Mon c.. sur l'incommode

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Critique de "Les Fantasmes", de David et Stéphane Foenkinos (sortie le 18 août 2021)

Mon c.. sur l'incommode

Sous prétexte d'explorer les facettes contemporaines du désir, un film qui se contente de décrire platement une succession de paraphilies comme autant de points de départ de saynètes plus gênantes les unes que les autres...

On n'osera même pas reprocher aux frères Foenkinos leur incompréhension originelle du mot fantasme, tant cette inculture psychologique - probablement feinte, après tout ils s'adressent au quidam français - est la moindre faute de goût de ce film à sketchs difficilement supportable. Et pourtant, cette méprise explique en partie l'aspect mensonger du projet. Car d'exploration du désir du couple, il n'est finalement presque pas question. Ou alors uniquement parce que la situation échevelée imaginée par le duo, qu'on imagine retourné en adolescence et riant à ses propres blagues, le nécessite. Dans la paraphilie, il n'est effectivement pas question de désir, mais de besoin compulsif. Les héros passent leur temps à être dans l'agir, et le seul enjeu est de mener leur scénario fétichiste jusqu'à l'extrême. Le problème est que cet extrême se résume soit à de la fausse provoc' - l'inénarrable gêne de voir deux actrices du calibre de Carole Bouquet et Monica Bellucci en lesbiennes (tellement moderne, tellement bankable) plongées dans une unité de soins palliatifs dans le but d'y prendre leur pied - soit à un pétard mouillé de banalité - l'histoire éculée du mec attiré par la soeur de sa meuf...

Il règne sur ce film à gros budget une facilité cumulée vraiment énervante. L'écriture tout d'abord: parmi une liste de paraphilies, on en choisit quelques unes bien salaces, on trousse vite fait un piètre scénario, seul le comique de situation compte, pour la consistance des personnages on repassera, d'ailleurs aucun n'existe réellement. La réalisation : paresseuse, émaillée de procédés qui n'ont aucune justification cinématographique, à l'image de ce mauvais split-screen qui encombre le premier sketch. On en regretterait presque que le projet n'ait pas été théâtral: on eût au moins pu espérer que le texte offre à la mise en scène quelque peu de liberté, et au spectateur un accès à l'imaginaire. Las, tout est montré, surligné, à la fois boursouflé et fade, comme ces décors sans charme - pour faire plus peuple? - qui semblent avoir été commandés sur un seul catalogue, faisant évoluer le film en véritable prison-témoin.

Il est probablement plus facile de rendre le pass sanitaire responsable de la désaffection des salles de cinéma que de s'interroger sur des hypothèses moins reluisantes pour le cinéma français. Ce n'est en tout cas pas en valorisant ainsi de telles réalisations, formatées et sans ambition, qu'il se réinventera face à cette crise.

 

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