Mobilisation de janvier des médecins libéraux : Stéphanie Rist prend la parole pour apaiser la colère

Article Article

La ministre de la Santé, Stéphanie Rist, s’est adressée mercredi aux médecins libéraux, quelques jours avant un mouvement de grève contre plusieurs mesures du budget de la Sécurité sociale, assurant que certaines dispositions n’étaient plus d’actualité.

Mobilisation de janvier des médecins libéraux : Stéphanie Rist prend la parole pour apaiser la colère

© info.gouv.fr / iStock

« Je souhaite m’adresser à vous, pour dissiper des malentendus et renouer un dialogue qui, manifestement, s’est distendu », a déclaré Stéphanie Rist dans une lettre ouverte aux principales organisations du secteur.

Les médecins libéraux sont appelés à faire grève pendant dix jours à partir du 5 janvier, afin de protester contre diverses mesures du projet de budget de la Sécurité sociale, promulgué ce mercredi, et plus largement contre des politiques qui, selon les organisations, mettent en danger leur liberté d’exercice.

Dans son courrier, Stéphanie Rist a souligné que certaines mesures contestées n’étaient plus à l’ordre du jour, dont notamment l’instauration d’une amende pour les médecins qui ne rempliraient pas le dossier médical partagé (DMP), ou carnet de santé numérique. Le Conseil constitutionnel a censuré mardi cette disposition, estimant qu’elle n’avait pas sa place dans un budget de la Sécurité sociale.

Ce dossier « s’avère déjà utile à des millions de patients et des milliers de professionnels », a, pour autant, estimé Stéphanie Rist, appelant les soignants à l’améliorer mais prenant acte que cela se ferait « sans sanction ».

Pression sur les tarifs

Autre point de blocage, des mesures autorisent les autorités à baisser unilatéralement les tarifs de certains actes, sans tenir compte du dialogue social qui prévaut habituellement.

Cette mesure ne constitue qu’une « possibilité » et non une « obligation », a déclaré Stéphanie Rist, notant que le gouvernement n’y était pas favorable et promettant de ne pas avoir recours à cette éventualité tant qu’elle serait ministre.

Stéphanie Rist a, en revanche, défendu une mesure controversée qui restreint la prescription d’arrêts de travail en limitant leur portée dans la durée. Les médecins dénoncent une atteinte à la liberté de prescription.

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/mobilisation-de-janvier-deja-6-500-medecins-grevistes-declares-selon-un-recensement

« L’objectif de cette mesure est avant tout collectif : permettre un suivi plus régulier des patients en arrêt de longue durée pour lutter contre la désinsertion professionnelle », a écrit Stéphanie Rist, assurant toutefois que les médecins « pourront toujours déroger aux limites de durée lorsque l’état du patient le justifie ».

La ministre a enfin évoqué le sujet sensible des dépassements d’honoraires, que le budget de la Sécurité sociale va interdire dans certains cadres précis.

« Nous ne pouvons pas nier une réalité : une minorité de professionnels abusent des dépassements », a jugé Stéphanie Rist.

Avec AFP

La lettre dans son intégralité

Chers médecins, chers internes, chers étudiants,

Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, je suis la ministre de tous les médecins, de tous les modes et de tous les lieux d’exercice. Et c’est précisément à ce titre que je souhaite aujourd’hui m’adresser à vous, pour dissiper des malentendus et renouer un dialogue qui, manifestement, s’est distendu.

Depuis quelques semaines, je vois circuler de nombreuses informations – parfois inexactes – au sujet des mesures de la Loi de financement de la sécurité sociale (LFSS). La confusion tient pour beaucoup aux allers-retours parlementaires des derniers mois, entre l’Assemblée nationale et le Sénat : certains articles ont effectivement été adoptés, parfois d’ailleurs contre l’avis du Gouvernement, tandis que d’autres ont été supprimés ou amendés. En revanche, certaines mesures souvent relayées n’ont jamais été dans le texte : il est donc important de clarifier la situation et vous présenter le plus objectivement possible, le texte qui a été adopté.

Au-delà du PLFSS 2026, je constate également, dans vos interpellations, un sentiment de perte de confiance envers l’État et l’Assurance maladie. Je l’entends et le prends au sérieux.
Si je vous écris aujourd’hui, c’est donc avant tout pour vous exprimer ma volonté de rétablir cette confiance et ce dialogue, que je n’ai jamais souhaité voir remis en cause.

Mais nourrir ce dialogue suppose d’en assurer des bases solides et de s’entendre sur ce dont on parle, à commencer par les mesures issues de la Loi de financement de la sécurité sociale pour 2026. C’est pourquoi je souhaite revenir sur quatre points majeurs du texte voté, mais aussi de l’application que j’entends en faire.

La première source de vos inquiétudes concerne la possibilité que les tarifs des actes médicaux ne soient plus définis par la négociation conventionnelle mais imposés par voie réglementaire.

Je comprends d’autant mieux vos réactions que cette mesure n’a pas fait l’objet d’un avis favorable du gouvernement. Mais, soyons précis : le texte prévoit une possibilité et non une obligation. Je prends donc ici un engagement très ferme : tant que je serai ministre, je n’aurai pas recours à cette possibilité.
Mon rôle, tel que je le conçois, est d’accompagner l’Assurance maladie et les professionnels en laissant pleinement sa place à la négociation et à la voie conventionnelle. Je tiens par ailleurs à rappeler ici que l’ancien article 24 (qui figurait dans le texte initial du PLFSS) relatif aux situations de rentabilité très élevées a été supprimé du texte finalement adopté.

Le second point, c’est celui des dépassements d’honoraires.
Je veux vous l’exprimer sans ambiguïté : je ne suis pas « anti-secteur 2 » et il n’est absolument pas question de le supprimer. Un temps envisagé, la mesure de taxation des dépassements d’honoraires a, quant à elle, été supprimée de la Loi de financement de la sécurité sociale.
Mais nous ne pouvons pas nier une réalité : une minorité de professionnels abusent des dépassements, au point de peser sur le pouvoir d’achat de nos concitoyens et d’occasionner des renoncements aux soins, aujourd’hui objectivés.
C’est pourquoi j’ai proposé à vos représentants syndicaux de se mettre autour de la table pour retravailler l’ensemble du sujet, dans le cadre conventionnel et dans un calendrier à définir ensemble. Toute réponse, pour être pertinente et respectueuse du dialogue social, devra être construite avec vous.

Troisième point, le dossier médical partagé (DMP).
Les sanctions, en cas d’usage insuffisant du DMP sont pour beaucoup d’entre vous un motif de mécontentement, que je mesure pleinement. Bien qu’adoptée par le Parlement, cette mesure a été censurée par le Conseil Constitutionnel : ces sanctions sont donc supprimées.
Outil transformant pour le système de santé, le DMP continue de se déployer et s’avère déjà utile pour des millions de patients et des milliers de professionnels. Aussi, si les sanctions ne seront pas inscrites dans la loi, le DMP doit et va continuer à évoluer pour être plus ergonomique, plus simple d’usage et plus complet, afin de devenir un outil plus efficace dans votre pratique quotidienne.
Continuons à améliorer l’outil, levons les blocages et, ensemble, avançons sans jamais revenir en arrière, dans l’intérêt des patients. Vous êtes les acteurs essentiels à la réussite de cette transformation et c’est en enrichissant le DMP que nous y parviendrons, sans sanction.

Le quatrième point, c’est la limitation de la durée de prescription des arrêts de travail.
En tant que ministre, mais aussi en tant que médecin, je suis profondément attachée à la liberté de prescription. L’objectif de cette mesure est avant tout collectif : permettre un suivi plus régulier des patients en arrêt de longue durée pour lutter contre la désinsertion professionnelle.
Les médecins, il est fondamental de le préciser, pourront toujours déroger aux limites de durée lorsque l’état du patient le justifie.
Préférant toujours l’accompagnement à l’injonction, j’ai également décidé de généraliser le dispositif SOS IJ d’ici juin prochain. Testé dans deux départements depuis un an, SOS IJ vous permettra de solliciter un appui immédiat du médecin-conseil de l’Assurance maladie en cas de difficulté sur une prescription d’arrêt de longue durée, de conflit avec un employeur ou encore de situations sociales difficiles. A cela s’ajoutent d’autres outils d’accompagnement des médecins qui auront toujours ma priorité : formation, recommandations de la HAS intégrées aux logiciels pour vous aider dans vos prescriptions, groupes d’amélioration des pratiques entre pairs.

En conclusion, je tiens à vous l’exprimer simplement et très sincèrement : dans le contexte actuel de notre système de santé, nous avons plus que jamais besoin d’avancer ensemble. Rétablir la confiance ne se décrète pas, mais mon engagement est clair : toujours privilégier le dialogue au rapport de force et construire, avec vous, des solutions durables, respectueuses de votre exercice comme des attentes de nos concitoyens. Avec, bien sûr, comme unique boussole, l’intérêt premier des patients, qui nous réunit et nous oblige.

Ma méthode est simple : parlons-nous, travaillons ensemble, et avançons, au service d’un système de santé que nous chérissons et qui mérite, plus que jamais que nous unissions nos forces pour le préserver.

Ma porte est et restera toujours ouverte pour poursuivre ce dialogue.

Sincèrement,

Stéphanie RIST

Aucun commentaire

Les gros dossiers

+ De gros dossiers