « fautes caractérisées » dans la prise en charge de la patiente, qui s'était présentée à deux reprises aux urgences gynécologiques après son IVG, souffrant de fièvre et de maux de tête. Il est reproché au Dr Martial Dekhili, chef des urgences lors de la première consultation, d'avoir renvoyé la patiente chez elle sans lui prescrire d'antibiotique à titre préventif, malgré des signes évocateurs d'infection.
Quant au Dr François Vandenbosche, chef de clinique de garde le lendemain, le tribunal a souligné son absence au chevet de la patiente malgré la dégradation de son état tout au long de l'après-midi. L'accusation avait particulièrement insisté sur « l'inactivité coupable » du médecin, qui n'aurait pas supervisé suffisamment la prise en charge assurée par une interne.
Des diagnostics difficiles mais des signaux d'alerte ignorés
Même si la difficulté du diagnostic des infections graves à streptocoques de type A, notamment en raison de l'intermittence des symptômes a été prise en compte, le procureur a souligné que de nombreux signaux d'alerte avaient été ignorés, y compris la lettre d'un médecin généraliste qui avait adressé la patiente aux urgences en évoquant explicitement un « sepsis grave ».
La défense avait plaidé la relaxe, arguant notamment de l'impossibilité d'établir avec certitude qu'une prise en charge différente aurait modifié l'évolution dramatique de la pathologie. Les avocats avaient également contesté la caractérisation des fautes au regard du code pénal.
Un rappel des bonnes pratiques en matière d'infections post-gynécologiques
Une vigilance accrue est nécessaire face aux complications infectieuses post-interventionnelles, particulièrement dans le cadre des IVG. Les infections au streptocoque A, bien que rares dans ce contexte, peuvent évoluer très rapidement vers un choc septique avec défaillance multiviscérale et nécessitent une prise en charge précoce et agressive. Il est donc recommandé d'instaurer une antibiothérapie probabiliste sans délai en cas de suspicion d'infection, même en l'absence de signes cliniques francs, particulièrement lorsque la patiente consulte à plusieurs reprises pour des symptômes persistants ou s'aggravant.