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Les associations de malades naviguent entre vigilance et crainte après les propositions de l’Assurance maladie pour juguler son déficit, comme la remise en question de la prise en charge à 100 % d’un cancer en rémission.
À l’heure actuelle, la « prise en charge à 100 % au titre d’une ALD est accordée par période de cinq ans renouvelable tant que vous ne serez pas considéré comme guéri », expose le site de la Ligue contre le cancer. La guérison diffère de la rémission, qui correspond à une diminution des symptômes.
Au moment de la sortie d’ALD, « une prise en charge à 100 % sans limitation de durée pour les actes médicaux et les examens de biologie nécessaires au suivi, sur demande du médecin traitant » est maintenue, précise la Ligue.
Dans certains cas, les pistes avancées par l’Assurance maladie peuvent s’étudier pour les associations de patients. Quand, par exemple, après « un diagnostic de cancer, il y a une intervention chirurgicale, et il n’y a pas de traitement derrière, adjuvant de chimiothérapie ou de radiothérapie », décrit ainsi pour l’AFP Catherine Simonin, membre de France Assos Santé, voix des usagers du système de santé.
« Il y a des patients qui peuvent récidiver 20 ans après »
« Ces personnes-là sont en affection de longue durée pour leur cancer, mais après, si elles sont en rémission complète et qu’il y a juste un suivi d’une consultation par an pour les voir, oui, ça peut être discuté », jauge-t-elle avec son autre casquette de membre de la Ligue contre le cancer.
Pour certains types de cancer, comme celui de la prostate, les propositions de l’Assurance maladie ne font pas sens, éclaire pour l’AFP Olivier Cussenot, figure de l’Association nationale des malades du cancer de la prostate (ANAMACaP). Pour cet urologue-oncologue-chercheur, une « définition de la rémission complète est purement théorique et arbitraire » : « Il y a des patients qui, même après 20 ans de rémission, peuvent récidiver ».
Et la Cnam préconise aussi de « travailler avec la HAS (Haute autorité de santé) à une liste de soins spécifiques et opposables à terme à chaque ALD ». C’est là où France Assos Santé se veut vigilante, pour ne pas que les patients soient lésés. « Il est proposé de se mettre autour de la table avec toutes les associations, les partenaires sociaux, pour définir ensemble, et c’est là que nous serons intransigeants, dans notre participation à la définition du panier de soins que comprend le système de l’affection de longue durée ».
La Sécu veut économiser
Pour René Ducroux, président de Atoutcancer, réseau d’associations, l’Assurance maladie « cherche des sous » et fait « des coupes un peu à droite à gauche ». « Il faut faire attention parce que les gens qui sont en rémission, souvent, ont des traitements, ont des médications : pour le cancer du sein, il y a une hormone-thérapie qui est donnée au minimum pendant cinq ans », argumente-t-il auprès de l’AFP.
Le centre de lutte contre le cancer Gustave-Roussy rapporte que 63,5 % des personnes guéries d’un cancer souffrent de « lourdes séquelles » qui « dégradent durablement leur qualité de vie », entre « douleurs, fatigue, troubles chroniques des fonctions motrices, troubles urinaires et gastriques, conséquences psychologiques ».
Olivier Cussenot abonde : « La problématique d’un cancer de la prostate, c’est un impact sur la qualité de vie, avec d’éventuels troubles de la fonction érectile ou d’incontinence urinaire ». « Et donc les patients doivent être pris en charge pour ça, sans oublier l’accompagnement psychologique », ajoute-t-il.
« Les gens qui ont eu un cancer ont peur de la récidive et ont besoin d’un suivi psychologique », rebondit René Ducroux. Enfin, Olivier Cussenot remarque : « Pour le cancer de la prostate, il ne semble y avoir aucune économie réelle (pour l’Assurance maladie), puisque la surveillance se fait avec un test, qui ne coûte pas très cher, on va dire 10 à 15 euros deux fois par an ».
Avec AFP