Vaccinodromes : l’épouvantail H1N1 ne fait plus peur

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Une note publiée le 6 janvier par le think tank Terra Nova bouscule les idées reçues : contrairement à ce qui a été dit et répété, l’expérience de la vaccination anti-H1N1 de 2009 plaiderait pour la mise en place de « vaccinodromes » contre le covid.

Vaccinodromes : l’épouvantail H1N1 ne fait plus peur

Les syndicats de médecins libéraux l’ont répété ad nauseam : en 2009, la mise en place de vaccinodromes lors de la campagne d’immunisation contre la grippe H1N1 a laissé de côté les soignants de ville, ce qui a conduit au fiasco. Ce mantra a fortement influencé l’avis de la Haute autorité de santé (HAS) concernant la vaccination anti-covid, publié en décembre dernier, qui affichait explicitement la nécessité de « tirer les enseignements » de 2009. Il a par ricochet façonné la stratégie du gouvernement, qui excluait initialement tout vaccinodrome, et reposait seulement sur la médecine de ville. Le hic, c’est que le rejet absolu de la vaccination collective relève d’une mauvaise lecture des événements. C’est du moins ce qu’avance le think tank Terra Nova dans une note publiée le 6 janvier dernier.

Le titre de ce document est on ne peut plus clair : Les leçons du H1N1 plaident pour des centres de vaccination collective. À l’appui de leur démonstration, les auteurs (le directeur du think tank Thierry Pech et sa coordinatrice santé Mélanie Heard) citent abondamment la commission d’enquête parlementaire sur la campagne de vaccination anti-H1N1, dont le rapport souligne notamment « l’impossibilité de faire reposer une campagne de vaccination pandémique exclusivement sur la médecine ambulatoire », et qui précise que cette dernière doit certes être sollicitée, mais « parallèlement à des centres de vaccination spécifiques ».

2009, 2021, même combat
La commission parlementaire énumère les caractéristiques de la vaccination anti-H1N1 qui plaidaient en faveur du choix de la vaccination collective : l’impératif de séparation des flux de malades des flux de personnes à vacciner, le conditionnement multidoses, la nécessité de respecter un ordre de priorité dans les populations à vacciner… autant de facteurs qui sont tout aussi valables pour la vaccination anti-covid, et qui sont renforcés par la nécessité de stocker le vaccin à de très basses températures, notent Thierry Pech et Mélanie Heard. Dans ces conditions, il n’est selon eux pas étonnant que le gouvernement ait début janvier été contraint de changer son fusil d’épaule pour inclure des centres de vaccination collective.
Reste que les représentants des médecins généralistes, eux, semblent peu convaincus par l’argumentation du think tank. « Les vaccinodromes, c’est bon pour la politique du chiffre, critique le Dr Jacques Battistoni, président de MG France. On ne vaccine que les gens qui sont déjà convaincus, et on n’atteint pas les cibles prioritaires : les personnes âgées et vulnérables, qui sortent aujourd’hui très peu de chez elles et qui n’iront donc pas faire la queue. Aujourd’hui, ce que les généralistes attendent, c’est d’avoir des doses pour vacciner leurs patients. »
Le Dr Luc Duquesnel, président des Généralistes-CSMF, préfère s’intéresser à la politique vaccinale du gouvernement telle qu’infléchie depuis début janvier. « Aujourd’hui, les libéraux font la preuve de leur réactivité en montrant des centres de vaccination, dans tous les départements, en lien avec les collectivités territoriales et les autorités sanitaires », se félicite-t-il. Alors, la stratégie mixte qui est en train de se mettre en place est-elle la bonne ? Réponse à la prochaine pandémie, quand on cherchera à tirer les enseignements de 2021…

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