Jouir de soi

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Le dernier livre de Georges Vigarello offre un passionnant voyage dans l'« homme intérieur » et relate une histoire de sa construction.

Jouir de soi

Le Sentiment de soi, Histoire de la perception du corps retrace en effet les transformationsde cet espace intérieur perçu par un sixième sensinsoupçonné jusqu'au XVIIIe siècle en Europe– un « tact intérieur » dit L'Encyclopédie –. Cettesensation nouvelle de soi peut alors être explorée.

 

Elle devient un objet d'étude de la médecine : on essaie au début du XIXe d'accéder à cet espace intime en créant par exemple un « somnambulisme magnétique », proche de l'hypnose. Les drogues sont une autre façon d'entrer dans ce continent intérieur et sensible. Théophile Gauthier raconte alors ses expériences et celles du Club des Hashischins qui réunit consommateurs et médecins dans une même curiosité.

 

La dernière étape serait celle de la volonté de maîtrise de cette intériorité et voici les belles heures de la relaxation dont François Delsarte est l'initiateur au milieu du XIXe siècle. Le livre offre un dépaysement : on entre en soi avec une impression d'inconnu et de connu. Cette histoire, ponctuée d'exemples précis, ravive la conscience de la profondeur de cette intériorité construite au cours des siècles. Tout cela commence-t-il vraiment au siècle des Lumières ? Montaigne, plusieurs fois évoqué pourtant, le disait déjà : « c'est une absolue perfection, et comme divine de savoir jouir loyalement de son être ».

 

Georges Vigarello, Le Sentiment de soi, Histoire de la perception du corps, Éditions du Seuil, 2014.

 

 

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