Assises de la santé mentale : après le clap de fin, les psys sur leur faim ?

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Que retenir des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie ? Récap' des principales mesures annoncées.

Assises de la santé mentale : après le clap de fin, les psys sur leur faim ?

Le 27 et 28 septembre, se sont déroulées les Assises de la santé mentale. Le secteur de la psychiatrie avait des attentes concrètes de cet espace de débat promis par le Président et qui devait initialement se dérouler au mois de juin. Finis les mots, place aux actions… et aux moyens. « On espère que ce ne sera pas seulement des promesses », confiait à l'AFP Norbert Skurnik, président de l'Intersyndicale de défense de la psychiatrie publique (Idepp) en préambule. Premier constat, les Français vont mal. « L’impact de la pandémie sur la santé mentale des citoyens est inégalitaire. Elle frappe encore plus violemment celles et ceux qui sont les plus fragiles », rappelait à ce titre Michel Lejoyeux, Pr de psychiatrie et d'addictologie à l'Université de Paris et président de la commission nationale de la psychiatrie, durant les travaux (un impact mesuré par le Haut conseil de la Santé publique en juillet).

Mesure la plus médiatisée par le ministre de la Santé : le lancement d’un numéro national de prévention suicide. Gratuit, accessible 7 jours sur 7 et 24h/24 depuis tout le territoire national, il permettra, selon Olivier Véran, « d'apporter une réponse immédiate aux personnes en détresse psychique et à risque suicidaire ». Entré en fonctionnement aujourd'hui, ce nouveau service est assuré par des professionnels de soins spécifiquement formés pour assurer des missions d’écoute, d’évaluation, d’orientation et d’intervention, au sein de centres régionaux répondants situés dans des établissements de santé, et en lien notamment avec le SAMU. Coordonné par le CHU de Lille, ce numéro vient compléter, entre autres, le système de suivi des personnes ayant fait une tentative de suicide VigilanS, créé en 2015 dans les Hauts-de-France. « Le but, c'est que chaque personne qui a dans l'idée de se suicider puisse joindre ce numéro pour avoir des recours, mais aussi des proches, des professionnels. Cela peut être le médecin généraliste, un enseignant, ou même un entraîneur de foot qui remarque qu'un de ses gars ne va pas bien. L'idée est de proposer des ressources à tout un chacun qui se poserait des questions, pour lui ou pour autrui », expliquait le coordinateur national du projet, le Pr Pierre Thomas (chef du pôle de psychiatrie du CHU de Lille), au micro de France Bleu.

« La grande différence par rapport aux lignes d'écoute existantes en prévention du suicide, c'est que celle-ci est professionnelle alors que la plupart sont bénévoles et qu'elle a davantage une logique d'intervention et d'action, notamment dans le secours grâce à une collaboration très étroite avec le Samu », ajoutait Charles-Edouard Notredame, psychiatre et coordinateur-adjoint du projet à France Info.

Pour faire face aux délais d'attente beaucoup trop longs (pouvant dépasser 18 mois dans certains cas), le chef de l'État a annoncé la création de 800 postes dans les centres médico-psychologiques (CMP) dont la moitié en psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent d'ici 2022. Créations de postes aussi pour booster la formation, avec 12 enseignants chercheurs qui seront recrutés entre 2022 et 2025. Encore faut-il que tous ces postes soient pourvus... Et on le sait, la psychiatrie peine à recruter ces dernières années. 

L'internat va également être remanié. Pour Olivier Véran, « la psychiatrie, c’est une vocation. Se destiner à prendre en charge la santé mentale, c’est une véritable vocation ». Un métier que le ministre qualifie de difficile, et exercé avec un manque de moyens. Parmi les mesures proposées : une augmentation du nombre d'étudiants en formation et une extension de l'internat en psychiatrie, qui passe de 4 à 5 ans. 

Enfin, Emmanuel Macron a confirmé qu’à partir de 2022, les consultations chez les psychologues libéraux seront remboursées pour toute la population, sur prescription médicale. Cette mesure interviendra « dans le cadre d'un forfait de consultations qui pourra être renouvelé si la prescription médicale le propose. » Le montant de la première consultation sera fixé à 40 euros, puis 30 euros pour les suivantes. Cette mesure était attendue, notamment après l’expérimentation des chèques psy (qui avaient fait grincer quelques dents à l’époque des annonces).

Parmi les autres objectifs énoncés par le président : installer une maison des adolescents dans chaque département et augmenter les efforts sur les politiques de prévention et de développement des accueils familiaux thérapeutiques sur un délai de 3 ans.

Pour la fédération des hôpitaux de France (FHF), ces annonces constituent « un signal fort aux acteurs du secteur, en élevant la psychiatrie au rang de priorité, avec des mesures concrètes ». « Nous sommes très heureux de voir que certaines de nos revendications de longues dates ont été entendues, et surtout que des actions sont mises en place pour les combler. C’est notamment le cas du décret sur la réforme du financement de la psychiatrie qui est une impérieuse nécessité pour maintenir à flot le navire de la psychiatrie publique », déclarait son président, Frédéric Valletoux.

Les psychologues dans la rue

L’oreille a été remplacée par la bouche. Les psychologues ont profité des Assises pour faire entendre leur voix un peu partout en France. Ce 28 septembre était en effet une journée de grève nationale. La profession a dénoncé une surcharge de la demande avec en parallèle des conditions de travail qui ne cessent de se dégrader. Mesures gouvernementales en travers de la gorge, ils sont descendus dans la rue un peu dans toute la France. Parmi leurs revendications, une revalorisation salariale, le remboursement des consultations en libéral, mais sans passer par la case prescription médicale d’un généraliste. Les psychologues demandent également l'arrêt des deux mesures gouvernementales (chèques psy et dispositif écout'émoi).

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