Le transhumanisme, bientôt au cabinet ?

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Le transhumanisme, bientôt au cabinet ?

Durant l'université d’été qui s'est déroulée Castres du 5 au 7 juillet, médecins, patients et commerciaux ont beaucoup discuté. Les sujets ont été variés et passionnants. L’un d’entre eux, objet de tous les fantasmes, a attiré l’attention de la rédaction : le transhumanisme. 
 

Ce mardi après-midi, dans le grand amphithéâtre de l’école d’ingénieurs ISIS à Castres, les bancs sont presque pleins. Et pour cause, le thème de la table ronde du jour, organisée dans le cadre de l'Université d'été de la e-santé, porte sur le transhumanisme. Sujet de choix, qui alimente les visions les plus ésotériques chez les patients. Et parfois aussi chez les praticiens.

La parole médicale

« Il y a une notion très importante à retenir, surtout dans le domaine de la neurologie, c’est que nous n’avons pas le droit de modifier la fonction de pensée d’un individu », précise, comme pour rassurer le public, le Pr François Berger, neuro-oncologue et directeur de Clinatec. Guérir l’humain par la technique, oui, mais le modifier sans bonne raison, ce n’est pas envisageable pour ce praticien. « Le transhumanisme nous vend un humain, sain, amélioré, un peu comme Steve Austin, l'homme qui valait trois milliards. Alors que ces technologies doivent être utilisées pour guérir une pathologie et non modifier un sujet non malade », précise-t-il.  

… contre celle de la philosophie

Et pourtant... « Le transhumanisme permet d’aller vers un humain augmenté, mais pourrait aussi contribuer à l’émergence d’une nouvelle espèce », annonce pour sa part Jean-Michel Besnier, professeur de philosophie et responsable scientifique du pôle de recherche « Santé connectée, Homme augmenté » à l’Institut des sciences de la communication du CNRS.

Il oppose au Pr Berger la définition que l’OMS a donnée de la santé en 1946 : « un état de complet bien-être physique, mental et social ». La santé n'est donc pas la disparition de la maladie, et la médecine n'est pas uniquement là pour guérir. CQFD. Il dessine alors un lien entre la médecine telle qu’il l’entend et l’amélioration de l’humain, susceptible de se transformer pour répondre à un besoin de bien-être.

Un besoin de bien-être auquel la médecine ne peut pas encore répondre, selon le Pr Berger. Et les projets ultra médiatisés tels que le Human Brain Project ou le ciseau moléculaire Crispr-Cas9, permettant de remplacer peu ou prou n'importe quelle séquence ADN par une autre alimentent, selon lui, ces chimères.  

La parole aux juristes

Et finalement, au-delà de la philosophie ou de la médecine, c'est la question juridique qui se pose. François Vialla, directeur du Centre européen d'études et de recherche droit & santé de Montpellier, interroge sur la définition pénale de « l’humain ». « En droit, on définit la personne dans ce qu’elle a d’unique », explique-t-il. « On s’interroge donc sur la définition de l’humain, alors que le transhumanisme, suggère des modifications du corps qui tendraient à nous rendre tous plus semblables les uns aux autres que nous ne l’avons jamais été », ajoute-t-il, inquiet des potentielles dérives eugénistes que le transhumanisme pourrait entrainer.

Un aspect souvent mis de côté, mais qui devrait très prochainement devenir un des points-clés dans la définition du transhumanisme. 

 

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