Yves Lévy intérimaire à l’Inserm

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The Lancet fustige

Yves Lévy intérimaire à l’Inserm

Grand flou pour la nomination du futur président de l’Inserm. Yves Lévy assure l’intérim en attendant une nomination dont les détails sont obscurs. The Lancet s’en mêle, et condamne la recherche française.

Comment reconduire Yves Lévy à la tête de l’Inserm sans faire trop de bruit ? L’actuel PDG de l’institut de recherche semble partant pour un nouveau mandat – même s’il n’a jamais fait part publiquement de sa volonté de se présenter à sa propre succession –, ce qui soulève quelques questions. Malgré un décret écartant légalement la ministre de la Santé des décisions concernant l’Inserm, et laissant les décisions au ministère de la Recherche et au Premier ministre, les éventuels conflits d’intérêts sont à deux pas : Yves Lévy est le compagnon d’Agnès Buzyn.

Une situation délicate qui n’a pas échappé au Lancet. La revue scientifique a publié un édito le 12 juin intitulée « La France est de retour, mais les anciennes pratiques persistent au sein de l’Inserm ». Elle y critique l’opacité du processus de nomination du nouveau président de l’institut, renforcée par l’absence de nomination officielle au terme du mandat d’Yves Lévy, qui intervenait le 11 juin.

Yves Lévy fait de l’intérim

Mais pas de panique ! Il n’y aura pas de vacance du pouvoir. Le président adopte le statut précaire de beaucoup de ses chercheurs. Par arrêté du Premier ministre et de la ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation en date du 11 juin 2018, « M. Yves Lévy est chargé d’exercer par intérim les fonctions de président de l’Inserm. Il reçoit l’ensemble des attributions inhérentes à cette fonction ». Ouf !

Comment reconduire Yves Lévy ? En ne nommant personne à sa place, semble-t-il. Que se passe-t-il du côté du Gouvernement ? La date d’échéance était pourtant connue depuis longtemps, et huit personnes se sont portées candidates – Philippe Froguel et Jessica Zucman-Rossi sont les deux seuls à s’être fait connaître publiquement. Si nous étions cyniques, nous pourrions voir dans ce délai un acte volontaire du Gouvernement pour prolonger le président de l’Inserm. Mais ça n’est pas notre genre.

Smiley stupéfait

Philippe Froguel, très offensif depuis l’annonce du report des projets IHU, et qui avait annoncé sa candidature, semble cette fois sans voix.


Il avait conditionné sa campagne à la formation d’une commission de nomination « indépendante et sans conflit d’intérêt ». Pour l’instant, il ne peut pas se plaindre : ses membres ne sont pas encore connus. Les auditions des candidats sont néanmoins « toujours prévues le 21 juin », signale-t-il sur Twitter.

The Lancet épingle

Bien qu’Agnès Buzyn s’en défende régulièrement – encore ce dimanche dans le JDD –, le lien entre la ministre et le président de l’Inserm pose problème. Il ne passe pas non plus inaperçu, ni en France, ni à l’étranger.

« La réputation du milieu scientifique français a été endommagée par cet épisode, tant sur la scène nationale qu’internationale », peut-on ainsi lire dans l’édito du Lancet. « Macron a maintenant l’opportunité de réformer la culture de la recherche en France – et de signaler que certaines pratiques appartiennent au passé – en soutenant un processus de nomination ouvert et transparent et en encourageant la publication des noms des candidats et des membres du comité, et du contenu des délibérations ».

Le couple Buzyn-Lévy est peut-être tout à fait honnête sur le sujet, les craintes de conflits sont peut-être totalement infondées – soyons un peu naïfs. Mais quelles que soient leurs intentions et leur indépendance respective, les liens qui unissent ministère de la Santé et Inserm sont trop serrés pour qu’Agnès Buzyn et Yves Lévy puissent continuer à leurs postes respectifs. Ou, du moins, pour qu’ils continuent sans s’attirer la foudre des chercheurs français et, désormais, les critiques des étrangers.

Source:

Jonathan Herchkovitch

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