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Lundi 24 février, lors du jugement, le procureur Benoît Bernard a souhaité rendre hommage à la médecin généraliste devant le tribunal correctionnel de Bordeaux : « l’intervention [de la soignante, ndlr] a permis d’éviter que la victime tombe dans une situation encore plus sombre, voire funeste. »
L’accusé est décrit par Sud-Ouest comme « addict à l’alcool, sans emploi ni logement stable. » Son ex-compagne, elle, est présentée comme « fragile et sous tutelle. »
C’est en décembre dernier que la femme présente des premières traces de coups. Ses proches la questionnent, elle prétexte une mauvaise chute. Plus tard, c’est sa médecin généraliste qui notifie des bleus sur les jambes, genoux et le ventre. Encore une fois, elle évoque une chute.
Le 13 février dernier, elle retourne consulter la généraliste. Cette fois, la femme a le visage tuméfié.
La professionnelle de santé parvient à la faire parler : son compagnon la bat, mais elle refuse de le dénoncer. Consciente de la gravité de la situation, la médecin adresse un signalement au procureur.
L’enquête révèlera « une forme d’emprise », rapporte Sud-Ouest. Mais pas que, des témoins donnent des informations complémentaires : « Il lui prend de l’argent, l’insulte », « Elle a peur de lui, mais ne veut pas qu’il parte. »
L’avocate de la partie civile ajoute, lors de l’audience, que la victime « souffre de problèmes neurocognitifs. Enfant, elle a subi des violences sexuelles. Tout cela fait qu’elle a un rapport biaisé aux hommes, une grande peur d’être seule, du mal à verbaliser. »
L’accusé, de son côté, reconnait quelques coups. Mais il affirme que s’il tape, c’est pour se défendre des menaces de sa conjointe. L’homme a déjà été condamné à deux reprise par le passé pour violences conjugales sur une autre femme, elle aussi sous tutelle.
À l’issue de l’audience, le tribunal l’a condamné à 30 mois de prison ferme avec incarcération immédiate.
À quel moment un médecin peut-il lever le secret médical ?
Comment réagir face à une potentielle victime de violences conjugales ? Pour vous aider, la HAS a élaboré un guide pratique mettant en exergue que pour lutter efficacement contre les violences conjugales, les professionnels de santé doivent s’impliquer activement.
Cela commence par afficher des informations dans la salle d’attente et questionner systématiquement les patientes, même sans signe apparent.
Les violences, qu'elles soient psychologiques, verbales, physiques, sexuelles ou économiques, touchent tous les âges et tous les milieux et évoluent souvent par cycles, s’intensifiant avec le temps.
Il est crucial d’adopter une attitude empathique, de déculpabiliser la victime et de considérer aussi l’impact sur les enfants exposés, car cela constitue une forme de maltraitance.
En cas de danger, des mesures de protection doivent être mises en place, accompagnées d’un certificat médical ou d’une attestation pouvant soutenir les démarches judiciaires.
Le signalement au procureur de la République se fait avec l’accord de la victime, sauf si elle est mineure ou vulnérable. Enfin, informer sur le droit de déposer plainte et orienter vers les structures d’aide sont essentiels, tout comme s’appuyer sur un réseau multiprofessionnel pour un accompagnement global.
Pour rappel, la loi du 30 juillet 2020 indique que le médecin peut signaler au procureur de la République des violences conjugales si la vie de la victime majeure est en danger immédiat et qu'elle est sous l'emprise de l'auteur des faits, l'empêchant de se protéger. Il doit tenter d’obtenir l'accord de la victime, mais si cela est impossible, il doit l'informer du signalement effectué.