ECNi 2019 : plus de postes dans les déserts médicaux

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ENTRETIEN - Pour adapter le nombre d’internes aux tensions de démographie médicale, quelques ajustements ont été réalisés en faveur des CHU situés dans des zones en tension. Le doyen de la faculté de Tours, Patrice Diot, explique pourquoi.
 

ECNi 2019 : plus de postes dans les déserts médicaux

Tours et Limoges, deux villes situées dans des régions à faible densité médicale, et souffrant de tensions d’accès aux soins. Deux villes dont les CHU se voient attribuer quelques internes supplémentaires (respectivement +7,5 et +6 %) en 2019, d’après l’arrêté ministériel fixant le nombre d’étudiants affectés. Logique dans l’idée, mais surprenant alors que le nombre d’internes de la promotion 2019 est en baisse (-1,2 %) en comparaison de celle de 2018.
 
Le Pr Patrick Diot, doyen de la faculté de Tours, explique à What’s up Doc ce qui a motivé cette hausse locale, mais aussi les nouvelles directives impulsées par l’Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS), dont il est le président depuis 2017.
 

What’s up Doc. Comment expliquez-vous cette hausse du nombre d’internes à Tours ?

Patrice Diot. Dans notre région, nous observons un déficit historique du nombre d’internes. Le numerus clausus est très supérieur aux effectifs d’internes : on perd des étudiants au moment du troisième cycle. Ce qui pose un énorme problème, car nous sommes situés dans la région la plus affectée par les problèmes de démographie médicale.

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J’ai alerté sur ce sujet depuis longtemps. Le président de la région s’en est saisi et à relayé l’alerte auprès du Premier ministre, qui a demandé aux ministres de la Santé et de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation d’ajuster les affectations d’internes. Elles seront donc égales au numerus clausus, fixées à 255 internes.

WUD. Et pour les autres facultés qui gagnent des internes ?

P.D. En tant que président de l’ONDPS, j’ai aussi une interprétation plus générale au niveau national. Nous avons changé de méthode et de critères pour s’adapter à la démographie médicale. Les CHU sont classés en trois catégories par rapport à la région où ils sont situés : bien dotée en internes, à niveau, ou sous-dotée. En fonction, des instructions sont transmises aux ministères pour corriger les affectations.

WUD. Quels sont les autres critères ?

P.D. Pour la médecine générale, le nombre de postes doit atteindre 40 % du nombre de postes ouverts. D’autres spécialités sont également protégées, comme la médecine d’urgence, la gynécologie-obstétrique ou médicale, la médecine du travail

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Mais en réalité, aucune spécialité gagne véritablement en internes. En revanche, plusieurs spécialités perdent cette année, car la promotion d’internes est réduite par rapport à l’année précédente, probablement à cause d’un effet décalé de la réforme du troisième cycle. Certains étudiants ont décalé d’un an leur passage des ECN pour éviter de se retrouver dans la première vague d’internes qui ont débuté en 2017. Ce qui a gonflé artificiellement la promotion 2018.

WUD. La régulation du nombre d’internes peut-elle favoriser l’installation dans les déserts médicaux ?

P.D. Je pense que c’est important d’en parler. C’est un changement de paradigme. Il est à mon avis crucial de se pencher sur la répartition des internes, car les médecins s’installent souvent dans la région où ils effectuent leur internat. Ils découvrent des territoires qu’ils n’envisageaient pas pour une installation mais dans lesquels ils peuvent finalement se projeter, et ce levier puissant n’est pas assez utilisé.
 
L’axe Nord-Est/Sud-Ouest de la métropole est déserté en médecins, et c’est aussi celui qui est le moins doté en internes. Si on veut corriger la démographie médicale, il faut s’intéresser à ce problème.

Retrouvez le Classement 2018-2019 des CHU et des spécialités

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