À Paris, chaque nuit, 700 familles dorment dehors, écrit l’Académie de médecine. Mineur.es, femmes enceintes et nouveaux nés s’entassent sur les trottoirs de la capitale dans des conditions sanitaires déplorables. "Par manque d’informations ou pour tenter d'échapper aux contrôles de police", ils évitent les centres de soins. Cela se traduit, par exemple, par une difficulté de suivi prénatal pour les femmes enceintes. À cela s’ajoute un délai “de trois mois de séjour continu imposé par les pouvoirs publics avant de pouvoir accéder à l’AME” ; l’absence d’un médecin traitant ; le refus de certains généralistes de les soigner (10%) et le faible accès à la médecine de prévention (vaccins, soins dentaires, etc.).
Pourtant, la situation des personnes migrantes est “un enjeu de santé publique insuffisamment prise en compte”, note l’Académie de médecine. “Le coût sanitaire et social de cette ignorance n’est pas connu, mais il est regrettable d’observer les occasions manquées de mettre en place un suivi sanitaire de qualité accessible”.
Car si les personnes migrantes (48% de femmes) sont majoritairement jeunes et en bonne santé à leur départ, dès leur arrivée en France leur santé est “fragilisée par les traumatismes subis douloureusement pendant le parcours”. Une situation qui s'aggrave ensuite “par la stigmatisation dont ils sont éventuellement l’objet dans le pays d’accueil, et leurs conditions précaires de vie”.
Dans ce rapport, l’Académie met l’accent sur le manque de cohérence de l’accueil des mineur.es qu’ils soient accompagnés ou non. “L’aide sociale à l’enfance (ASE) relève de chaque département, hélas sans cohérence nationale”. Elle rappelle que l’évaluation de l’âge ne doit pas se faire sur les pratiques radiologiques ou biologiques et demande aux ARS de respecter la présomption de minorités des jeunes étrangers. Pendant cette période d’enquête, elle recommande la plus grande vigilance car celle-ci “peut durer des mois au cours desquels le mineur risque de n’être pas pris en charge”. Ni considéré comme majeur, ni comme mineur, ils n'ont plus accès aux soins ou à un hébergement.
L'Académie souligne le problème qu’il peut y avoir aussi sur l’indépendance des médecins concernant les services médicaux pour les personnes en situation régulière. Cette compétence est passée des ARS à l’OFFI, et relève désormais du ministère de l’Intérieur et non plus du ministère de la Santé. Une hérésie pour las académiciens qui demandent de réaffecter ce service au ministère de la Santé.
L’Académie préconise la révision du règlement de Dublin “dont les conséquences sanitaires sont déplorables”, de mieux informer sur la situation des personnes migrantes, de mieux documenter leurs conditions de vie et d’accueil et de créer une “protection maladie réellement universelle, rassemblant AME et CMU, immédiate, inconditionnelle, garantissant l’accès aux soins pour toute personne résident sur le territoire national”.
Le rapport en chiffres En 2018 :120.000 demandes reçues à l’Ofpra (France) 25 millions de réfugiés dans le monde : 48% de femmes, 50% de mineurs 35.000 personnes sont hébergées chaque nuit par le Samu social 700 familles dorment dans les rues de Paris chaque nuit 3000 enfants dorment dehors chaque nuit, à Paris 10% des médecins ont déjà refusé des soins à une personne migrante, en France |