Nicloux ni fils

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Ciné week-end : Valley of Love, de G. Nicloux (sortie le 17 juin 2015)

Nicloux ni fils

Guillaume Nicloux est un réalisateur inclassable, toujours déroutant. A peine commence-t-il à creuser un sillon, voire ébaucher une oeuvre, qu'il prend bien soin de bifurquer radicalement pour s'aventurer vers d'autres sphères. Il nous avait bluffé avec Cette Femme-là, offrant un immense rôle à Josiane Balasko, et plutôt déçu depuis. 

Son nouveau film est probablement le plus audacieux, tant il cherche à s'imposer des défis et repousser ses propres limites, tel ceux qui s'aventurent dans la fournaise infinie qu'est la Vallée de la Mort. On y retrouve quelques références à ses films précédents, que ce soit par son thème - le deuil d'un enfant - ou par sa volonté d'emmener sur sa route des stars pour espérer les transcender. Avec des monstres sacrés comme Huppert et Depardieu, il est en effet servi !

Valley of Love est une quête, un pari sur la mort, dans lequel Nicloux, tel le fils suicidé de ce couple d'acteurs vieillissants qui n'ont pas su l'aimer, élabore une charade, un jeu de pistes à partir d'une somme d'éléments improbables et dissonnants pour tenter d'accéder à un niveau magique voire mystique. Il ne dépasse cependant pas le stade de l'alchimie singulière, ce qui n'est déjà pas si mal.

Plongés dans la chaleur étouffante des States, Depardieu et Huppert exposent leurs corps vieillissants et merveilleusement usés aux couleurs sursaturées de la pellicule. Mis à nu dans des situations souvent ridicules, ils se livrent sans vraiment composer et nous font pénétrer progressivement au coeur d'une intimité qui ne va pas de soi, qui se défend d'exister, mais qui devient évidente. En cela le film impose en douceur sa puissance, qui repose sur une certaine nostalgie. 

Cette ode au vieillissement est régulièrement perturbée par des moments d'onirisme appuyé ou de brèves ruptures de ton, qui rappellent le but premier du film: faire naître au milieu de l'improbable la limpidité du sentiment - ici l'amour filial. Usant de cris, de vomissements, de plaies et de stigmates, abusant de références lynchiennes bien trop appuyées, le film perd par moments de sa force mais jamais de son âme.

Source:

Guillaume de la Chapelle

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