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Le secteur de l’imagerie médicale entre à son tour dans la contestation du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2026. Après la signature d’un protocole imagerie entre la CNAM et les syndicats, la Fédération Nationale des Médecins Radiologues (FNMR) dénonce une « décision brutale, économiquement dangereuse et médicalement irresponsable ». Elle appelle à une grève nationale des cabinets de radiologie le lundi 10 novembre 2025, ainsi qu’à un recours officiel contre le protocole imagerie du 16 octobre.
Les économies demandées auront un effet sur le quotidien des patients
Les nouvelles baisses de tarifs d’imagerie, décidées « unilatéralement » par la CNAM, s’inscrivent dans la politique d’économies voulue par le PLFSS 2026. Selon la FNMR, ces réductions vont « frapper un secteur déjà fragilisé, essentiel au diagnostic et au dépistage, menacé de fermetures de cabinets ». Elles devraient, selon la fédération, avoir des effets directs sur le quotidien des patients : allongement des délais d’accès aux examens (IRM, scanner, échographie, mammographie), fermetures de structures en zones rurales, ralentissement de l’innovation technologique et fragilisation des dépistages de masse, notamment pour le cancer du sein.
« Ces décisions du PLFSS 2026 et du protocole imagerie privent les radiologues des marges de manœuvre nécessaires pour continuer à assurer des soins de qualité aux patients. Cette décision est à la fois économiquement absurde et médicalement irresponsable. Les patients vont en être les victimes », déclare Jean-Philippe Masson, président de la FNMR.
Les radiologues ont déjà subi 1,5 milliard d'euros de baisses tarifaires en 10 ans
Les radiologues rappellent qu’ils ont déjà subi « plus de 1,5 milliard d’euros de baisses tarifaires » en dix ans, tout en supportant « l’explosion des coûts » liés à l’énergie, à la maintenance et aux salaires. « Aujourd’hui, avec une marge brute inférieure à 15 %, de nombreux cabinets sont considérés “à risque” par les banques : cela bloque les crédits et freine le renouvellement des équipements, essentiels à la qualité des soins et à la sécurité », souligne la FNMR. Le secteur, qui réalise près de 80 millions d’actes par an, se dit désormais au bord de la rupture. Pour Jean-Philippe Masson, « les radiologues ont déjà trop donné ».
Du côté de l’exécutif, le PLFSS 2026 vise explicitement à encadrer ce qu’il qualifie de « rentes » dans certaines spécialités à forte rentabilité, dont la radiologie libérale. L’article 24 du texte donne au directeur de l’Uncam le pouvoir de fixer unilatéralement les montants des forfaits techniques d’imagerie en coupe, de médecine nucléaire et de radiothérapie. Selon les documents préparatoires au PLFSS, cette mesure permettrait 350 millions d’euros d’économies dès 2026.
D'autres pistes comme la pertinence des soins
Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) publié à l’été 2025 soulignait déjà que « les sociétés d’imagerie affichent des marges élevées » et que « le forfait technique en ville pour les scanners et IRM représente un coût pour l’Assurance maladie d’environ 1,4 milliard d’euros ». Ces constats ont conforté l’Assurance maladie dans sa volonté de revoir à la baisse les forfaits de fonctionnement des équipements lourds.
Au-delà de l’opposition syndicale, la question centrale demeure : comment maintenir l’équilibre entre maîtrise des dépenses publiques et maintien d’une offre d’imagerie accessible, de qualité et technologiquement performante ?
Les professionnels de l’imagerie médico-libérale mettent en avant des pistes : plans de pertinence des soins, réduction des examens jugés inutiles (« pas d’imagerie en première intention pour les lombalgies communes », « usage raisonné des radiographies thoraciques ou abdominales »), développement de l’IA, radiologie interventionnelle… Ces mesures permettraient, selon eux, « jusqu’à 300 millions d’euros d’économies sur 3 ans sans dégrader l’accès ni la qualité des soins ».
Face à cette politique jugée « injustifiable », les radiologues entendent durcir le ton. Outre la grève du 10 novembre, la FNMR annonce « l’extension de la grève de la permanence des soins en établissement (PDSES) à toutes les urgences, y compris la journée ». Un recours officiel contre le protocole imagerie CNAM est également en cours de dépôt.
« Nous demandons une révision immédiate de ces décisions pour éviter que les patients ne soient victimes d’une politique comptable court-termiste », conclut Jean-Philippe Masson.