Surmenage, pression, marathon, incivilité, charge de dingue, la parole aux médecins généralistes libéraux, au cœur de la manif

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"Tous les jours, j'ai l'impression de partir à la guerre", "on est tous sur le point de capituler" : paroles prises au vol à la manif des médecins généralistes libéraux en grève aujourd’hui et demain pour obtenir une revalorisation du tarif de consultation à 50€.

Surmenage, pression, marathon, incivilité, charge de dingue, la parole aux médecins généralistes libéraux, au cœur de la manif

© Twitter Lion.S

"Une pression énorme"

Arnaud Saada, 39 ans, Massy (Essonne) : "Tous les jours, j'ai l'impression de partir à la guerre, je sais quand je commence mais je ne sais pas quand je termine. Mon agenda est plein deux à trois jours avant, et les urgences se rajoutent ensuite, je les place entre deux rendez-vous".

"Il y a une pression énorme du fait du manque de médecins, les gens veulent des rendez-vous alors que je n'en ai plus. Je refuse une petite dizaine de patients par jour, c'est abominable".

"Des journées marathon"

Bénédicte, 43 ans, Saint-Chamond (Loire) : "Le plus problématique, c'est l'accueil des patients, entre 20 et 30 par jour auxquels se rajoutent les urgences, les demandes de certificats médicaux, de résultats de prise de sang...".

Évoquant "des journées marathon de 8H00 à 19H00, difficiles à concilier avec la vie de famille", elle estime que "la revalorisation des actes médicaux permettra d'attirer dans le secteur libéral des jeunes médecins qui aiment leur travail et qui ont envie de travailler, mais pas à n'importe quel prix".

"Au four et au moulin"

Julien Rogowski, 30 ans, Alsace : "Il y a un gros problème de surcharge administrative, en moyenne un médecin passe 1h30 par jour à gérer de la paperasse", alors qu'il "n'est pas formé pour ça, mais pour être au contact des patients et les examiner".

"On doit être au four et au moulin, en consultation tout en gérant l'administratif, les messages, le téléphone... On n'arrive pas à bien faire notre travail. Hier, j'ai passé une demi-heure pour avoir un compte rendu de radio. Ca veut dire qu'il faut rogner sur les consultations".

"La médecine a un coût"

Natacha Regensberg de Andreis, Paris : "On n'a plus la capacité de voir le nombre de patients qui est croissant, avec des pathologies de plus en plus complexes et avec une démographie médicale qui ne suit pas".

"On a appris aux gens que la médecine était gratuite. Elle n'est jamais gratuite, elle a toujours un coût et quelque chose qui est gratuit, c'est quelque chose qu'on dévalorise. On dévalorise le statut du médecin, sa capacité à gagner sa vie et donc s'installer, et également son image".

"On voit de plus en plus d'incivilités"

Claire Seror, 40 ans, Ariège : "Je suis installée à Lézat-sur-Lèze (2.300 habitants) depuis cinq ans dans une maison de santé, avec un autre médecin. Il faut que ce soit un choix de s'installer à la campagne, j'ai fait ce choix. Si on y manque de monde, c'est que les déserts médicaux sont aussi des déserts sociaux, avec des services publics qui ferment".

"Lundi, j'ai travaillé de 8h30 à 21h00, j'ai pris 28 patients, et je me suis fait agresser par le dernier. C'est la deuxième fois ce mois-ci, alors que ça ne m'était jamais arrivé. On voit de plus en plus d'incivilités."

"Les urgences craquent, nous aussi"

Carole Fesneau, 57 ans, Val-d'Oise : "Je ne peux pas faire plus que ce que je fais actuellement : je travaille 12 à 14 heures par jour, pour réussir à la fois à soigner mes patients du mieux que je peux, à tenir à jour mes dossiers... avec l'informatique qui plante tous les quatre matins".

"Si on avait une revalorisation digne de ce nom, on pourrait plus facilement embaucher secrétaires et assistants pour se consacrer uniquement au temps médical, qui aujourd'hui ne représente que 20% de ma journée. Les urgences craquent, nous aussi. On est tous sur le point de capituler".

"Une charge de dingue"

Sarah Creplet, 34 ans, qui exerce à Montpellier et en région parisienne : "Ça fait quatre ans et demi que je fais des remplacements. J'adore la médecine, une passion depuis toute petite, mais je suis déçue par ce que j'entends et ce que je vis. La médecine se dégrade complètement, les médecins que je remplace sont exténués. Tout cela ne me donne pas envie de m'installer.

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/journee-de-greve-historique-des-medecins-liberaux-rassemblement-1400-dans-toute-la-france

Je ne sais plus ce que je vais faire. Je voulais être médecin de famille, travailler en semi-rural, mais on y a une charge de dingue... Les gens ne comprennent pas qu'on ne veuille plus travailler jusqu'à 22h sept jours sur sept."

Avec AFP

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