« On a clairement l'impression que la mort des médecins scolaires est actée politiquement » : pénurie, salaires et conditions de travail en chute libre dénonce le chef du SNMSU

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Christophe Clec’h est médecin scolaire depuis plus de 15 ans. C’est aussi le secrétaire général du Syndicat National des Médecins Scolaires et Universitaires (SNMSU). En cette rentrée 2025, il sonne l’alerte une énième fois sur le déclin de la médecine scolaire en France.

« On a clairement l'impression que la mort des médecins scolaires est actée politiquement » : pénurie, salaires et conditions de travail en chute libre dénonce le chef du SNMSU

© Midjourney X What's up Doc

 

What’s up Doc : Quels sont les principaux enjeux pour les médecins scolaire en cette rentrée 2025 ?

 

Christophe Clec’h : L’enjeu prioritaire c’est maintenir des médecins scolaires au sein de l'éducation nationale. Nous sommes confrontés à une pénurie croissante et à un déclin extrêmement inquiétant du nombre de médecins scolaires. 

En 2009, il y avait environ 1500 sur le territoire national, aujourd'hui il en reste 500. Et, on perd à peu près 100 médecins par an. Ce sont essentiellement des départs en retraite, mais aussi, de plus en plus de démissions, de mise en disponibilité ou de détachement vers d'autres fonctions publiques.

Si on continue ainsi, dans 5 ans il n’y a plus de médecins scolaires.

 

Comment faire pour que les médecins scolaires en poste ne démissionnent plus ?

 

C.C : Le vrai problème, ce ne sont pas les départs. C’est le manque de nouveaux médecins. Mais au fond, c’est lié.

Notre salaire est bien en dessous de ce que touchent nos confrères, ça ne va pas pousser les jeunes (ou les moins jeunes) à nous rejoindre. 

La dégradation des conditions de travail joue aussi. Moins on est nombreux, moins on nous donne les moyens de travailler correctement. Pourtant, moins il y a de médecins, plus on a une charge de travail importante.

Les centres médico-scolaires sont vétustes, pauvres en équipements, il y a des problèmes de connexion internet, et on ne nous fournit pas les équipements nécessaires aux visites et aux dépistages. 

En bref, il n’y a pas de budget. À chaque fois qu'on nous demande quelque chose, c’est non.

 

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/pierrette-clozier-salvaing-medecin-scolaire-prend-enfin-sa-retraite-80-ans-si-je-partais-ca

 

Selon vous, l’augmentation de vos salaires pourrait avoir un réel impact ?

 

C.C : Je pense que oui. Il nous arrive de recevoir des internes de médecine générale qui découvrent la santé scolaire - parce qu'on n’en parle pas du tout pendant le cursus universitaire - qui sont extrêmement intéressés par l’exercice. 

Mais, quand ces internes voient les salaires, ils renoncent à rester parmi nous, même s’ils aimeraient.

Il y a quelque temps, un hospitalier m’a appelé parce qu’il cherchait à se reconvertir. Mais, lorsque je lui ai parlé du salaire, il a tout de suite été refroidi. 

 

Vous avez l’impression d’être abandonnés par les pouvoirs publics ?

 

C.C : Complétement. Les gouvernements se sont succédés et rien n’a changé. Récemment, j’ai revu un extrait d’un député lors des Questions au gouvernement à l’Assemblée Nationale sur le déclin de la médecine scolaire. Le ministre de l’éducation nationale de l’époque avait affirmé qu’ils « travaillaient sur ce sujet ». C’était en 2018, 7 ans plus tard c’est encore pire. 

À chaque fois qu’on discute avec le ministère ou la direction générale de l'enseignement scolaire, rien n'est fait. Il y a aucune volonté politique.

 

« Il y a non seulement une absence de considération, mais surtout un manque de respect, difficile à encaisser pour nous »

 

Vous êtes secrétaire générale du SNMSU, que proposez-vous concrètement ?

 

C.C : Notre syndicat est un syndicat de dialogue. Cela fait des années que nous venons avec des propositions concrètes aux audiences face à nos dirigeants.

La première revendication reste une augmentation de nos salaires. Il n’y a que ça qui peut sauver le métier. Aussi, une bonne partie de notre salaire est sous forme de primes. Ce n’est pas acceptable non plus parce que ça ne compte pas pour notre retraite.

D’autres de nos revendications concernent l'amélioration des conditions de travail et la révision de nos missions. Il faut faire évoluer le rôle des médecins scolaires afin de pouvoir, nous aussi, prescrire. Nous devrions également avoir des bases en pédopsychiatrie pour être un contact de première ligne. Tout cela nous permettrait de renforcer l’attractivité de la profession.

Mais, on a clairement l'impression que la mort des médecins scolaires est actée politiquement. Il y a non seulement une absence de considération, mais surtout un manque de respect, difficile à encaisser pour nous. 

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