Savoir jouer collectif

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Le travail d’équipe fait partie de l’exercice médical. Pas toujours évident pourtant de composer avec tout le monde.

Savoir jouer collectif

Mésentente, dissensions ou simple manque de dialogue, en cabinet comme à l’hôpital, nous sommes régulièrement confrontés à des situations professionnelles sources de discorde. Et ce n’est pas sans conséquences... Aujourd’hui, selon une étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), on estime qu’en France, plus de la moitié des Evénements indésirables graves (EIG) pourraient être évités et seraient dus à un manque de communication au sein des équipes. Un problème qui nous concerne donc… tous !

La formation initiale, ce cheminement solitaire

Première année et goulet d’étranglement du numerus clausus, externat et stress des classements ECN, internat et course aux stages… les études médicales ne manquent pas de situations d’affrontement. Difficile ensuite de demander aux médecins de travailler main dans la main. Un problème que pointait la Haute autorité de santé (HAS) dans son rapport de 2012 en alignant des chiffres culpabilisants : 20 % des erreurs faites par un être humain ne sont jamais corrigées, par exemple.

Alors, oui, c’est un fait, les praticiens ne sont pas les meilleurs pour jouer collectif et rien, a priori, n’est prévu pour aider le système à changer. Frédéric Colomb, chef de l’équipe urologie de l’hôpital de Grasse, témoigne : « Je souhaitais faire prendre conscience à toute la chaîne que la qualité de nos prises en charge était dépendante de chacun. J’ai donc proposé à mon directeur général d’organiser une journée de team-building pour favoriser les connexions et améliorer les liens entre nous. » La réponse a été sans appel : « Pour quoi faire ? ». L’exemple de Frédéric n’est malheureusement pas unique et tout à fait éloquent.

Le groupe, entité à part entière

La formule « Ne néglige pas ton collègue » est en substance ce qu’encourage la HAS via son Programme d'amélioration continue du travail en équipe (Pacte). Elle incite en effet les établissements à former leurs équipes au « travailler ensemble ». Une philosophie de pensée en rupture. Il faut espérer que les esprits, mêmes les moins préparés, entendent ce discours pour permettre à la profession de sortir de son modèle « artisan d’exception », elle qui navigue à contre-courant, à l’ère de la qualité et de l’évaluation des pratiques.

« Les médecins et soignants sont exactement dans la même situation que les pilotes il y a 40 ans. Ils ne se parlent pas. Si, en aéronautique, on était resté au même niveau de team-training que dans les hôpitaux actuellement, les compagnies aériennes déploreraient entre 1 et 1,5 accident par semaine ». Le discours est cassant mais il est clair et sans ambiguïté. C’est Pierre-Antoine Watrelot, pilote et formateur au sein du cabinet Branchet, assureur spécialisé dans la responsabilité civile professionnelle des praticiens de plateaux techniques lourds, qui affirme son point de vue.

Le cabinet Branchet sollicite en effet ce pilote pour proposer une formation de medical team training d’un genre plutôt révolutionnaire, qui s’attache à réaliser une sorte de team-building autour de l’activité opératoire. Ce concept de formation médicale est justement calqué sur la formation aéronautique. Analyse de situations, discussions et amélioration du travail en groupe associant tous les soignants d’un bloc, sont partagés dans une ambiance de travail proche des circonstances réelles. Pour permettre d’ailleurs d’en faciliter la pratique, le centre de formation et de simulation ambulant, l’Asspro Truck, sillonne les cliniques et les hôpitaux de France à la rencontre des équipes. On aurait tort de s’en priver.

Article proposé en partenariat avec le programme Branchet on the road

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Le rôle du facteur humain, pas anodin

En 2014 la Joint Commission, ONG américaine, a estimé que le facteur humain était responsable de 72 % des 764 EIG qu’elle a analysés, et que la communication entre les équipes était en cause dans 89 % des cas.

En mai 2015, la HAS estimait lors d'une conférence de presse sur la sécurité du patient que le travail d’équipe était responsable de 27 % des EIG au sein des établissements hospitaliers privés et publics (soit la part la plus élevée). 

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