Réforme des études médicales : les enjeux du futur

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Quelles seront les conséquences des réformes des études de médecine en cours et à venir ? Sur quels points devra-t-on faire preuve de vigilance ? Tel était le sujet ce matin d’une riche conférence organisée par l’Université du Change Management en Médecine (UC2m) à Paris.

Réforme des études médicales : les enjeux du futur

« On parle beaucoup de la réforme du premier cycle des études médicales, mais une autre réforme est en cours, une réforme dont les effets se verront le plus dans les prochaines années : la réforme du troisième cycle », a lancé le Pr Bach-Nga Pham, la doyenne de la faculté de médecine de Reims, en préambule d’une conférence organisée ce matin à Paris par l’Université du Change Management en Médecine (UC2m) sur le thème des réformes de la formation.
 
En place depuis la rentrée des internes de la promotion 2017, cette réforme du troisième cycle rebat les cartes en instaurant trois phases : socle, approfondissement, consolidation. Elle est censée « répondre à la nécessité de revoir la démographie médicale au niveau des territoires les plus défavorisés », selon le Pr Bach-Nga Pham, qui a surligné au marqueur rouge l’importance de cette réforme.

Un vrai changement conceptuel

En effet, selon Isabelle Riom, première vice-présidente de l’Intersyndicale nationale des internes (ISNI), « cette réforme va arriver l’année prochaine dans sa phase la plus critique : la mise en place de la consolidation qui est une nouvelle étape qui n’existait pas auparavant ».
 
Il y aura donc un vrai changement conceptuel car « cela donnera une mise en autonomie à l’interne et une progressivité entre l’internat et les postes d’assistanat », a ajouté Isabelle Riom.

Selon elle, cette réforme sera cruciale pour le début de carrière des jeunes professionnels. Il s’agira notamment « d’atténuer les passages d’une marche à l’autre dans les études, selon Isabelle Riom. On avait une marche qui se faisait de l’externat à l’internat, on avait une phase socle qui protège ces internes en début de parcours. On va désormais diminuer la marche de l’internat au post-internat, pour avoir un parcours qui soit plus sécurisé pour l’interne et plus cohérent avec les compétences que l’on acquiert au cours des études. »

Compétences VS connaissances

Une fois la réforme du 3e cycle mise en application, il faudra s’atteler à la réforme du 2e cycle, a rappelé le Pr Bach-Nga Pham, convaincue qu’il faudra être particulièrement vigilant « sur la qualité de vie et le bien-être des étudiants ». Cela signifie qu’il faudra les accompagner « beaucoup plus sur une acquisition de compétences que de connaissances ». Car cette formation se voudra « plus professionnalisante ».
 
Pour le Pr Bach-Nga Pham, c’est à ce prix que « l’on sera en capacité de capter nos étudiants pour qu’ils restent auprès des populations qui ont besoin d’eux ». Et c’est aussi pour répondre à ces besoins que le gouvernement « travaille actuellement sur le premier cycle et la suppression de la première année commune, avec une ouverture sur le nombre d’étudiants que nous formerons ».

Changer de paradigme

Une analyse partagée par Isabelle Riom, persuadée que les réformes du premier et deuxième cycle vont « changer le paradigme des études médicales. Auparavant, ces études nous apprenaient des connaissances qui passaient au premier plan vis-à-vis des compétences, en particulier des compétences transversales. »

À l’avenir, il s’agira donc de recentrer cette formation sur ce qui est le plus important, selon Isabelle Riom : « la compétence, le lien avec le patient et les sciences humaines que l’on avait beaucoup trop peu dans nos cursus ». Et d’ajouter : « au vu du renouvellement des connaissances actuelles, l’enjeu le plus important sera de nous apprendre à chercher et critiquer l’information, plus que de savoir par cœur, comme on le faisait autrefois. »

Plus de pognon

Mais il faudra aussi veiller à mettre les moyens pour que tout cela fonctionne à l’avenir. « On passe d’un système peu coûteux financièrement (la Paces) à un système qui nécessite du temps enseignant, des moyens, des locaux adaptés, des outils de simulation », selon Isabelle Riom. Donc il faudra vraiment injecter des moyens en santé. »
 
Les enseignants seront aussi particulièrement vigilants sur la question financière, selon Guillaume Gorincour, enseignant et professeur de radiologie à l’AP-HM. « Sur le fond, nous sommes séduits par cette réforme, mais à effectifs constants d’enseignants, faire du mentoring rapproché avec tous nos étudiants et nos internes pour gérer nos projets professionnels à effectifs constants d’enseignants, cela paraît compliqué. » L’utilisation du terme compliqué étant un doux euphémisme….
 
Enfin, la vigilance devra également être de rigueur sur l’application de ces réformes, selon Isabelle Rion : « Il faudra que, dans chaque université, la mise en place de ces réformes puisse se décliner comme on l’a pensé et qu’on ne retombe pas dans les anciens travers que sont la course aux connaissances et au bachotage. »

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