Variants : La riposte française s’organise

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Nouvelle stratégie de dépistage, isolement renforcé ou encore développement de tests de diagnostic inédit… La France s’arme pour faire face à la propagation des variants dans le monde.

Variants : La riposte française s’organise

Tester, alerter, protéger. Si le leitmotiv n’a pas évolué, les règles du jeu, elles, ont été bouleversées par la propagation des variants sur le territoire national. Actuellement, les mutants anglais, sud-africain et brésilien représenteraient 14 % des cas de contaminations en France. Face à cette courbe en croissance, les autorités redoutent un échappement immunitaire et vaccinal. Pour l’éviter, elles tentent de s’organiser.
 
Un nouveau plan de bataille
 
Dimanche 7 février, la Direction Générale de la Santé a envoyé un nouveau plan de bataille aux professionnels de santé. « Compte-tenu de la progression de la diffusion des variantes d’intérêt du SARS-CoV-2 [dites britannique, sud-africaine et brésilienne], des mesures complémentaires sont mises en œuvre », a débuté le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, dans cette note de quatre pages. Au programme ? L'obligation de procéder à une RT-PCR de criblage pour tout test de première intention RT-PCR ou antigénique positif. Cette procédure doit être réalisée « dans un délai de 36H maximum », précise la DGS.
 
Du côté de l’isolement aussi, les lignes bougent. Pour les personnes positives aux variants sud-africain et brésilien, l’isolement obligatoire passe de sept jours à 10. « Après dix jours […] et en l’absence de fièvre depuis plus de 48h pour les patients zéro symptomatiques, la levée de l’isolement est désormais conditionnée pour les cas confirmés à l’obtention d’un résultat de test négatif », précise Jérôme Salomon. Dans le cas où ce dernier se révélerait positif, l’isolement doit être rallongé de sept jours.
 
À noter que lors de leur confinement, vos patients se verront proposer automatiquement le passage d’un infirmier libéral. En cas de risque de propagation du variant à l’intérieur de son foyer, ils pourront également bénéficier d’une offre spécifique d’hébergement via les cellules territoriales d’appui à l’isolement (CTAI). Les classes d'école, quant à elles, devront immédiatement fermer leurs portes dès que la contamination d'un enfant à l'un des deux variants est confirmée. Une procédure qui s'applique également si l'un des élèves se révèle être le cas-contact "d’un parent ou membre de la fratrie"
 
Un nouveau test plus rapide et plus sensible au variant anglais
 
Une ribambelle de renforcements qui s’accompagne également de nouveautés en matière de dépistage. Récemment, le ministère de la Santé a inscrit un nouveau test, baptisé RunCov, dans la liste des tests disponibles.  
 
Pensé par le Cirad – un organisme de recherche agronomique basé à la Réunion, cette nouvelle méthode s’inspire des diagnostics de maladies de végétaux.  « Ces méthodes moléculaires dites RT-Lamp, basées sur l’amplification de morceaux d’ADN de l’agent pathogène, fonctionnent aussi sur les virus humains », explique la spécialiste des végétaux Isabelle Robène, à Libération.
 
Aussi inattendue que soit cette innovation, un de ses véritables intérêts se cache dans sa capacité à détecter plus aisément le variant anglais. Pour réaliser ce test, les chercheurs s’appuient sur l’amplification de deux morceaux de génome, les zones S et N. « On s’est aperçu, se félicitent les chercheurs, que le mutant anglais n’activait pas la zone S. Si on a un résultat S- et N +, on a donc une forte suspicion de sa présence », détaille pour nos confrères Emmanuel Jouen, qui a également travaillé sur ce nouveau modèle.
 
Sans oublier que cette nouvelle méthode également basée sur un prélèvement par voie nasale présenterait un autre avantage. Aussi rapide qu’un test antigénique – soit maximum 30 minutes, sa fiabilité serait, elle, comparable à un test RT-PCR. « RunCov se suffit à lui-même, avec une sensibilité d’environ 90 %, même avec de faibles charges virales », indique Eric Jeuffrault, directeur régional du Cirad.
 
Une petite révolution qui doit cependant encore être mise à l'épreuve. Dans les prochaines semaines, RunCov devrait être testé dans l’Hôpital insulaire de Saint-Pierre. C’est ensuite sur la liaison aérienne Réunion-Mayotte qu’il devrait être déployé, puis sur les vols Réunion-métropole.
 

La campagne vaccinale d’Afrique du Sud, à l’arrêt
 
Si la France tente de s’organiser, c’est notamment pour éviter de se trouver dans une situation similaire à celle de l'Afrique du Sud. Ce 7 février, le pays a annoncé suspendre provisoirement le lancement de sa campagne vaccinale qui devait bientôt débuter grâce à la commande d’un million de doses du vaccin AstraZeneca. Le problème ? Selon une étude de l'université du Witwatersrand à Johannesburg, cette solution présenterait une « protection limitée contre les formes modérées de la maladie dues au variant sud-africain, chez les jeunes adultes ». Si cette étude n'a pas encore été relue par les pairs, ses premiers résultats indiquent que ce vaccin ne serait efficace qu’à hauteur de 22 % contre les formes modérées du virus. « Dans les quatre prochaines semaines, nous aurons des vaccins Johnson&Johnson et Pfizer », a tenté de rassurer le ministre de la santé, M. Mkhize. Déjà très en retard dans sa stratégie vaccinale, le pays le plus touché du continent déplore déjà 1,5 millions de cas et plus de 46.000 décès.

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