Le dernier film de Bong Joon-Ho n'a pas usurpé sa réputation de chef-d'œuvre, pavé dans la mare d'un festival de Cannes réputé comme élitiste mais qui, en accordant la Palme d'Or à ce cinéaste incroyablement inventif et ne réalisant jamais le même film, ouvre à tout vent les fenêtres de son palais au grand public. Et le moins que l'on puisse dire c'est que ça déménage ! Imaginez le clonage hybride, l'enfant monstrueux de plusieurs génies du cinéma aujourd'hui décédés, rajoutez-y un bon grain de folie made in Seoul, et vous aurez Bong Joon-Ho.
Effectivement, il y a du Clouzot et du Hitchcock chez Bong, dans la manière de mettre la mise en scène totalement au service de son histoire, et parfois même l'inverse. Cette maison d'architecte, la façon dont la caméra la possède pour nous la faire connaître dans les moindres recoins, telle un personnage à part entière, n'est pas sans rappeler le manoi de Norman Bates ou l'Overlook Hotel dans Shining. Mais on retrouve aussi cet art consommé du suspense et la façon dont le no spoil a fait office d'argument publicitaire, comme pour Les Diaboliques et Psycho en leur temps. Le film est un authentique divertissement, souvent jouissif, dont le scénario semble par moments partir dans tous les sens mais dont chaque élément trouvera au final sa place et sa justification.
Mais Parasite est aussi, et avant tout, une dénonciation féroce des inégalités sociales qui minent les peuples à la prospérité mondialisée. Hitchcock s'allie à Bunuel, et Clouzot à Chabrol. L'un pour sa furie transgressive, l'autre pour le déroulé de sa Cérémonie. Ces hommages, qu'ils soient évidents ou inconscients, ont en commun de ne pas nuire à la linéarité de l'œuvre, long chemin vers la lutte finale. Le twist révélé n'empêche pas l'intrigue de progresser inexorablement, alternant entre emballements et arrêts sur image presque contemplatifs. Un jeu de massacre qui tient ses promesses...