Siège de cristal

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Ciné week-end: Maryland, de A. Winocour (sortie le 30 septembre 2015)

Siège de cristal

Grâce à Augustine, son premier long métrage qui relatait le rapport trouble entre Charcot et l'une de ses patientes, on connaissait l'intérêt d'Alice Winocour pour la psychiatrie. On pressentait également un talent à venir, puisque l'audacieuse impétrante chassait sur les terres de Cronenberg et de sa Dangerous Method en osant surpasser le maître...

Après avoir défriché les débuts de la psychiatrie classique, il semble qu'elle ait voulu embrasser, toujours sous l'angle de la pathologie, le monde actuel dans toute sa modernité. Substituant un syndrome emblématique de son époque - l'état de stress post-traumatique - à un autre - la conversion hystérique. Là où l'une naissait du fantasme refoulé et de la frustration engendrée par une société corsetée, l'autre est la résultante d'une confrontation à l'horreur du réel. Virage à 180 degrés donc, entre l'atmosphère toute en ambiguïté de la Salpêtrière et l'ambiance bling-bling d'une somptueuse villa de la Côte. Mais virage, hélas, totalement raté.  

Que cherche donc à nous dire la réalisatrice au travers de ce film sans but et sans intérêt? Car au-delà de son scénario honteusement bâclé, de ses dialogues cherchant désespérément à combler le vide entre deux scènes-clé, de sa musique arty mais surtout encombrante et de sa direction d'acteurs inexistante (Diane Kruger et surtout Matthias Schoenaerts sont tout bonnement mauvais...), le vrai problème du film repose sur son absence de message. Et la force des idées qui jaillissent parfois au détour de l'éprouvante narration - la visite de Vincent dans un service de traumatisés aux corps mutilés, ou encore le siège progressif et étouffant d'une villa de conte de fées par des intrus qui, des jet-setteurs vulgaires aux tueurs cagoulés, semblent liés par une même violence - n'arrive jamais à se maintenir au-delà d'une séquence.

Incapable de faire évoluer la paranoïa latente à la Homeland de Vincent vers autre chose qu'une classique histoire de complot politico-financier, et évacuant de façon surprenante la question du désir entre les deux personnages - tout en basant l'argument commercial du film sur le sex appeal des deux stars qui les incarnent - Alice Winocour s'enlise et perd totalement le contrôle de ce film d'une vacuité telle qu'on peut le qualifier de naufrage absolu.

Source:

Guillaume de la Chapelle

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