Il y a trop de médecins étrangers dans les hôpitaux

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Le généraliste roumain s’installant dans un village du fin fond de la Creuse est un sujet récurrent dans la presse médicale. Mais dans les hôpitaux aussi, les praticiens étrangers occupent des postes abandonnés par les nationaux. `A tel point qu’on se demande parfois comment on ferait sans eux.

Il y a trop de médecins étrangers dans les hôpitaux

« On a aujourd’hui des jeunes extrêmement brillants qui sont collés à l’examen de médecine, et on laisse entrer des médecins étrangers qui souvent n’ont pas le même niveau. » Ainsi parlait François Fillon fin novembre dernier, lors d'un débat organisé dans le cadre de la primaire de la droite et du centre. Trop de médecins étrangers en France, vraiment ?

Cela reste à voir. Car sans l’apport des praticiens venus d’ailleurs, bien des hôpitaux peineraient à fonctionner. Les difficultés de recrutement pour les petits hôpitaux sont en effet extrêmes. Julien Guillaume, directeur des Affaires médicales du CH de Châteaudun, le constate au quotidien. « Pour être clair, il n’y a quasiment jamais de candidature de médecin à diplôme français », avoue-t-il. « La raison est simple : Châteaudun est une petite ville, isolée, pas très attractive. »

Tous les chemins mènent en Roumanie

Heureusement pour les habitants de cette sous-préfecture de l’Eure-et-Loir, leur hôpital a su aller voir ailleurs pour combler les postes que les praticiens français dédaignaient. « Nous nous sommes tournés vers la filière roumaine », explique Julien Guillaume.

Une situation qui n’a rien de spécifique à Châteaudun. L’Ordre estimait en 2014 que 22 568 médecins à diplôme étranger étaient inscrits au tableau, soit un peu moins de 10 % de l’ensemble de la profession. Mais combien d’entre eux travaillent dans les hôpitaux ? Difficile de le savoir. « Nous n’avons pas ces éléments pour les seuls hôpitaux », avoue Anne Bouygard, directrice de l’ARS Centre-Val-de-Loire, qui nous renvoie vers les estimations de l’Ordre. Même son de cloche du côté du Centre national de gestion (CNG). « Pour savoir combien il y en a, il faut aller dans les hôpitaux », regrette Philippe Touzy, chef du département « concours et autorisation d'exercice ».

30 à 40 % de praticiens étrangers dans certains CH

Faute de statistiques globales, on est obligé de se contenter des chiffres que veulent bien donner les diverses sources à l’intérieur des établissements. Julien Guillaume estime que près de 40 % des médecins du CH de Châteaudun ont un diplôme étranger. Le Dr Yazid Allas, président par intérim de la CME du CH de Vire, dans le Calvados, estime que c’est le cas de 30 % des praticiens de son hôpital.

Sous quel statut exercent-ils ? Tout dépend de l’origine de leur diplôme. Beaucoup des médecins à diplôme étranger de Châteaudun étant roumains et donc ressortissants de l’Union européenne, il leur est relativement facile de s’inscrire à l’Ordre et d’obtenir l’autorisation d’exercer de plein droit. Julien Guillaume assure qu’ils ont presque tous le grade de PH, et qu’ils reçoivent le même salaire que leurs confrères à diplôme français.

Ce n’est pas le cas des médecins à diplôme étranger du CH de Vire, majoritairement issus de pays arabes, donc à diplôme hors Union européenne, et obligés d’en passer par une lourde Procédure d’autorisation d’exercice (PAE). Résultat : la moitié d’entre eux exercent sous le statut de praticien attaché. « Dans les faits, ils effectuent les mêmes tâches que les autres », indique Yazid Allas. « La seule différence, c’est la rémunération : ils sont payés comme une infirmière. » 

Pas de médecin étranger = pas de continuité des soins

Et quand on lui demande comment son hôpital tournerait sans l’apport des praticiens attachés, le président par intérim de la CME du CH de Vire est catégorique. « Sans eux, la continuité des soins ne serait pas assurée », assène-t-il. Reste la question des compétences, pour Philippe Touzy, du CNG, la PAE à laquelle les praticiens à diplôme hors Union européenne sont soumis (voir ci-contre) vise justement à faire en sorte que les niveaux despraticiens soient homogènes.

Et pour les praticiens à diplôme européen ? « Les médecins roumains en particulier ont des formations largement équivalentes à ce qui se fait en France », estime Julien Guillaume. Bref, heureusement qu’ils sont là.

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