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« Ça tourne à l'inventaire à la Prévert », décrit pour l'AFP le Dr Jérôme Marty, président du syndicat UFML-S, qui raconte être par exemple confronté au cas du « type qui fait du rugby à qui on réclame un certificat pour jouer au ping-pong ».
Ces certificats « absurdes » - terme qui a donné son nom à un site internet dédié, lancé par le Collège de la médecine générale (CMG) - laissent également « rêveuse » la Dr Nathalie Regensberg de Andreis.
« Comme ce certificat pour entrer en maternelle, sachant que les enfants ont déjà un carnet de santé avec les vaccins obligatoires notés dessus », rapporte à l'AFP cette généraliste à Paris.
On la sollicite souvent, comme nombre de ses pairs, pour justifier l'absence à l'école d'un enfant malade « pour que les parents puissent se faire rembourser un jour de cantine ».
« Au moment où on voit l'enfant, il est parfois déjà guéri », complète le Dr René-Pierre Labarrière. « Il devrait y avoir quand même une certaine confiance entre l'institution qui demande et les parents pour éviter ça », ajoute ce généraliste à Annecy (Haute-Savoie). « Un certificat d'aptitude pour la pétanque ou les échecs, ça m'est arrivé... », détaille-t-il.
En septembre 2024, la plateforme certificats-absurdes.fr du CMG avait lancé une action intitulée « Septembre violet », visant à sensibiliser l’opinion publique et les décideurs politiques sur le problématique de ces certificats injustifiés, et parfois illégaux.
« Responsabilité des parents »
Car ce genre de requêtes « pique du temps pour des patients qui en auraient vraiment besoin », regrette le Jérôme Marty, qui exerce comme généraliste à Fronton (Haute-Garonne).
« On marche sur la tête à une époque où des gens qui sont malades, insuffisants cardiaques, diabétiques, n'arrivent pas à avoir de rendez-vous », renchérit auprès de l'AFP le Dr Luc Duquesnel.
Ce médecin à Mayenne (dans le département du même nom) cite ces cas qui relèvent de « l'auto-médication ». « Vous avez un enfant qui a 38-39°C de fièvre, vous donnez du Doliprane, mais quand l'enfant est chez la nourrice, elle exige un certificat médical pour en donner : moi et beaucoup de confrères refusons, parce qu'en fait c'est la responsabilité des parents », dit-il.
Le Dr Marty y voit « une société de la plainte et du risque de poursuite continuels » : tant pis si le docteur est « surchargé », « ce qu'ils veulent, c'est se protéger » en cas de « pépin ».
Sollicitée par l'AFP la première semaine d'août sur les besoins de certificats, la Fédération Française Sports pour Tous, qui réunit un large réseau de clubs, d'animateurs et de bénévoles, n'a pas donné suite.
« On en arrive quasiment à des certificats pour clubs de lecture car les collectivités, les entreprises, veulent se prémunir de toute attaque légale », renchérit la Dr Nathalie Regensberg de Andreis.
Pas d'obligation légale
Face à cette inflation, les médecins ripostent. Le Conseil départemental du Nord de l'Ordre des médecins propose ainsi des documents type pour dire non tout en faisant de la pédagogie.
Comme quand un lycée requiert un certificat d'absence d'allergie pour une formation en CAP. « Aucun texte de loi ne rend obligatoire la présentation d'un certificat médical, quel qu'il soit, pour une inscription en CAP » et « de surcroît, il est impossible de statuer sur une absence d'allergie « a priori » », stipule cette réponse standard.
Mais le CDOM59 éclaire aussi les médecins sur des certificats bien « obligatoires », comme « pour une première demande et pour un renouvellement d'agrément d'assistant maternel ».
Le site certificats-absurdes.fr, outre des campagnes de sensibilisation, donne aussi des outils et arguments aux médecins.
Ainsi, dans les clubs affiliés à une fédération sportive, il n'est plus nécessaire pour les mineurs de produire un certificat médical depuis le décret du 7 mai 2021 pour obtenir, renouveler une licence, s'inscrire à une compétition. Un tel certificat est requis seulement « lorsque les réponses au questionnaire de santé du mineur conduisent à un examen médical », précise le site.
« Il faut responsabiliser chacun, avoir conscience que la demande doit être fondée pour ne pas compromettre le temps médical », conclut René-Pierre Labarrière, qui est aussi à la tête de la section exercice professionnel du CNOM.
Avec AFP