Urgences : 750 millions... de raisons de poursuivre la grève !

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Agnès Buzyn a présenté son pacte de refondation des urgences, assorti de 12 mesures chiffrées à 750 millions d’euros… Insuffisant pour Inter-Urgences qui poursuit la grève. Quant aux syndicats de médecins libéraux (SML, CSMF...), ils doutent de l’efficacité des mesures. Tout en exigeant plus de reconnaissance financière pour les médecins libéraux censés soutenir l’offre de soins non programmés.

Urgences : 750 millions... de raisons de poursuivre la grève !

Il ne vous aura pas échappé - sauf si vous avez passé les dernières 24 heures sur la planète Mars à la recherche de réseau Internet - qu’Agnès Buzyn avait présenté lundi 9 septembre son pacte de refondation des urgences. D’un montant total de 754 millions d'euros, l’enveloppe du plan financera 12 mesures. Objectifs du gouvernement : « inventer des organisations modernes », « soutenir les professionnels de santé », « améliorer les soins pour tous dans notre pays ».

Censée être l’une des mesures phare du plan : la mise en place d’ici l’été 2020 d’un service distant universel – ou SAS (Service d’accès aux soins) - pour obtenir à toute heure un conseil médical et paramédical ou prendre rendez-vous avec un médecin généraliste dans les 24 heures.

Figurent également dans le plan de refondation des urgences, les mesures suivantes :
- renforcer l’offre de consultations médicales sans rendez-vous en cabinet, maison et centre de santé
- donner à la médecine de ville les mêmes outils de prise en charge que les urgences
- offrir aux professionnels non médecins des compétences élargies pour prendre directement en charge les patients
- généraliser des parcours dédiés aux personnes âgées pour éviter urgences
 
Un jour après cette annonce, l'assemblée générale des grévistes a voté la poursuite du mouvement. Le collectif Inter-Urgences a estimé que le plan de refondation présenté par Agnès Buzyn était insuffisant, rapporte franceinfo.

Les syndicats n’ont également pas tardé à réagir. À l’image de la CSMF qui approuve tout d’abord le fait que ces annonces englobent l’ensemble des acteurs qui prennent en charge des urgences, dans un communiqué daté du 9 septembre. Le syndicat pense en effet que « résoudre la crise des urgences hospitalières passera forcément par une mobilisation de tous les acteurs et une réorganisation tournée vers la médecine libérale. Les Français doivent cesser d’aller à l’hôpital pour tout ! »

Mais la CSMF déplore que la création d’un service d’accès aux soins ne soit pas clairement budgétisée. Et considère qu’elle devra « s’appuyer sur la régulation libérale et s’organiser dans les territoires avec et par les médecins libéraux ». Autrement dit : son organisation ne devra pas être centrée sur l’hôpital, « sous forme d’un numéro unique issu de la régulation hospitalière ».
 
Le SML estime quant à lui que ce dispositif « non abouti est peu lisible et pose de nombreuses interrogations quant à sa mise en œuvre pratique ». D’autant plus que « rien ne semble décidé concernant l’avenir de la régulation libérale et le 116 117 ». Il appelle donc à procéder à l’évaluation des expérimentations menées dans cinq régions, où un recul des recours aux urgences a été observé dans les territoires concernés.

Loin d’être à la hauteur des attentes

Le SML note également que le gouvernement entend soutenir l’offre de soins non programmés, sans rendez-vous, dans les cabinets médicaux, les maisons et centres de santé (mesure n° 2), mais regrette que l’investissement proposé (10 millions d’euros) soit « loin d’être à la hauteur des attentes ».
 
Pour le syndicat, une reconnaissance financière est « indispensable » pour que les médecins, dont l’agenda est déjà surchargé, bousculent leur organisation. Une reconnaissance qui doit notamment passer, selon le SML, « par une majoration de 15€ pour toute consultation non programmée et un tarif de visite longue pour se rendre au chevet des patients en ALD de plus de 80 ans, ce qui limitera le recours aux urgences. »
 
Et d’ajouter qu’il aurait été « logique » que la permanence des soins ambulatoires (Pdsa) soit étendue au samedi matin, ce qui aurait permis d’apporter « un soulagement rapide aux urgences ». Quant à la CSMF, elle est persuadée que la crise des urgences passera par « une meilleure valorisation de la permanence des soins, tant pour son versant ambulatoire que pour les cliniques privées ». Elle demande donc que les horaires soient « élargis à la tranche 19-20h, ainsi qu’au samedi matin pour les médecins généralistes, et à toute la journée pour tous les médecins spécialistes concernés. »

Le SML propose d'autres solutions

Comme le SML, la CSMF exige la mise en place de mesures d’incitation fortes et de réorganisation car les médecins de ville dont déjà « surchargés ». Le syndicat appelle donc la Cnam à « ouvrir sans délai des négociations pour une meilleure valorisation des soins non programmés réalisés après régulation ou orientation. Ceci éviterait un recours excessif et désordonné aux urgences hospitalières. »
 
À propos de l’enveloppe débloquée par la ministre de la Santé, le SML considère que les 750 millions d’euros sur trois ans « seront en grande partie fléchés sur les hôpitaux publics ». Et propose des solutions « simples et pratiques » pour remédier à la crise des urgences. Comme, par exemple, « la possibilité d’hospitaliser un patient directement dans les services, après échange téléphonique entre les praticiens libéral et hospitalier ».

Vive le privé ?

Autre mesure proposée par le syndicat dans le cadre du transfert d’activités de l’hôpital vers la ville : « que des moyens supplémentaires soient dévolus aux médecins libéraux afin de leur permettre de développer des plateaux techniques pour y prendre en charge les actes qui ne relèvent plus de l’hospitalisation. »
 
Last but not least, Elsan, leader de l’hospitalisation privée en France, a profité de l’annonce de la ministre de la Santé pour faire part de ses solutions pour désengorger les urgences… Le groupe considère qu’il suffirait de « créer des centres de soins non programmés (non liés à une autorisation) pour les soins non programmés ne relevant pas de l’urgence vitale. » Ils auraient l’avantage d’être « ouverts la journée et parfois le week-end, ouvertes au moment où les urgences sont surchargées. »...

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