Maylis Douine, le docteur des orpailleurs

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En Guyane depuis sept ans, Maylis Douine s’intéresse aux problèmes de santé des orpailleurs clandestins travaillant dans la forêt amazonienne. Elle mène auprès d’eux des recherches, essentiellement sur le paludisme, et souligne les enjeux de santé publique. Rencontre.

Maylis Douine, le docteur des orpailleurs

Quel est votre exercice en Guyane ?

Médecin généraliste avec un intérêt particulier pour les maladies infectieuses, je suis praticien hospitalier au Centre Hospitalier André Rosemon (CHAR) à Cayenne. Je travaille 80% de mon temps au Centre d'Investigation Clinique (CIC), où je mène des travaux de recherches, et 20% aux urgences en tant que médecin clinicien. Mon travail s’exerce donc essentiellement dans le domaine de la recherche. J’ai passé une thèse de sciences en santé publique et aujourd’hui, je prépare mon HDR (Habilitation à Diriger des Recherches).

Mes projets de recherche portent sur le paludisme (1) chez les orpailleurs clandestins (2), et sont menés en partenariat avec le Surinam, le Brésil, le Guyana, l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) et d’autres institutions. Après avoir démontré la situation dramatique du paludisme dans cette population, nous avons mis en place une stratégie innovante pour tenter de le contrôler. Cette stratégie, que nous avons appelée Malakit (3), consiste en la distribution, avec une formation, de kits d’auto-diagnostic et d’autotraitement aux orpailleurs. Si les résultats de l’étude-pilote en cours sont satisfaisants, l’expertise acquise en Guyane auprès de cette population particulière, pourrait être exportée dans d’autres pays tels que le Pérou, le Cameroun ou le Vietnam... Pays dans lesquels beaucoup de populations atteintes de paludisme restent isolées, loin des systèmes de soin.


Justement, vous travaillez auprès d’une population singulière, pourriez-vous nous en dire plus ?

Dans le cadre de mon projet de recherche, mon équipe et moi allons à la rencontre des orpailleurs clandestins, majoritairement brésiliens, qui travaillent dans des conditions inimaginables au milieu de la forêt amazonienne. Bien que très mal vus, stigmatisés et dénigrés, notamment parce qu’ils détruisent l’Amazonie, ce sont des hommes et des femmes courageux avec des parcours de vie incroyables. Lorsque nous partons en mission pour nos enquêtes, l’accueil est toujours chaleureux, bien loin des représentations que la plupart des gens se font d’eux.


Vous voyagez beaucoup, d’ailleurs vous descendez tout juste de l’avion. Où vous rendez-vous ?

Effectivement je me déplace beaucoup, en moyenne une à deux fois par mois, soit sur le terrain, soit à l’étranger pour rencontrer des partenaires. Aujourd’hui, je rentre à Cayenne après un mois d’absence : je me suis rendue à Lima pour présenter notre projet à un colloque organisé par l’OMS ; puis à Paris pour préparer un film sur mon travail de recherche avec un documentariste ; et enfin à Montréal pour mettre en place, avec une chercheuse universitaire, une étude sociologique sur la perception par les orpailleurs de notre projet. Ces déplacements permettent de créer du lien avec nos partenaires, de développer des projets de recherche et d’assurer une mise en application sur le terrain.


Comment s’organise votre équipe ?

Nous rencontrons les orpailleurs sur des bases arrières logistiques ou des sites de passages transfrontaliers, où ils se rendent pour vendre leur or, acheter leur matériel ou simplement se reposer. Sur ces sites, neuf médiateurs du projet Malakit restent sur place en permanence pour distribuer les kits. Depuis Cayenne, l’équipe de coordination assure la supervision du projet et se rend en mission sur le terrain une à deux fois par mois. De façon ponctuelle, nous mettons en place également des missions sanitaires plus poussées.

En 2015, quand j’ai mis en place la première étude d’évaluation sanitaire, j’ai recruté une infirmière, Louise Mutricy, avec laquelle je travaille étroitement. Au début, elle assurait toutes les missions terrains. Désormais, elle coordonne la deuxième étude qui déterminera si la situation sanitaire s’est améliorée avec le projet Malakit : c’est la phase 2 de notre recherche.
 

Sous le ciel effondré…

Intéressé par l’activité du Dr Maylis Douine et de Louise Mutricy (IDE), l’auteur Colin Niel en a fait deux personnages de son dernier roman intitulé « Sous le ciel effondré ». Ce polar se déroule dans la forêt amazonienne, sur le territoire amérindien que se déchirent orpailleurs et évangéliques. Une ambiance mystérieuse et un suspens intenable autour de la disparition d’un jeune Amérindien.
 
« L’intrigue est super bien ficelée et nous captive jusqu'à la dernière ligne » - Luca.
« J'ai l'impression de revenir d'un périple incroyable et ultra dépaysant » - Lilas.
« Passionnant. Cinq cents pages qui se dégustent et j'en redemande ! » - Annabelle.
 
Parviendrez-vous à reconnaitre Maylis et Louise dans cette intrigue ?
 
Sous le ciel effondré de Colin Niel
Broché: 512 pages
Éditeur : Éditions du Rouergue (3 octobre 2018)
Collection : Rouergue noir
ISBN : 281261658X

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