Dans l'industrie pharma, ca joue sérieusement

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Comme les autres, l'industrie pharmaceutique est en train de succomber à la simulation. La preuve ? Ses initiatives se multiplient comme des bactéries dans des domaines aussi variés que le recrutement, la formation technique du personnel ou le relationnel.

Dans l'industrie pharma, ca joue sérieusement

SERIOUS-GAMES POUR MÉDECINS
L'industrie du médicament n'est pas en retard dans l'utilisation des nouvelles technologies. Vincent Varlet, ancien smuriste, est le spécialiste du numérique des entreprises du médicament depuis 18 ans. Il a refondé le Lab e-Santé, think-tank créé en 2002.  « La simulation est utilisée dans l'industrie pharmaceutique de façon croissante. Les labos ont investi dans ces nouvelles technologies car les attentes des jeunes médecins évoluent : la présentation classique diapo + dîner n'intéresse plus. Pour valoriser l'image de marque et donner une bonne réputation au labo, c'est un créneau intéressant ».  Une des limites principales, c'est le coût. « Le budget formation de l'industrie du médicament  est déjà 4 à 6 fois plus important que ce qu'imposent  les obligations légales, donc l'évolution est progressive », explique Vincent Varlet.
Le relationnel est un aspect encore peu développé dans la simulation. La start-up Serious Factory a développé un logiciel, Virtual Training Suite™, qui permet de concevoir des programmes de formation « gamifiés ».

Après avoir créé SCA Life, un serious-game doté d’un moteur conversationnel, ils se sont attaqués au domaine… de la psychiatrie ! Son fondateur, William Peres, commente : « Notre plateforme de simulation nous a permis de créer récemment e-Schizophrenia, une application interactive qui met en scène deux patients schizophrènes dans des conditions de consultation, sur une dizaine d'années ». Financé par Janssen, ce serious-game a été pensé pour animer des séminaires professionnels réunissant des psychiatres et améliorer la prise en charge des patients.
Il existe un autre frein que l'argent au développement de serious-games destinés aux médecins. Pour développer un jeu où le praticien est dans des conditions réalistes avec un choix entre différents traitements disponibles, il faut déposer un dossier à l'ANSM – cher et compliqué – sans quoi le produit sera considéré comme une publicité détournée. Plutôt que cette démarche, les labos préfèrent ne pas concevoir directement de serious-games mais les développer sous la direction d'une société savante en les sponsorisant.

FORMER LES PROFESSIONNELS DU SECTEUR PHARMACEUTIQUE
La simu est également utilisée à visée interne. Les conditions de manipulation des médicaments sont très strictes, dans des pièces stériles : les « salles blanches ». Guillaume Ebelmann, président de WhiteQuest, a été sollicité par plusieurs dirigeants d'usines pharmaceutiques pour les aider à améliorer leurs outils de formation. « Il y a des normes à respecter, et pour cela, il faut développer des compétences pratiques. Mais le personnel ne peut pas s'entraîner dans les zones stériles et progresser par essais/erreurs pour limiter les risques avant d'aller sur le terrain ». Il a donc développé LabQuest, qui met le « joueur » dans différentes situations nouvelles permettant de vérifier sa compréhension réelle des bonnes pratiques de fabrication. L'analyse des résultats a montré que le personnel en poste depuis longtemps avait tendance à enregistrer de plus mauvais scores que les débutants. En effet, à force de répéter des gestes complexes sans vraiment comprendre pourquoi on les réalise, on en vient à prendre des libertés. « Ces erreurs sont à l’origine d’une perte de 1 % du chiffre d’affaires dans les usines pharmaceutiques, soit plusieurs millions, voire dizaines de millions d’euros par usine et par an », explique Guillaume Ebelmann. De quoi motiver les dirigeants à revoir la formation…

« GAMIFIER »  LE RECRUTEMENT
Le serious game, décidément plébiscité par les labos, a trouvé une nouvelle utilité : le recrutement.
Dans Pharma War, le joueur doit développer un traitement contre un virus extraterrestre en s'appuyant sur 25 différents métiers du médicament (chercheur en chimie, responsable de production, responsable de la pharmacovigilance…). « Cette présentation ludique et pédagogique a pour objectif de montrer de l'intérieur l'industrie pharmaceutique, victime de préjugés,  car le public la connaît mal » explique  Éric de Branche, directeur de  la communication du LEEM  (Les Entreprises du médicament). Ce jeu, de style rétrogaming, inspiré  des jeux d'arcades, s'adresse  à un public jeune (lycée, université).  Il a été testé par 10 200 internautes en 4 mois.

Ainsi, malgré la complexité demeurant encore en matière de développement, l’industrie pharma a bien compris les divers intérêts de la simu et… sait l’adapter à ses différents publics !

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