Le choc des générations

Article Article

L’incompréhension entre générations ne date pas d’aujourd’hui, mais le fossé semble se creuser davantage.

Le choc des générations

Ce fossé s'observerait particulièrement avec les baby-boomers. Selon Caroll Allain, intellectuel et conférencier, les repères ne sont plus du tout les mêmes ! L'État, l'Église et la famille étaient l’apanage des baby-boomers. Les célébrités, les réseaux sociaux et les amis composent désormais le quotidien des générations suivantes.

Transposé dans le milieu professionnel, ce choc des cultures se manifeste dans l’écart entre les attentes des dirigeants et celles des jeunes médecins. Les premiers aspirent à recruter des médecins fidèles, performants, qui doivent se plier aux règles et consignes... Les seconds sont impatients, veulent arriver vite, ne pas être débordés par le travail, avoir plus de temps pour leur vie privée.

Ils ont besoin de compensation rapide en termes d’évolution de carrière, de prise de responsabilité et de rémunération. Selon une étude d’Hudson*, qui fait du conseil pour les entreprises, les générations peuvent être décrites ainsi :

LES BABY-BOOMERS, nés entre 1946 et 1964, ont des compétences avérées de leadership. Direction, décision, motivation et persuasion sont leurs mots-clés. Ils sont stratégiques, ouverts d’esprit et innovants.

LA GÉNÉRATION X, née entre 1965 et 1979, est plutôt tournée vers les autres, vers le changement. Ses membres sont confiants et dotés d’une réelle sensibilité culturelle. Cette génération équilibrerait les caractéristiques dominantes des autres générations.

LA GÉNÉRATION Y, née entre 1980 et 1994, est maître de l’abstrait et de la pensée conceptuelle. Elle est très ambitieuse et tournée elle aussi vers les autres. Cependant elle a un score significativement inférieur aux autres générations sur les traits de compétences traditionnelles en termes de leadership.

Liaison ou transition ?

Bref, la génération X ferait alors la transition sans que, pour autant, la génération Y ait, elle, le sentiment de faire la liaison... Si les « compétences traditionnelles » ne sont plus là, c’est bien que les repères ont changé. Parions sur un système moins hiérarchisé avec la démocratisation de l’accès à l’information et l’accès modifié à des compétences, avec un leadership à réinventer...

Pour Jean-Louis Terra, PUPH de psychiatrie et chef de service au centre hospitalier Le Vinatier, à Lyon, baby-boomer, il s’agit « d’un glissement progressif qui s’est accentué avec l’arrivée de nombreuses nouveautés. À commencer par les nouvelles technologies qui ont signé l’obsolescence de notre mode de pensée. Ce qui s’est passé il y 10 ans appartient à un passé lointain désormais. Les référentiels ne sont plus gés, ils évoluent en permanence. ».

En outre, cette évolution a permis l’amélioration de la médecine et de la qualité des soins. « Quand j’étais interne, on avait la responsabilité de plusieurs dizaines de patients ; maintenant, il y a 3 médecins pour un service de 25 patients. On ne considérait pas les soins de la même manière et on prenait beaucoup plus de risques, et souvent au détriment des malades. Il en résultait un sentiment d’être un peu à part. La vie à l’hôpital était la vie des médecins. Maintenant les médecins veulent vivre leur vie en dehors de l’hôpital ».

Cependant, la philosophie du soin s’est aussi transformée. « Avec les nouvelles lois pour les patients comme la démarche qualité, la médecine s’est industrialisée. Elle a perdu de son sacré. Il y a moins d’art pour plus de preuves. » Pour lui, la médecine s’est ainsi progressivement « désaffectivée ». Le médecin est de plus en plus considéré comme un prestataire de service. Et en tant que tel, il en veut les avantages et le confort, ainsi que la garantie d’une vie privée.

Quid de l’évolution pour les prochaines générations  « Les médecins doivent redevenir ers de leur travail. Il faut réapprendre à oser, à aller vers le nouveau, et surtout à savoir dire non !... Si on fait de son travail une œuvre, un art, on n’a plus à “ fidéliser”, on transmet ». 

*Etude Hudson, Le Choc des Générations, 2014. http://hudson.fr

 

Les gros dossiers

+ De gros dossiers