Face à la détresse des salariés en télétravail, quel rôle pour le médecin ?

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L’explosion du télétravail a eu des conséquences négatives sur la santé des salariés. Comment les repérer et les prendre en charge ? L’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) s’est penché sur la question et donne des guidelines. 

Face à la détresse des salariés en télétravail, quel rôle pour le médecin ?

Trop de télétravail est délétère pour la santé. On s’en doutait -vu les difficultés exprimées par de nombreux salariés depuis le début de la pandémie - mais des études et des experts viennent le confirmer. Jeudi 28 avril, lors de la Journée mondiale de la santé et de la sécurité au travail, l’INRS organisait une table-ronde sur les risques psycho-sociaux (RPS) dans le cadre du télétravail.
Il en ressort que 100% de télétravail n’est pas une bonne option car les conséquences pour la santé des salariés concernés peuvent être désastreuses.
Depuis mars 2020, les démissions, burn-out, arrêts maladie ont beaucoup augmenté, sur fond de perte de sens au travail. « En mars 2020, le télétravail s’est mis en place en catastrophe dans un certain nombre d’entreprises et les salariés se sont adaptés. Mais au bout de quelques mois seulement, un certain nombre d’entre eux ont demandé à revenir sur leur lieu de travail. A la maison, ils travaillaient plus longtemps, souffraient de ne plus avoir de temps d’échange avec leurs collègues et se sentaient isolés », constate le Dr Marie-Anne Gautier, médecin du travail et experte des risques physiques et psychosociaux à l’INRS. Certes, le nombres de journées télétravaillées a tendance à se réduire ces derniers mois (la majorité des salariés ne télétravaillent plus que 2 jours/semaine selon une enquête Dares de mars 2022) mais les médecins du travail attestent des dégâts causés. « On ne peut plus nier la vulnérabilité des salariés en télétravail. C’est le rôle du médecin du travail de la repérer et de s’en occuper », ajoute le Dr Gautier.

 

Comment repérer un télétravailleur en souffrance ?
 

Certains signes avant-coureurs sont à rechercher, mais ils sont parfois ténus et relèvent essentiellement des déclarations du salariés, ce qui rend le dépistage complexe : fatigue et nervosité du salarié qui déclare trop travailler et ne plus réussir à séparer vie pro et vie perso ; comportements violents ou conflits répétés avec ses collègues et/ou ses managers ; retards inhabituels dans son travail et les plannings prévus ; travail et/ou réponses aux mails la nuit au cours d’insomnies, etc…. Ces difficultés peuvent aussi entraîner un retrait du salarié, se manifestant par de l’absentéisme, des difficultés de concentration, une diminution de la productivité.
Sur le plan physique, ces difficultés sont associées à une hausse de l’incidence des troubles cardiovasculaires, des troubles musculosquelettiques, des troubles anxiodépressifs, du burn-out, voire des conduites suicidaires dans les cas les plus dramatiques.
 

Quelle prise en charge ?

La première étape consiste à faire passer les messages-clés suivants aux salariés concernés : s’organiser à la maison comme si on était au bureau (avec des horaires et des temps de pause sans écran pour limiter la sédentarité et la fatigue visuelle) ; informer son manager lorsqu’on est en déplacement, en jour de repos, etc, organiser clairement ses tâches et prioriser ; demander des points réguliers à son manager sur l’avancement de son travail pour ne pas rester avec des objectifs flous et enfin, limiter le nombre de réunions à distance par jour (le fait de les enchaîner sans pause est une source de stress et de fatigue majeure).  
Pour ce qui concerne la prise en charge, la HAS a publié des recommandations en 2017 . Elles s’appliquent aux différentes manifestations du syndrome d’épuisement professionnel. En résumé, elle doit être coordonnée par le médecin traitant, qui peut éventuellement adresser le patient à un psychiatre en cas de troubles sévères. Il est recommandé au généraliste de prendre contact avec le médecin du travail pour avoir un éclairage sur l’environnement de travail habituel et d’éventuelles difficultés préexistantes. La prescription d’un arrêt de travail est le plus souvent nécessaire. Celle d’un traitement antidépresseur l’est uniquement dans la cadre de ses indications. Enfin, le traitement peut aussi comporter une prise en charge non médicamenteuse fondée sur des interventions psychothérapeutiques ou psychocorporelles.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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