Dès les années 1990 et surtout 2000, des fonds d'investissement ont racheté des parts du secteur hospitalier privé, puis des laboratoires d'analyses médicales, participant grandement au phénomène de concentration des structures.
Ainsi, 40% de l'hospitalisation privée est aujourd'hui détenue par quatre groupes (Ramsay Santé, Elsan, Vivalto, Almaviva), et six groupes de laboratoires d'analyses médicales concentraient en 2021 62% des sites, indique ce rapport des sénateurs Corinne Imbert (apparentée LR), Olivier Henno (Union centriste) et Bernard Jomier (socialiste).
La financiarisation a ensuite touché le secteur de la radiologie, celui des centres de santé dentaire et ophtalmologique, et s'introduit désormais "massivement" dans celui des "centres de soins primaires" (polyvalents, soins non programmés...).
Pour ces fonds d'investissement, le soin "représente un investissement rentable" et "sûr", au vu de la croissance exponentielle des besoins de santé, et du remboursement des soins par l'Etat, écrivent les rapporteurs.
Dans les sociétés d'exercice libéral, la réglementation limite aujourd'hui la part de capital détenu par des "tiers non-professionnels" à 25%. Mais les investisseurs usent de "montages juridiques complexes" pour contourner la législation et prendre le contrôle effectif de structures, déplorent-ils.
Ils pointent "un risque sérieux pour l'indépendance des professionnels", qui se voient imposer des obligations (fonctionnement, offre proposée...) favorisant la rentabilité, au détriment des besoins de santé. Ils notent aussi un "amoindrissement" du pouvoir de négociation des autorités de tutelle, face aux grands groupes.
Les sénateurs ont édité 18 proposition pour réguler le secteur médical
Les sénateurs appellent à mieux réguler le secteur. Parmi 18 propositions, ils appellent notamment à s'appuyer sur les autorisations d'activités délivrées par les Agences régionales de Santé, dont les critères pourraient évoluer.
Ils proposent de conditionner toute ouverture de centre de soins primaires à "un agrément", comme la loi le prévoit depuis 2023 pour les centres dentaires et ophtalmiques, et d'augmenter le nombre de laboratoires d'analyses médicales de proximité, en dressant une liste minimale d'examens effectués sur site.
Ils proposent quelques pistes pour renforcer les pouvoirs de contrôle de l'Assurance maladie et des Ordres professionnels, souhaitant voir ces derniers aidés par des "cellules d'appui".
https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/la-financiarisation-cest-pas-nos-oignons-ah-bon-tes-sur
Ils souhaitent encore modifier la loi, pour mieux protéger le pouvoir décisionnel des médecins dans leurs structures, les former à la gestion, ou encore de fixer une durée minimale d'investissement dans une société, pour éviter la spéculation.
Avec AFP