Le Loup et Le Chien À la sauce Santé

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Le système de santé francais, fondé en 1945, est un système mixte, résultat d’un compromis historique entre le programme du Conseil National de la Résistance et les principes de la médecine libérale. En réalité, cette dualité publique/privée caractérise l’ensemble du système.

Le Loup et Le Chien À la sauce Santé

Côté offre, coexiste un secteur 1 sans dépassement d’honoraires avec depuis 1980 un secteur 2 à dépassements d’honoraires. Côté financement, l’ « assurance principale » solidaire fournie par la Sécurité Sociale laisse à la charge des patients une part du coût plus ou moins remboursée par les assurances « complémentaires » (mutuelles et assureurs privés).

 

La gestion du système, elle-même, est double, avec la Sécurité Sociale qui rembourse et s’occupe de la ville, et l’Etat qui fixe les prix et gère l’Hôpital. L’augmentation des dépenses de santé de 3 à 4 % par an, (de 2 % du PIB en 1945 à près de 12 % en 2011), a nécessité l’adoption depuis la fin des trente glorieuses, de mesures de régulation. Ces mesures furent tantôt d’inspiration publique, comme le budget global hospitalier (1983) ou le vote par l’assemblée nationale de l’ONDAM (1995), tantôt d’inspiration libérale, comme le forfait hospitalier, les franchises, l’augmentation du reste à charge, la concurrence entre les établissements de santé organisée par la T2A, la convergence tarifaire, et surtout les transferts répétés de prise en charge de la Sécu vers les assurances « complémentaires ». Si bien qu’aujourd’hui la Sécu ne rembourse plus que 50 % des soins courants.

 

On a le sentiment qu’on est arrivé au bout de ce système et qu’il faudrait tout remettre à plat. Si on fait le choix de services publics financés à 100 % par la solidarité comme en Alsace – Moselle, la priorité est de construire un vrai système public de médecine de proximité reposant avant tout sur les médecins en secteur 1 et les paramédicaux conventionnés.

 

Ce financement à 100 % suppose de revoir le mode de rémunération des médecins en sortant du tout paiement à l’acte et de réviser le panier de soins relevant de la solidarité. Il faut revoir à la baisse le coût des médicaments, supprimer le remboursement de prestations inutiles ou dont l’efficacité n’est pas démontrée (les cures thermales, les médicaments remboursés à 15 % ou à 35 %,...) réduire la disparité injustifiée des pratiques. Du coup, il n’y aurait plus d’assurances « complémentaires » à proprement parler, mais seulement des assurances « supplémentaires ». Les soignants seraient placés face aux choix suivants : conventionnement avec la Sécurité Sociale et respect des tarifs conventionnels, ou déconventionnement avec possibilité d’un conventionnement sélectif par des mutuelles ou des assureurs privés. Ces derniers ne manqueraient pas alors d’encadrer les pratiques médicales de façon autrement plus contraignante que ne le fait aujourd’hui la Sécurité Sociale.

 

En quelque sorte, une version médicale remasterisée de la fable « le Loup et le Chien » de la Fontaine…

*André Grimaldi est professeur de diabétologie à la Pitié-Salpêtrière, Paris

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