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Le 9 avril 2023, Anthony Queffelec, un père de famille de 36 ans résidant à Pouilley-Français près de Besançon, a contacté le SAMU suite à un malaise. Lors de son premier appel, il explique qu'il « panique un peu là » et présente des difficultés respiratoires. Selon les échanges retranscrits par le quotidien L'Est Républicain, la médecin régulatrice du 15 n'aurait pas appréhendé correctement l'urgence de la situation, interprétant les symptômes comme une simple « crise d'angoisse ».
Face à cette évaluation, une ambulance privée est envoyée sans caractère d'urgence. Trente minutes après son premier appel, ne voyant toujours personne arriver, le trentenaire recontacte le SAMU. D'une voix de plus en plus affaiblie et avec une respiration devenue difficile, il demande : « Ils sont partis il y a longtemps ? » puis insiste : « Ils vont venir ? »
À ce moment précis, l'ambulance, non informée du caractère urgent de l'intervention, effectue un détour pour déposer un autre patient à son domicile. L'opératrice le rassure : « Oui ne vous inquiétez pas, ils ont été déclenchés ».
« J'avais l'impression au téléphone qu'il était hyper angoissé »
Lorsque les secours arrivent finalement, Anthony Queffelec vient de perdre connaissance et sa respiration se limite à des râles d'agonie. Les ambulanciers, rapidement « dépassés » selon leurs propres dires, tardent à entamer une réanimation cardio-pulmonaire. Une équipe du SMUR est finalement déclenchée et commence immédiatement les manœuvres de réanimation à son arrivée, mais il est déjà trop tard. Transporté au CHU, le patient est déclaré en état de mort cérébrale le lendemain.
Dans sa justification ultérieure, la médecin du SAMU a déclaré : « J'avais l'impression au téléphone qu'il était hyper angoissé », semblant confirmer qu'elle avait sous-estimé la gravité des symptômes qui correspondaient pourtant à ceux d'un infarctus.
Suite à cette tragédie, la compagne de la victime a saisi la Commission régionale des conciliations et d'indemnisation des accidents médicaux (CRCI), dénonçant des failles dans la chaîne médicale. Les conclusions rendues récemment par cette commission indépendante sont sans équivoque : « La prise en charge par la régulation du centre 15 n'a pas été conforme aux règles de l'art ». Elle établit qu' « Anthony Queffelec a été victime de manquements du CHU de Besançon, à hauteur de 70% des dommages subis ». La société d'ambulance Jussieu, primo-intervenante, est quant à elle jugée responsable à hauteur de 10%.
Dans un communiqué, le CHU de Besançon a indiqué prendre acte des conclusions « d'une expertise indépendante » qui lui « impute une part majeure de responsabilité concernant le déclenchement d'une ambulance et non d'un SMUR lors du premier appel ».
C'est terrible pour cette famille d'être un "aléa du système défaillant". En tant que médecins nous avons notre part de responsabilité d'accepter des conditions de travail dangereuses qui mettent à la fois en danger les patients, mais aussi notre propre santé mentale. Quand allons-nous comprendre que ce système n'est plus tenable et plus acceptable ?
Régulièrement nous entendons des témoignages de patients assez jeunes qui ne sont pas pris au sérieux pour des tableaux cliniques pourtant inquiétants. C'est récurrent et cela survient un peu partout sur notre territoire ... Cela pose la question du niveau de compétence et de formation des personnes qui traitent les appels des patients en souffrance. Désolé de l'écrire, mais il y a une très grande hétèrogénicité de qualité de prise en charge, avec un effet "praticien-dépendant" .....