CESP : un flop ?

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Sur les 561 contrats d’engagement de service public à saisir en 2019, 169 n’ont pas été pourvus. Et l’année dernière, 124. Pourquoi ? Ce contrat est-il un mauvais plan ? L’envers de la communication ministérielle.
 

CESP : un flop ?

« Fin 2018, j’ai failli résilier mon CESP. Mais il aurait fallu que je rembourse près de 50 000€ à l’ARS, ça m’a calmée ! » Cette interne de 28 ans, qui a accepté de témoigner sous couvert d’anonymat, fait partie des 42% de signataires pour qui les cartographies de zones déficitaires ont été modifiées entre la signature de leur contrat et leur installation.
Après avoir planché pendant un an sur un projet de maison médicale dans une commune rurale déficitaire (avec toutes les réunions ad-hoc…) elle apprend que « sa » commune ne fait plus partie des zones éligibles. Douche froide. « Mon mari, qui au départ ne voulait pas habiter là et avait été dur à convaincre, m’a dit : « C’est pourri ce contrat, tu n’aurais pas dû le signer ! ».
Rappel du deal des CESP, créés en 2009 : un engagement de l’externe ou interne à exercer en zone « sous-dotée » en professionnels de santé, moyennant le versement d’une allocation de 1200€ bruts par mois, pour une durée de deux ans au moins. Avantage : un sérieux coup de pouce financier et une autonomie possible pour les étudiants en médecine. Inconvénient : se retrouver pieds et poing liés par un projet professionnel ficelé très (trop ?) tôt et souvent sans accompagnement.

Y a-t-il un pilote à l’ARS ?

« Le référent CESP à l’agence régionale de santé ne répondait jamais au téléphone, ni à mes mails. J’ai fini par contacter le directeur qui m’a dit : « Vous verrez, vous changerez d’avis et de projet professionnel plusieurs fois au cours de votre carrière, comme cela a été le cas pour moi ». Je n’ai pas trop apprécié ! », témoigne notre interne.  Seule solution pour elle : « bidouiller un peu » et revoir son projet de maison médicale, transformé en projet multisite, dont un effectivement en zone déficitaire. Du pain sur la planche donc pour rentrer dans les cases de l’administration. Et si c’était à refaire ? Gros blanc au bout du fil… et grosse lassitude face à « l’absurdité » d’un système.
Il ne s’agit pas d’un cas isolé. « Notre enquête a montré qu’un certain nombre d’internes signataires se retrouvaient en grande difficulté à cause des changements de cartographie », indique Lucie Garcin, présidente de l’ISNAR-IMG. « Heureusement, la loi de Santé adoptée en juillet dernier a prévu que le zonage soit bloqué dans les 3 ans suivant la signature d’un CESP, pour éviter les mauvaises surprises », ajoute-t-elle. Mais cette mesure ne sera pas rétroactive. Sur le fond, comment ne pas douter de l’utilité d’un énième dispositif conçu pour attirer les jeunes médecins en zone rurale, et qui s’est refermé sur certains d’entre eux comme un piège ? Ne faudrait-il pas le supprimer ? « C’est quand même un bon dispositif, qui séduit les jeunes. Mais il est anormal que 80% des internes ne soient pas accompagnés dans leur projet professionnel par manque de moyens dans les ARS », déplore Lucie Garcin.  
 
 
 
 

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