Tarifs hospitaliers : une hausse en trompe l’œil selon le collectif Inter-Hôpitaux

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Le protocole d’accord sur l’évolution pluriannuelle minimale des ressources des établissements de santé s’inscrit « en rupture profonde avec le long cycle de baisse tarifaire que les établissements ont connu ces dernières années », estime le Ministère de la Santé. Un exercice d’autosatisfaction, et des chiffres, relativisés par le collectif Inter-Hôpitaux (CIH).

Tarifs hospitaliers : une hausse en trompe l’œil selon le collectif Inter-Hôpitaux

Il s’agirait d’une « rupture profonde » avec le long cycle de baisse tarifaire que les établissements ont connu ces dernières années, annonçait en fanfare le 6 février dernier le ministère de la Santé qui se félicitait des décisions prises pour la campagne tarifaire et budgétaire 2020.
 
Et d’ajouter que le protocole d’accord sur l’évolution pluriannuelle minimale des ressources des établissements de santé (1) « inscrit pour la première fois la progression des ressources des établissements de santé dans une logique pluriannuelle ». Un exercice d’autosatisfaction, et des chiffres, relativisés par le collectif Inter-Hôpitaux (CIH), dans un communiqué daté du 9 février dernier.
 
Mais, me direz-vous, avant de connaître la teneur de la contre-attaque du CIH, peut-être faudrait-il connaître les chiffres exacts annoncés par Agnès Buzyn. Hé bien, nous allions justement y venir ! Le ministère de la Santé se félicite en effet que les ressources allouées aux établissements de santé pour leurs activités de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO), incluant le taux d’évolution des tarifs et la montée en charge du financement à la qualité, progresseront de +0,6% pour 2020, contre + 0,5% en 2019.

Hausse relative

Une annonce relativisée par le CIH qui précise que « la hausse des tarifs sur les 3 prochaines années sera de + 0,2 % par an en médecine, chirurgie, obstétrique, ne rattrapant pas les 5.6% de baisse des tarifs sur les 10 dernières années à l’hôpital public en médecine chirurgie obstétrique ». Ce qui signifie qu’« il ne sera pas possible, pour de nombreuses prises en charge, de rattraper les coûts engagés par les tarifs », ajoute le collectif.
 
Par ailleurs, la ministre de la Santé qui s’auto-congratule d’avoir augmenté les tarifs des hôpitaux en 2019 pour la première fois en dix ans, « a omis de signaler que cette augmentation est due à la stagnation et la baisse de l’activité, l’enveloppe de financement restant fixe », tacle le CIH.
 
Autre épine dans le pied de la communication du gouvernement : toute hausse des tarifs est « compensée soit par une moindre activité soit par de moindre dotations puisque l’enveloppe globale de financement est fermée et fixe », poursuit le CIH qui fait allusion à l’Ondam (Objectif national des dépenses d'assurance maladie) qui prévoit 84.4 milliards pour l’hospitalisation en 2020. En outre, le CIH rappelle que l’Ondam est « inférieure à l’inflation des charges », selon les estimations des fédérations hospitalières (FHF, FHP, Fehap, Fnehad et Unicancer).

Incitation à la qualité

Last but not least, le ministère de la Santé annonce dans son communiqué que l’enveloppe de financement à la qualité, qui concerne en 2020 les activités de MCO et de SSR, est multipliée par deux par rapport à 2019. Ce sont donc « désormais 400 M€ qui sont répartis entre les établissements de santé sur des critères de qualité de la prise en charge », précise le ministère.
 
Oui, mais… l’incitation à la qualité qui doit doubler cette année « n’a pas montré son efficacité dans les pays où elle a été généralisée (UK et USA) », nuance encore le CIH, qui cite une étude de 2018 pour justifier ses propos. En effet, ce genre de politique aurait produit les résultats suivants selon le CIH :
 
« Amélioration transitoire d’indicateurs, pas d’amélioration de la morbi-mortalité, pas d’amélioration de la qualité des soins perçue par les patients, et parfois détérioration des marqueurs de qualité ne donnant pas lieu à rémunération, aggravation des inégalités avec pénalisation des hôpitaux ou des professionnels prenant en charge les patients les plus pauvres ou les malades les plus graves. »
 
Fort de ces arguments, le collectif appelle donc à « une prise de conscience immédiate des pouvoirs publics » et exige « un financement à hauteur des besoins, des mesures immédiates afin de relancer l’attractivité des hôpitaux pour les soignants ».
 
1 : Le protocole définit l’engagement de l’État sur l’évolution minimale des ressources des établissements de santé pour les trois années à venir, mais aussi les engagements des fédérations hospitalières dans une participation active aux politiques de transformation hospitalière.
 

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