Construire un hôpital : tout le monde sur le chantier !

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Les médecins ont-ils leur mot à dire sur la construction de leur lieu de travail ?

Construire un hôpital : tout le monde sur le chantier !

On se lève un matin, on va au travail et soudain, pouf ! Un nouveau bâtiment est sorti de terre ! Tout beau tout neuf, vous ne l’aviez presque pas vu venir. Normal, personne ne vous avait dit qu’on construisait une aile toute neuve à votre hôpital. Enfin, personne, en êtes-vous sûr ?
 

Participer au projet architectural de son lieu de travail, cela semble logique. Après tout, les équipes médicales sont encore celles qui connaissent le mieux leur hôpital. Et pourtant, si le médecin intervient effectivement dans le processus de construction, c’est souvent à titre purement consultatif, ou via des intermédiaires.

Deux univers qui entrent rarement en collision

Le Pr Patrick Berquin, chef du pôle pédiatrie du CH Amiens-Picardie dont le chantier a débuté en 2004, peut en témoigner. « Nous avons très souvent eu des réunions avec une direction spécifique qui faisait l’interface entre le cabinet d’architecte et les médecins », se souvient-il. « Je regrette de ne pas avoir pu plus discuter de visu avec les architectes ».

« Les architectes ont accès aux médecins dans une optique de mise au point des plans », explique pour sa part Bruno Follin, architecte, associé du cabinet AIA et directeur adjoint en charge de la coordination des projets du groupe. Une consultation occasionnelle qui s’avère malgré tout indispensable pour « amener à des prises de position ou à des débats, et qui peuvent orienter le projet dans une autre direction », ajoute-t-il. L’interaction entre les deux corps de métiers reste cependant anecdotique, pourrait-on dire, sur l’ensemble du projet hospitalier.  

Alors les médecins sont-ils finalement peu sollicités ? Pas toujours. Malgré l’absence de dialogue direct avec les archis, le Pr Patrick Berquin avoue avoir eu la chance de participer activement au projet hospitalier dans son ensemble. « C’était une volonté de notre direction », précise-t-il. « Impliquer de jeunes médecins de l’époque (ndlr : en 2004) était important car ce sont eux qui allaient travailler dans l’hôpital à la fin des travaux. » 

Public-privé : pas le même combat

Dans le privé, en revanche, le son de cloche est bien différent. Bruno Follin explique que la compétition y est « plus sauvage » entre les cabinets d’architectes, et que la prise de contacts et les échanges avec le corps médical s’y font beaucoup plus tôt.

L’architecte l’avoue : « C’est l’extase de travailler directement avec les médecins. Le client médecin, qui est aussi l’utilisateur, permet des échanges plus efficients pour l’ouvrage en cours de réalisation. ». Plus d’émulation, plus de scénarisation : le projet devient de ce fait presque cinématographique : « nous allons jusqu’à l’utilisation du storyboard pour les aider à visualiser le projet », précise l’architecte. Un mode de conception peu conventionnel, mais qui convient à la fois aux médecins et aux architectes, et qui permet de donner naissance à des projets tels que le groupe hospitalier Saint-Joseph à Paris. 

Malheureusement, cette coopération n’est pas toujours à l’ordre du jour. Le CH de Marne-la-Vallée ferait presque office de cas d’école. Partenariat public-privé avec Eiffage, on aurait pu imaginer que sa construction emprunterait ce qu’il y a de bon à prendre dans les méthodes du privé. Hélas, elle n’a impliqué les médecins que dans les premières étapes.

Ancienne chef du pôle maternité et nouvelle présidente de la CME, le Dr Pascale Granier s'en souvient avec regret : « Nous n’avons pas vraiment eu l’occasion d’être associés aux étapes intermédiaires du projet. Quand nous avons visité l’hôpital, il était presque terminé ». Les équipes soignantes impliquées en début et fin de parcours ont ainsi découvert leur environnement de travail… le jour de l’inauguration.

 

Source:

Johana Hallmann

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