Le ChemSex, un « sida n°2 » : Vraiment ?

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ChemSex et Sida, même combat ? Depuis quelque temps, nombreux sont ceux qui comparent ces deux phénomènes. Un parallélisme qui ne serait pourtant pas justifié et qui participerait à la stigmatisation d’une partie de la population.

Le ChemSex, un « sida n°2 » : Vraiment ?

Le ChemSex est-il un deuxième sida ? Depuis quelque temps, ce parallélisme entre cette pratique sexuelle à risque et le virus du VIH se fait de plus en plus courante. Une comparaison qui interpelle au regard de l’impact sociétal et sanitaire de la pandémie qui dure depuis maintenant quarante ans. Mais est-elle justifiée ?

« Le Chemsex est l’usage de substances, notamment les produits de synthèse comme les cathinones, à visée sexuelle », explique pour toute introduction le Dr Jean Victor Blanc, psychiatre addictologue à l’hôpital Saint-Antoine (AP-HP) qui a ouvert une consultation sur le sujet il y a de cela trois ans. Une pratique, induisant un risque infectieux, cardiovasculaire, addictif et psychique, qui a d’abord été observée chez les hommes gays de plus de 30 ans vivant avec le VIH et qui concerne à présent aussi les jeunes homosexuels séronégatifs. « C’est peu décrit en dehors de la communauté homosexuelle », explique le spécialiste.

Une caractéristique communautaire assimilable à celle observée au début de la crise du SIDA qui participerait à ce parallélisme.  « C’est comparé à l’épidémie du VIH car c’est un sujet tabou, qui touche la même minorité sexuelle », confirme en effet Jean-Victor Blanc. Cela, sans oublier que l’augmentation du chemsex a été concomitante à l’arrivée de la PrEP. « Cela a permis de nouveaux modes de protection vis-à-vis du VIH, se traduisant par une certaine libération sexuelle, explique Jean-Victor Blanc. Malheureusement, elle s’accompagne de ce  nouveau fléau, à haut risque pour la santé mentale ».

Pour autant, la comparaison s’arrête là selon le spécialiste. Et pour cause, le « sexe sous produits » continue de toucher une minorité de personnes au sein de la communauté homosexuelle. « C’est important de le rappeler, insiste Jean-Victor Blanc. J’observe que beaucoup de militants présents pendant les années SIDA trouvent que le terme est impropre ». Pour le spécialiste, pas de doute : cette comparaison répondrait d’ailleurs plus d’une démarche sensationnaliste. « Il faut alerter le grand public, solliciter les pouvoirs publics mais en évitant de surfer sur le sujet de manière sensationnaliste », explique-t-il. Et d’ajouter : « Je ne suis pas sûr que cela aide beaucoup les patients de qualifier cela de sida n°2. Le risque est de stigmatiser une communauté ».

En marge d’une « compréhension politique des addictions proche de zéro », la communauté médicale, elle, commence peu à peu à s’emparer du sujet. Une activité qui pourrait permettre de lever le tabou qui participe à cette comparaison maladroite. « Il y a longtemps eu une méconnaissance qui empêchait une détection et une prise en charge efficace. Désormais, les professionnels sont de mieux en mieux formés. On en parle plus régulièrement en congrès et dans des publications scientifiques », explique Jean-Victor Blanc, qui n’hésite pas à partager son savoir aux médecins généralistes, infectiologues, réanimateurs ou urgentistes. « On essaye de former tous ceux qui pourraient être concernés, confie le psychiatre. Je constate  un véritable intérêt de la part des confrères, ce qui se différencie la encore les attitudes discriminantes et de panique d’une partie de la communauté médicale lors des débuts du SIDA ». Cela, même si les structures proposant un accompagnement à ce type de pratiques restent pour l’heure plus que limitées. « Toutes les structures de soins qui connaissent le ChemSex sont saturées, alors que la demande ne fait qu’augmenter. C’est très préoccupant. », explique celui qui a vu sa consultation se remplir en seulement quelques mois.

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