Rentrée scolaire : les recommandations contradictoires des sociétés savantes

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À l’approche de la rentrée scolaire, la Société française de pédiatrie a fait part de ses propositions pour limiter la propagation de l’épidémie. Des propositions très éloignées de celles de l'American Academy of Pediatrics, notamment concernant le port du masque chez les enfants.

Rentrée scolaire : les recommandations contradictoires des sociétés savantes

Quelles mesures de précaution doit-on prendre à l’école pour limiter la propagation de l’épidémie ? Difficile de séparer le bon grain de l'ivraie car les recommandations des sociétés savantes divergent. Datées du 27 août dernier, les dernières prises de position de la Société française de pédiatrie (SFP) laissent peu de place au doute.
 
Selon elle, il y a aujourd’hui « consensus » sur le fait que « les enfants, et en particulier ceux de moins de 10 ans, ne contribuent pas significativement à la transmission de COVID19 ». Pour en arriver à ces conclusions, la SFP se base sur les données de la littérature scientifique. Et ajoute que les transmissions entre enfants, ou d’enfants à adultes, « sont très peu fréquentes ». Mais aussi que « c’est l’adulte qui représente le transmetteur le plus fréquent de cette infection ».
 
La société savante estime également qu’il est très probable que l’enfant exposé à un cas contaminant s’infecte moins qu’un adulte car les différentes enquêtes rapportées « montrent un taux d’infection très inférieur chez les enfants, comparativement à celui observé chez les adultes ». Par ailleurs, lorsqu’ils s’infectent, les enfants sont souvent asymptomatiques, selon la SFP qui ajoute que « les infections pédiatriques qui nécessitent une hospitalisation sont rares, représentant 1% de l’ensemble des hospitalisations liées à COVID19 ».

Port du masque pour les adultes, lycéens et collégiens

Ce sont donc pour toutes ces raisons que la SFP propose une gestion « pragmatique » des infections Covid-19 en milieu scolaire « n’imposant pas aux enfants une répétition de tests de dépistage, sans intérêt pour le contrôle épidémique ». Elle recommande donc le respect strict des mesures d’hygiène : lavage répété des mains pour tous, port du masque pour les adultes, lycéens et collégiens.
 
Autre proposition : « des indications ciblées de tests PCR, adaptées à la faible contribution de l’enfant dans la transmission de l’infection, et tenant compte de la nature des symptômes et de la notion d’un contact avéré ». Et de préciser que la sélection des indications est notamment « cruciale pour les enfants de moins de 6 ans, qui ont par ailleurs de nombreux symptômes liés à d’autres infections que COVID19 ».
 
Pour le Dr Laurent Fignon (le médecin, pas le cycliste, hein), signataire d'une tribune d'un collectif de médecins sur le sujet (lire encadré ci-dessous), les positions des différentes sociétés de pédiatrie deviennent de plus en plus difficiles à cerner. Il fait allusion à celles de la SFP qui va dans le même sens qu'une étude du Pr Robert Cohen, président du groupe de pathologie infectieuse pédiatrique de la SFP. Mais ces positions entrent en contradiction avec celle de l'American Academy of Pediatrics (AAP). 

L’étude du Pr Robert Cohen fait la conclusion suivante : « Pour les enfants, du fait de leur moindre contagiosité, la distanciation à l’intérieur de la classe et pendant les récréations peut être moins rigoureuse. Par contre, il faut renforcer l’hygiène des mains, mesure souvent défaillante dans nos écoles, renforcer l’hygiène des objets et des surfaces et éviter que les différentes classes ne se rassemblent à la cantine, lors des récréations, à l’arrivée et à la sortie des écoles. » Et ajoute que le port du masque par les élèves, dans les écoles maternelles et élémentaires, semble « inutile et probablement contre-productif pour des enfants sans pathologie grave sous-jacente ».
 
Traduction un brin ironique de Laurent Fignon ? « Les gamins ne sont pas contaminés par les gouttelettes et micro gouttelettes qu’ils respirent mais par ces mêmes gouttelettes qui vont se déposer sur leur crayon qu’ils vont toucher avec leur doigts, doigts qu’ils vont se mettre dans le nez ou la bouche. »

Or, pendant ce temps-là, de l’autre côté de l’Atlantique, l'American Academy of Pediatrics (AAP) considère que « les enfants de 2 ans et plus ont démontré qu'ils pouvaient acquérir des compétences de base en matière de contrôle des infections (comme le lavage des mains et la distance physique), y compris le port d'un masque facial en tissu », rappelle Laurent Fignon.
 
Et la société savante d’ajouter que, en plus de protéger l'enfant, « l'utilisation de revêtements faciaux en tissu réduit considérablement la propagation du syndrome respiratoire aigu sévère-coronavirus 2 », que cela soit dans les écoles ou à la maison.
 
Des recommandations qui revêtent une importance particulière à l’heure où les dernières données compilées par l'American Academy of Pediatrics montrent que « les hospitalisations et les décès dus au coronavirus ont augmenté plus rapidement chez les enfants et les adolescents que chez le grand public », conclut Laurent Fignon. 

 

Les propositions d'un collectif  de médecins
Selon une tribune d’un collectif de médecins publiée dans Le Parisien, le protocole prévu pour la rentrée du 1er septembre ne protège ni les personnels ni les élèves et leurs familles, et est insuffisant pour ralentir l'augmentation actuelle du nombre de nouveaux cas de Covid-19. Ils recommandent donc : 1. De recommander le port du masque en lieu clos pour tous les élèves de plus de 6 ans et de leur distribuer des masques, comme le font la Suisse, la Grèce et l'Italie. 2. D'appliquer les mesures d'aération préconisées pour les lieux clos professionnels, en s'aidant notamment d'appareils de mesure de qualité de l'air ; et d'imposer des règles plus conformes aux données scientifiques. 3. De mettre en place au plus vite des procédures dédiées dans les zones de forte circulation virale, afin d'y limiter la propagation du virus et de pouvoir organiser des quarantaines ciblées. 4. De préciser la conduite à tenir lorsqu'un enfant ou un adulte est testé positif ou a été en contact avec un cas positif ; et d'instaurer un système réactif et transparent de remontées des données.

 

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