Entre l’état et les mutuelles c’est la guerre sur la hausse des cotisations

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Pointées du doigt chaque année pour leurs hausses de tarifs, les mutuelles se préparent à une passe d'armes plus rude qu'à l'accoutumée cet automne, face à un gouvernement qui les appelle à la "modération" en pleine flambée des prix.

Entre l’état et les mutuelles c’est la guerre sur la hausse des cotisations

© IStock 

La pression monte déjà. Attendu le 19 septembre à Bercy, avec d'autres représentants du secteur, Eric Chenut affûte ses arguments. "Personne ne s'amuse à augmenter les cotisations de gaieté de coeur", affirme le président de la Mutualité française, qui entend tenir le même discours au ministre de l'Economie, Bruno Le Maire.

Mais l'exécutif a l'oeil rivé sur l'inflation, qui culmine toujours à près de 6% sur un an, malgré des aides massives sur l'énergie et les carburants. D'où les demandes insistantes de "modération tarifaire" adressées aux banques et aux assureurs depuis le printemps.

Réunis cette semaine en congrès à Marseille, les dirigeants des plus grandes mutuelles font valoir leur différence avec le monde de la finance.

"Le gouvernement aimerait que tout le monde contribue à préserver le pouvoir d'achat des Français. Sauf qu'on n'est pas l'Etat, on ne peut pas faire de déficit", rétorque Matthias Savignac, patron de la MGEN, un mastodonte du secteur à but non lucratif.

Les tarifs pour 2023, qui seront connus d'ici quelques semaines, dépendront de toute façon du budget de la Sécu dévoilé fin septembre ou début octobre. L'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) pourrait ainsi s'établir à 3,5%, selon Les Echos - une information non confirmée par le ministère de la Santé.

Quel que soit le chiffre définitif, "un gel des tarifs ne serait pas raisonnable", estime le même responsable, jugeant "un peu fallacieux que l'Etat reconnaisse une dérive des coûts, mais nous dénie le droit d'en tenir compte".

"On peut prendre le truc dans tous les sens, si on ne change aucun paramètre, les dépenses de santé continueront à augmenter"

En outre les mutualistes s'inquiètent d'être mis à contribution pour réduire le déficit de la branche maladie, plombée par le Covid et le Ségur de la santé.

"On entend des rumeurs de transferts de charges de la Sécu vers les complémentaires", glisse un ancien cadre de la Mutualité, alléguant de "bonnes vieilles méthodes à la papa".

Dans ces conditions, "c'est sûr qu'on ne sera pas en-deçà de l'Ondam", confirme une dirigeante d'un autre poids lourd du secteur.

"On n'est que le thermomètre, dans l'histoire. Ce n'est pas nous qui donnons de la fièvre", justifie-t-elle, un peu dépitée qu'"une partie de la population et des décideurs nous considèrent comme un problème plus que comme une solution", sans voir ce qu'elle estime être les vrais enjeux.

Avec des assurés toujours plus vieux, toujours plus de malades chroniques et seulement 2% des ressources affectées à la prévention, "on peut prendre le truc dans tous les sens, si on ne change aucun paramètre, les dépenses de santé continueront à augmenter", explique-t-elle.

La Mutualité renvoie d'ailleurs la balle à Bercy, en dénonçant le niveau des taxes sur les complémentaires santé. Une fiscalité "bien plus lourde que dans bon nombre de pays européens et qui grève le pouvoir d'achat de nos concitoyens", pointe M. Chenut, précisant que ces prélèvements représentent "plus de deux mois de cotisations".

"Ces taxes ont été multipliées par huit en vingt ans et c'est passé presque comme une évidence", glisse-t-il. Reprenant une formule récente d'Emmanuel Macron, il se prend tout de même à espérer : "Si c'est la fin des évidences, peut-être que c'est un sujet à remettre sur le tapis".

Avec AFP

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