Alcool dans les stades sportifs : le lobby alcoolier frappe à nouveau !

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72 députés de La République en Marche (LREM) viennent de déposer une proposition de loi « visant à faire de la France une nation sportive ». L’article 18 assouplit la loi Evin et permettrait une réintroduction de l'alcool dans les stades sportifs. Les spécialistes de l’addiction tirent la sonnette d'alarme et considèrent que ces députés se font le relais fidèle du lobby alcoolier.

Alcool dans les stades sportifs : le lobby alcoolier frappe à nouveau !

Le gouvernement a-t-il volontairement attendu l’été en espérant passer sous les radars médiatiques ? La question mérite d’être posée, puisqu’il a fallu attendre le 24 juillet pour que 72 députés de La République en Marche (LREM) déposent une proposition de loi « visant à faire de la France une nation sportive », s’est fait l’écho L’Équipe.
 
Le texte déposé comporte 18 articles et « cinq propositions phares » selon le quotidien sportif qui n'a pas mâché ses mots. Parmi elles, l'article 18 « vise à assouplir, de manière encadrée, l'application de la loi Evin dans les stades en étendant l'octroi d'autorisations temporaires de vente d'alcool aux sociétés sportives ».

En clair, ces 72 députés « ont appelé à en finir définitivement avec un pan majeur de la loi Evin et ainsi à introduire l'alcool au sein des compétitions sportives », déplore dans un communiqué daté du 6 août l’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (Anpaa).

Faire sauter un des derniers verrous de la loi Evin ?

Et d’ajouter : « Sous le prétexte du soutien au sport, ces députés se font le relais fidèle du lobby alcoolier qui, année après année, rogne progressivement la plus grande loi de santé publique dont la France se soit dotée. » Un lobby alcoolier déjà épinglé par l’Anpaa en avril dernier lors de la publication de son deuxième rapport d’observation sur les pratiques des lobbies de l’alcool.
 
Le rapport avait dévoilé la stratégie du lobby pour contrer toute tentative de mise en œuvre d’une politique de santé publique réellement efficace en matière de réduction du risque alcool en 2018. En d’autres termes, il expliquait comment les lobbyistes avaient gagné en 2018, comme nous vous l’expliquions dans cet article.
 
Cette nouvelle proposition de loi va également dans le sens des déclarations d’Emmanuel Macron qui annonçait en février 2018 qu’il n'y aurait pas « d'amendement pour durcir la loi Evin » restreignant la publicité pour les boissons alcooliques tant qu'il sera président.
 
Après avoir élargi les possibilités de communication publicitaire lors de la précédente mandature, le lobby parlementaire de l'alcool « repart à l'assaut en faisant sauter un des derniers verrous de la loi Evin qui interdit le sponsoring du sport par les cigarettiers et les alcooliers », regrette l’Anpaa.

Banalisation de la consommation chez les jeunes

L’association en profite pour rappeler que la consommation d'alcool est incompatible avec le sport « car la promotion de l'alcool auprès des jeunes via les compétitions sportives, vise à banaliser la consommation générale, et en premier lieu celles des jeunes qui constituent la majorité du public. C'est pourquoi la loi Evin a interdit le sponsoring sportif mais aussi culturel (concerts de rock par exemple) pour protéger la jeunesse ». En outre, en interdisant l’introduction de l’alcool dans les stades, la loi Evin prévient les violences qui sont directement corrélées à la consommation, rappelle l’Anpaa.
 
Et de conclure que cette offensive contre la loi Evin dans le sport était « prévisible » car « ce qui est en jeu, c'est le sponsoring de la Coupe du monde de rugby et des Jeux Olympiques à venir. Les intérêts et profits éventuels sont immenses pour les alcooliers, et c'est cela qui justifie aux yeux de ces parlementaires LREM un nouveau sacrifice de la loi Evin. »
 
Selon le Dr Bernard Basset, vice-président de l’Anppa, le sponsoring de ces deux évènements sportifs est « un marché colossal, ces députés sont motivés, mais pas par la santé publique, un dommage collateral… »

L’Anppa n’est pas la seule association à s’insurger. La plupart des spécialistes de l’addiction sont vent debout sur les réseaux sociaux. La Fédération française d'addictologie (FFA) a considéré sur Twitter que ce fameux article 18 « ne fera pas de la France « une grande nation sportive » comme ils l’ambitionnent ! Clownesque... »

Quant à la Fédération addiction, 1er réseau d'addictologie qui regroupe 205 associations, elle a rappelé que les politiques de santé publique devaient « faire primer la santé, même en cas d’enjeux financiers ».

Le président de la FFA, le Dr Amine Benyamina, s’est quant à lui amusé du hasard du calendrier. Car l’interdiction du tabac dans les parcs et sur les plages gagnerait du terrain, selon Le Figaro. Et, « pendant ce temps 72 députés songent à réintroduire l’alcool dans les stades ! Chercher l’erreur »...

Dans le même temps, le ministère de la Santé vient de se féliciter de la mise en place d’un fonds de lutte contre les addictions de 120 millions d’euros, destiné à la lutte contre les addictions au tabac, à l’alcool ou au cannabis. Il absorbe le fonds de lutte contre le tabagisme. Cherchez l’erreur…
 

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