« La formation au métier de directeur d’hôpital fait le plein, mais pas celles de médecin scolaire ni de médecin inspecteur de santé publique »

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Isabelle Richard-Crémieux est la nouvelle directrice de l’École des Hautes études en Santé publique (EHESP), qui forme les cadres en santé publique et assure des missions de recherche. Quelles sont ses priorités ? Et quelles est l’attractivité des métiers de santé publique ouverts aux médecins ? Interview.

« La formation au métier de directeur d’hôpital fait le plein, mais pas celles de médecin scolaire ni de médecin inspecteur de santé publique »

Isabelle Richard-Crémieux, directrice de l'École des Hautes études en Santé publique (EHESP), forme les cadres en santé publique et assure des missions de recherche. 

 

© Caroline Ablain

What’s up Doc : Quels sont vos objectifs concernant les filières des métiers de la santé publique ?

Isabelle Richard-Crémieux : L’école a deux types de formation. D’une part les formations aux métiers de la fonction publique hospitalière ou d’État, notamment aux postes de direction (directeur d’hôpital, directeur des soins, etc) et aux métiers de la santé publique (médecin et pharmacien inspecteur de santé publique, médecin de l’éducation nationale, etc). D’autre part, l’école propose des masters et un doctorat de santé publique. Pour toutes ces formations, mon objectif est de décloisonner : irriguer le plus possible les formations de fonctionnaires par les résultats de la recherche et s’intéresser le plus possible à l’insertion professionnelle des étudiants de nos masters.

WUD : Plus précisément, comment évolue l’attractivité de votre formation au métier de directeur d’hôpital ?

IRC : Des problèmes d’attractivité se posent pour ces carrières, comme pour les métiers de la santé et de la fonction publique en général. Mais il faut relativiser un peu : pour notre formation de directeur d’hôpital, l’an dernier 85 places étaient ouvertes pour le concours (interne, externe et 3ème concours) et elles ont toutes été pourvues. C’était aussi le cas les années précédentes. Néanmoins, il est vrai que le nombre de candidats au concours a diminué ces dernières années. Est-ce que cela suffit à remplir les besoins en directeurs d’hôpital sur le territoire ? Il est compliqué de répondre à cette question car les directeurs d’hôpital de formation peuvent exercer d’autres métiers et qu’il y a d’autres profils au sein des directions hospitalières. Quoiqu’il en soit, ce profil est très apprécié par de nombreux employeurs : au sein des ARS, de l’administration centrale, mais aussi dans le secteur privé. Environ 20% des directeurs d’hôpitaux sont détachés sur un autre emploi. C’est à considérer comme un succès et une reconnaissance pour cette formation.

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WUD : Et pour les filières médecin inspecteur de santé publique et médecin de l'éducation nationale ?

IRC : La situation est tout-à-fait différente. Pour la filière éducation nationale, nous avons 55 places ouvertes au concours et au final 28 places pourvues en 2021/2022. Cette désaffection est installée depuis plusieurs années. Je pense que pour les jeunes médecins, passer ce concours en vue de faire ce métier toute sa vie est un modèle dépassé. Mais ce n’est pas mon rôle de m’exprimer sur la façon dont pourrait être réorganisée la médecine scolaire… Pour la filière de médecin inspecteur de santé publique, il y a aussi un problème majeur d’attractivité avec seulement quelques médecins formés chaque année (5 en 2021, 1 en 2022). Je pense que les causes sont à chercher du côté de l’organisation même de la formation médicale : parce qu’elle est majoritairement basée sur les réponses techniques aux pathologies, on a au bout du cursus des jeunes médecins qui veulent faire de la médecine technique dans des spécialités d’organes.

WUD : Quelles sont les nouvelles formations proposées par l’EHESP pour répondre aux nouveaux besoins de la filière santé ?


IRC : Nous avons par exemple beaucoup développé notre formation pour les coordonnateurs de maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), de centres de santé, de communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ou encore de dispositifs d’appui à la coordination des parcours complexes (DAC). Ce programme « PACTE », a aussi vocation à être utilisés par des personnels des ARS, qui accompagnent ces coordonnateurs. Nous avons ainsi formé plusieurs centaines de personnes, c’est un gros succès.  Concernant les structures d’exercice coordonné, ces coordonnateurs sont le plus souvent des professionnels de santé non médecins (infirmiers, notamment), des secrétaires médicales et des diplômés de masters de santé publique. Nous développons aussi des formations continues destinées aux leaders de ces projets, avec du management notamment (30 inscrits pour le programme pilote). La formation de médecin manager destinée aux chefs de pôle et chefs de services marche bien aussi, avec un focus sur les thématiques comme le leadership, la communication, les ressources humaines et les finances (230 chefs de services, chefs de pôles et présidents de CME formés).

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