Les derniers médecins d’Alep ne tiendront plus longtemps

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« Nous attendons notre tour pour mourir »

Les derniers médecins d’Alep ne tiendront plus longtemps

Alors que le siège d’Alep-Est se poursuit, les derniers médecins de la ville et leurs patients vivent des heures tragiques. C'est ce dont témoignent les membre de l’UOSSM, une association internationale de praticiens syriens.

 

Alep, quartier Est : un mouroir à ciel ouvert dans lequel 250 000 personnes, dont une trentaine de médecins, survivent tant bien que mal. Les Nations unies estiment que si rien n’est fait, cette partie de la ville pourrait disparaitre avant la fin de l’année. Une situation insoutenable pour les médecins de l’Union des organisations de secours et soins médicaux (UOSSM, voir encadré ci-dessous), une ONG qui entretient des contacts permanents avec les praticiens assiégés. 

« J’ai eu les praticiens d’Alep-Est il y a peu, la seule chose qu’ils m’ont dite c’estNous attendons notre tour pour mourir“ », rapporte le Dr Anas Chaker, anesthésiste-réanimateur à Longjumeau et porte-parole de l’UOSSM. Une phrase qui n’a rien de métaphorique si l’on en croit le Dr Ziad Alissa, lui aussi anesthésiste-réanimateur, et président de l’association. « Il restait 35 soignants il y a quelques jours à peine, nous sommes depuis descendus à 32 », déplore-t-il.

Et ça continue, encore et encore…

Parmi les médecins qui n'exercent plus, certains sont partis, d'autres sont morts. Le Dr Chaker relate notamment l’histoire du Dr Hasan al-Araj, dernier cardiologue de la ville de Hama, tué en avril dernier dans sa voiture par une frappe aérienne. « C’était probablement un tir russe », s’indigne le praticien.

 

La voiture du Dr Hasan al-Araj, détruite par une frappe aérienne. © All4syria


Malgré la tension et le désespoir, l’ONG veut être prête à l’action si une route pour Alep s’ouvrait dans les prochains jours. « Nous avons mis en place une douzaine de centres de soins primaires en périphérie de la métropole », explique Anas Chaker. Des centres de soins que le praticien considère comme indispensables, mais qui lui semblent parfois n'être qu'une goutte d’eau dans l’océan du massacre. « Je ne crois plus en une éventuelle issue diplomatique », se désole-t-il. « De ma vie, je n’ai jamais vu un conflit s’en prendre au sacré de la vie humaine de cette manière, c’est un massacre à huis clos. »

« Dénoncez publiquement ce qui se passe en Syrie ! »

Mais Anas Chaker ne peut se résoudre à laisser les praticiens d’Alep sans assistance. « Nous avons l’obligation éthique, morale et déontologique d’honorer notre serment d’Hippocrate », défend-il, encourageant les soignants français à faire entendre leurs voix. « Dénoncez publiquement ce qui se passe en Syrie ! Demandez haut et fort à nos dirigeants de faire cesser ces bombardements. Nous ne pouvons accepter la mort de nos collègues dans le silence de la communauté internationale ! »

Si vous souhaitez agir, sachez que vous pouvez faire un don financier à l’association, offrir du matériel dont vous n’avez plus l’utilité, ou vous engager dans des actions concrètes auprès des soignants syriens (voir ci-dessous). 

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L’UOSSM, qu’est-ce que c’est ?

C’est une association de médecins crée en 2011, sous le premier nom d’Association d’aide aux victimes en Syrie (AAVS). Elle ne devient l’UOSSM que deux ans plus tard. Son action s’articule autour de cinq axes principaux : 

- Le soutien aux activités de traumatologie : l’asso soutient financièrement les établissements afin qu'ils puissent continuer à accueillir les blessés de guerre.

- La mise en place de centres de soins primaires pour prodiguer des soins quotidiens aux civils, notamment pour les malades chroniques, ou pour vacciner les populations. 

- Les centres de soutien psychologique et de santé mentale, lieux d’écoute et de soins indispensables pour ceux que la guerre a affectés sur le plan physique et psychologique. 

- Les centres de formation, notamment pour former les praticiens à la médecine de catastrophe. 

- La recherche médicale : collecter les données de terrain pour optimiser la prise en charge des patients tant sur le plan du savoir-faire que du savoir-être.

(Source : http://www.uossm.fr)

Source:

Johana Hallmann

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