Les recherches ayant alimenté l'étude sont épinglées pour n'avoir pas respecté les conditions d'expérimentation humaine définies par la loi, à savoir le feu vert d'un comité de protection des personnes et, pour les plus sensibles (dites RIPH1), également de l'ANSM.
"Après analyse, nous estimons que cette publication porte sur des données qui auraient dû être recueillies dans le cadre d'une RIPH de catégorie 1, après obtention d’un avis favorable d’un comité de protection des personnes (CPP) et d’une autorisation de l’ANSM", a indiqué l'agence du médicament à l'AFP.
"Nous allons en conséquence saisir de nouveau la justice", a ajouté l'ANSM, sans plus de précisions.
L'article en cause, paru dans l'édition d'août 2024 de la revue "Acta Scientific Microbiology", est co-signé par Didier Raoult, ex-patron de l'IHU Méditerranée Infection de Marseille, et par l'un de ses anciens proches collaborateurs, Philippe Brouqui. Au printemps 2023, une première version, sur un site de pré-publication, comptait six autres signataires.
L'étude parue récemment, portant sur les données de 1 276 patients atteints du Covid traités à l'IHU, dont une partie avec de l'hydroxychloroquine, défend une nouvelle fois le traitement promu par le Pr Raoult, à rebours du consensus scientifique et d'un risque potentiellement mortel pour certains patients.
Une étude « observationnelle », pas un essai clinique selon Didier Raoult
L'APHM et la Fondation Méditerranée Infection avaient écrit à l'ANSM pour signaler cette nouvelle publication et se désolidariser de cet article, dont la méthodologie repose sur "l'utilisation de données de patients et de recherches non-autorisées", avait-on appris jeudi auprès de l'APHM, confirmant une information du Point.
En novembre 2023, l'ANSM avait annoncé avoir signalé à la justice la publication d'une autre étude co-signée par le professeur Raoult n'ayant pas les autorisations obligatoires.
Le professeur avait martelé qu'elle n'était qu'"observationnelle" et ne constituait pas un essai clinique, une interprétation sujette à caution.
Sous la direction de Didier Raoult, l'IHU de Marseille a été le cadre de multiples essais cliniques ne respectant pas les règles éthiques, par exemple sur le consentement des patients.
L'Agence du médicament avait aussi saisi la justice au printemps 2022, après avoir rendu un rapport cinglant confirmant largement des révélations de L'Express et de Mediapart. Le parquet de Marseille enquête depuis sur des soupçons d'essais cliniques non autorisés.
Retraité depuis l'été 2021 de son poste de professeur d'université-praticien hospitalier, Didier Raoult a été remplacé un an plus tard à la tête de l'IHU par Pierre-Édouard Fournier, longtemps proche de lui.
Avec AFP